La 8e Cité
Chapitre V : Le secret du sicaire
Maison de Laguerra et de Mendoza. Pattala. Inde. Tard dans la nuit.
Dans la pénombre Donato, sa lame entre les dents, s'approche d'Isabella. Toujours aux aguets et bien qu'à quelques pas d'elle, il ne peut s'empêcher de la regarder dormir, respirer doucement...
Alors, bien que d'ordinaire complétement impassible, l'assassin ne peut empêcher des souvenirs profonds d'affluer...
« Ah, Laguerra...Isabella...Dans quel pétrin t'es-tu fourrée ? pense-t-il. Pourquoi a-t-il fallu que tu trahisses notre souverain ? Et pourquoi m'as-tu rejeté, moi ? Rien ne nous résistait...Nous réussissions toujours nos missions, pour la grandeur de l'Espagne et de Charles Quint ! Nous aurions pu être plus...tellement plus...Invincibles, liés pour la vie, et ton père nous aurait même donné sa bénédiction s'il n'était pas parti dans sa quête d'or insensée...Au lieu de cela, tu vas périr ici même cette nuit, bêtement, dans ce pauvre pays loin de tout, sans fortune, sans gloire et, pire encore pour toi sans doute, sans honneur...Et tout ça, pour quoi ? Une amourette avec un vulgaire marin ? Une passade avec un pauvre navigateur espagnol sans ambition, sans but, sans vision ? Quel dommage ! Tant pis ! C'est un contrat comme un autre, se persuade-t-il enfin. Adieu, Isabella, mi amore...».
Il s'apprête alors à reprendre sa dague dans sa main droite et à passer à l'action quand, soudain, il s'interrompt, entendant des gardes arriver à l'extérieur, juste en dessous de la lucarne. Donato se redresse et doucement, recule de quelques pas, afin de voir de quoi il retourne...
« C'était une belle fête ! dit l'un des gardes de l'Ordre, sa voix légèrement étouffée par le masque de condor qu'il porte sur la tête. Ca faisait longtemps que tous n'avaient pas veillé aussi tard !
- Oui, lui répond un autre soldat, vêtu similairement. Ca a fait plaisir aux habitants de revoir les enfants ! On leur doit tellement ! »
Les soldats restent quelques instants à discuter au niveau de la lucarne.
Donato décide alors de prendre son mal en patience, et d'attendre leur départ...
Limite de Pattala. Inde. Tard dans la nuit.
Mendoza est arrivé à la sortie de Pattala. Tout en marchant, le navigateur est toujours pensif, préoccupé par les implications des révélations apprises lors de la soirée...Soudain, il entend un bruit de feuillages malmenés à proximité.
« Trop de bruit pour que cela ne soit qu'un simple animal », pense-t-il.
Son instinct de mercenaire prenant alors le dessus, il tire son épée et se met en garde.
« Qui va là ? demande-t-il. Sortez de là, ou bien je viens vous chercher et vous embrocher !
- Mendoza ? Mendoza ? entend-il alors.
- Pedro ??? C'est bien toi ? » dit le navigateur, surpris, voyant le marin émerger de la jungle, suivi de Nyamita, Sancho et Naïa, la compagne de celui-ci.
La première intention de Mendoza est alors de prendre ses anciens compagnons dans ses bras mais, il se ravise immédiatement, se doutant que leur présence ici n'est pas bon signe...
« Mais que faites-vous là ? dit-il. Comment ?...
- Nous avons été enlevés par Ambrosius ! » dit Pedro, se rapprochant de Mendoza, lui mettant ses mains sur les bras et le regardant dans les yeux, paniqué.
« Mé..Mémé..Mais nous avons réussi à nous écha..cha..cha..chapper..» ajoute Sancho, d'une voix tout aussi tremblante.
«Ambrosius est ici ???» dit le navigateur, soudain très inquiet.
«Oui, dit Nyamita, et il est toujours aussi dangereux. Il a menacé mon peuple ! »
- Bon sang ! dit Mendoza... Il faut immédiatement aller prévenir Laguerra et les autres ! Vous quatre, ordonne-t-il en les regardant, allez alerter les gardes et Tao ! Sa maison est la plus proche du Grand Condor, au centre de la ville.. Nous discuterons plus tard.»
Pedro acquiesce d'un signe de tête.
Là dessus, tous se mettent à courir et Mendoza, lame toujours au clair, se précipite à toutes jambes vers son domicile...
Maison de Laguerra et de Mendoza. Pattala. Inde. Tard dans la nuit.
Après un moment qui lui semble être une éternité, Donato voit enfin les gardes bouger et s'en aller continuer à faire leur ronde.
Il tourne alors son attention à nouveau vers sa cible.
« Encore désolé, Isabella ! Cette mort n'est pas digne de toi ! » pense le tueur s'approchant, pour de bon cette fois, de sa future victime.
Il s'apprête à frapper quand, soudain, la porte d'entrée de la maison s'ouvre d'un coup violent, le surprenant et interrompant son geste.
Un individu essoufflé, Mendoza, entre alors, hurlant à tue tête : « Laguerra ! Laguerra ! », ce qui tire brutalement la belle endormie de son sommeil.
Mendoza voit alors le tueur qui, lui, ne met qu'un instant à analyser la situation. L'assassin tente immédiatement de planter sa dague dans le cou d'Isabella, reprenant conscience mais encore allongée, mais le navigateur arrive de justesse à intercepter de la pointe de son épée la lame mortelle et d'un coup sec, relève le bras du tueur en l'air.
L'asesino tente immédiatement de dégainer sa lame de Tolède, plus adaptée à l'escrime, mais Mendoza ne lui en laisse pas le temps, s'acharnant sur lui et l'obligeant à parer ses coups et à reculer.
Isabella, reprenant ses esprits, voit Donato lutter avec Mendoza, le tueur arrivant à éviter les coups de son amant. Son entrainement d'espionne l'aidant, elle réalise immédiatement la situation et se roule sur le côté pour se mettre hors de portée de la dague fatale, encore trop proche d'elle à son goût.
Elle se redresse alors sur ses pieds, s'adossant au mur opposé et sans quitter des yeux le ballet des deux combattants, parvient à récupérer son pistolet, qui est chargé en permanence et se trouve sur une table de nuit. Elle met ensuite le tueur en joue.
Ce dernier, voyant la situation empirer en sa défaveur, pousse un juron et décide de renoncer à sa sinistre tentative...D'un bond, les bras en avant, il passe à travers la lucarne. Laguerra tire, mais en raison de l'obscurité de la pièce et de son esprit encore un peu assoupi, elle rate sa cible, bien que de peu. L'assassin, de l'autre côté du mur, se réceptionne en effectuant un roulé-boulé, se relève, puis détale à toutes jambes...
Mendoza, trop large d'épaules pour passer par la lucarne, sort immédiatement en repassant par la porte d'entrée, mais cela lui coûte de précieuses secondes et quand il arrive au niveau de l'ouverture, l'asesino est malheureusement déjà trop loin pour être poursuivi.
Mendoza retourne alors à son domicile, s'assurer que sa belle n'a rien...
Centre de Pattala. Inde. Tard dans la nuit.
« Alerte ! Alerte ! » crie Pedro, ses mains en porte voix, tout en courant comme un dératé vers le centre de la ville. Ses trois compagnons font de même, Sancho ayant tout de même du mal à suivre le rythme des autres...
« Al.al.al.Alerte ! » hurle-t-il tout de même lui aussi.
Leur raffut a tôt fait de faire accourir des gardes de l'Ordre du Condor. Heureusement, certains de ces soldats reconnaissent tout de suite les deux marins et abaissent leurs lances à leur approche.
Les loups de mer, sans s'arrêter de courir ni de crier et les gardes à leur suite, se dirigent vers la demeure indiquée plus tôt par Mendoza.
Ils s'y arrêtent alors et tambourinent à la porte comme des forcenés.
« Tao, moussaillon, ouvres-nous ! Taoooo ! Taoooo !» crie Pedro.
Au bout de quelques instants, une clé tourne péniblement dans la serrure puis la porte s'entrouvre, révélant un Tao émergeant péniblement de son sommeil, les cheveux en pagaille, la marque de son oreiller encore sur la joue et Pichu posé sur sa tête, le perroquet étant lui aussi encore à moitié assoupi...
Les deux marins, quant à eux, sont trop paniqués pour remarquer que le jeune homme porte désormais lui aussi un Médaillon du Soleil.
« Sancho ? Pedro ? dit le garçon d'une voix encore endormie, puis baillant. Ohlala ! En voilà un rêve bizarre !!! J'ai du trop manger ce soir ! » Il s'apprête à refermer la porte pour aller se recoucher.
« C'est pas un rêve, gamin ! » dit Pedro en le secouant vivement comme un prunier, faisant sursauter Pichu qui, inquiet de ce réveil brutal, va se blottir à l'intérieur du poncho de Tao.
« Zar...zarzar..Zarès est ici ! » hurle Sancho.

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Ils continuent de crier quelques instants.
Cela finit par complétement réveiller Tao, bientôt rejoint par Indali, puis Esteban et Zia, tous trois logeant eux aussi également là pour la nuit...
« Pedro ?! Sancho ?! Nyamita ! Naïa ! s'exclament les enfants, ahuris.
- Esteban ? Zia ? s'étonnent les deux marins. Zarès est ici ! »
« Zarès !? » disent simultanément Esteban et Zia, sursautant et regardant soudain les alentours.
« Barbe Rouge est de retour ? » s'inquiète Indali, portant la main à sa bouche et frissonnant.
« Mais, comment sait-il que nous sommes là ? interroge Zia.
- C'est pas important, Zia ! » dit Pedro un peu gêné d'avoir indiqué leur position à Ambrosius. « Mendoza est informé ! Il nous a dit de vous prévenir ! »
Là dessus un nouveau garde arrive en courant : « Maître Tao ! Maître Tao ! Je viens du Temple Mémoire ! Le coffre a été volé ! »
« Personne n'est blessé ? » s'inquiète tout de suite le Maître de l'Ordre du Condor.
« Non, heureusement ! répond le soldat. Les gardes en service n'ont pas vu le voleur cependant. »
« Les artefacts ! » panique Zia, consciente de la motivation probable d'Ambrosius.
« Ne t'inquiètes pas, Zia, les objets n'étaient pas dans ce coffre... Par contre le coffre, lui, se trouvait dans un socle de marbre indestructible...».
Esteban, prenant son menton dans sa main, déduit : « il n'y a effectivement que Zarès qui puisse réussir à la fois à s'introduire dans une place bien gardée, à soulever un coffre encastré et arriver à sortir avec celui-ci sans être vu...Tao, il faut avertir tout le monde ! »
Regardant son ami et arrivé à la même conclusion, Tao donne alors cet ordre aux gardes présents.
Les guerriers hochent la tête et se dispersent, afin d'agir plus efficacement.
Les enfants font alors rentrer les anciens captifs dans la demeure de Tao. Le quatuor leur relate ensuite les événements récents dont ses quatre membres ont été victimes...
Machine Olmèque d'Ambrosius. Région de Pattala. Inde.Tard dans la nuit.
Après une bonne course à travers la jungle, Donato se retourne, s'assure de ne pas être suivi, puis rentre à l'intérieur de la machine. Il y trouve Zarès, toujours recouvert en partie d'une sorte de peinture dorée, peinant à s'en débarrasser et fulminant de rage...
« Ils me paieront tout cela ! » hurle encore Zarès, faisant nerveusement les cent pas, en cercle, dans la salle de commandes.
« Me voilà, Maître ! » dit simplement l'assassin.
« Ah ! Te voilà, enfin ! Est-ce que tu m'apportes une bonne nouvelle ? » interroge l'alchimiste, baissant d'un ton sa terrible voix caverneuse.
« Non, hélas ! reprend Donato. Ce Mendoza dont vous m'aviez parlé est intervenu au dernier moment et à deux contre un, Laguerra et lui, la lutte était en ma défaveur...Je retenterai ma chance à la prochaine occasion !».
« Encore une déception ! Et Tao m'a roulé : je n'ai pas récupéré les artefacts ! » dit Zarès, contenant difficilement sa rage. Mercator, présent également dans la pièce, prend bien soin de ne pas attirer l'attention de son maître en ce moment.
Zarès bouillonne encore de colère un long moment puis, parvient à se calmer et commence à réfléchir...
Le sentant moins impulsif, Donato lui dit alors, d'un ton neutre : « Messire, pourquoi ne pas simplement menacer de détruire Pattala, comme vous l'avez fait à Zimbabwe ? Vous pourriez demander les objets aux villageois puis, une fois les artefacts récupérés et si vous le souhaitez, vous pourriez pulvériser cette ville ainsi que Laguerra par la même occasion...De ce que j'ai cru comprendre, ajoute-t-il en désignant la machine, cet engin semble en être capable. Ma mission serait alors complète et vous auriez satisfaction... »
« Oui, Donato, mais je pense que Tao préférerait briser lui-même les objets ou qu'ils soient pulvérisés dans une explosion plutôt que me les donner, grogne Ambrosius. Même s'il savait que cela coûterait la vie des habitants de Pattala. Cela lui ferait énormément de peine, mais il préférerait probablement tout faire plutôt que me permettre de remettre la main sur ces reliques. Il sait ce que je pourrai en faire...»
Ambrosius réfléchit à nouveau puis reprend la parole, d'une voix menaçante et un sourire mauvais aux lèvres.
« La méthode subtile ayant échoué, je vais devoir recourir à une méthode plus...directe. Tâchons de nous reposer quelques heures. Nous agirons dans la matinée...».
Il commence alors à se diriger vers les étages, quand Donato intervient.
«Encore une chose, dit l'assassin. Je n'ai pas réussi à tuer Laguerra, mais j'ai surpris une longue conversation. Je n'ai pas tout compris mais je pense qu'elle pourrait peut être vous intéresser...Une histoire de « Princesse de Mû » et de nouveaux artefacts...».
« Ah bon ? » interroge Ambrosius se retournant soudain, un sourcil levé en signe de vif intérêt.
Donato lui relate alors tout ce qu'il a entendu durant la soirée...
Centre de Pattala. Inde. Premières lueurs du jour.
Bien que tout le monde n'ait quasiment pas dormi, tout Pattala est sur le qui-vive...Les gardes courent dans tous les sens, veillant à la sécurité des habitants et organisant les défenses le plus rapidement possible...
« Où sont les artefacts ? » demande Esteban à Tao, Indali et Zia marchant à leurs côtés. Ils sont suivis de Pedro et Sancho, qui n'arrêtent pas de bailler, ainsi que de Naïa et de Nyamita.
Tattia et Baloo, réveillés eux aussi, voient Sancho et Pedro et viennent les embêter quelques instants avant de retourner jouer.
«Zarès cherche à s'emparer des reliques ! ajoute la jeune Inca. Rana'Ori nous a dit que nous en aurions probablement besoin pour contrer la nouvelle menace.
- Ils sont dans l'endroit le plus sûr de Pattala ! leur répond Tao, en faisant un clin d'oeil. Venez ! Je vous y emmène tout de suite... »
Ils traversent la ville d'un pas rapide et se retrouvent au bout de quelques instants au pied de la maison de...Mendoza !
Ce dernier, ainsi que Laguerra, les attendent devant le perron, plusieurs gardes également présents.
Athanaos, Li Shuang, Gunjan et Gaspard sont là aussi, discutant déjà des événements de la nuit.
« Vous allez bien ? » demande Tao au navigateur et à l'ex-espionne. « Un garde nous a signalé qu'on vous avait attaqué cette nuit, ajoute-t-il, inquiet.
- Humpf ! Oui, ça va, merci Tao. », lui répond Isabella, l'épaule appuyée contre un mur. Puis elle poursuit : « ce tueur a raté son coup de peu grâce à l'intervention de mon « hombre » ici présent.
- C'était quelqu'un d'expérimenté, dit Mendoza à l'assistance. Un vrai professionnel...il savait se battre ». Il marque une pause puis reprend : « Tao, l'Ordre du Condor est tout à fait capable de se défendre contre une bande de brigands ou un ennemi ordinaire, mais Zarès n'en est pas un et visiblement, il a au moins un nouvel allié très dangereux...
- Je connais cet assaillant, mi amor, précise Isabella en regardant le navigateur. C'est un assassin qui travaille pour Charles Quint...Ce dernier n'a pas du apprécier ma désertion...
- Ambrosius a du le monter contre toi !» estime Zia, Esteban approuvant sa déduction.
«Mais, dit le Fils du Soleil, nous ne pouvons pas nous attarder ici pour l'arrêter: Rana'Ori a bien insisté sur le fait que la nouvelle menace était urgente et qu'elle concerne le monde entier ! Il nous faut rapidement partir vers Constantinople et trouver les traces de ce Byzas, mentionné dans le parchemin... .
- Constantinople ?? Quelle menace ? » parvient à dire Pedro, qui depuis le début écoutait les amis converser.
« Ou..Ouou...Oui, quelle me..me..menace ? s'inquiète Sancho.
- On vous expliquera tout en route, dit simplement Esteban. Car vous viendrez bien avec nous, vous deux, j'imagine ?
- Si Zarès est dans les parages, oui, on préfère vous suivre. » dit Pedro, son manque de courage prenant le dessus. Sancho approuve également.
« Ah ! Je vous reconnais bien là, vous deux ! dit Mendoza, tout sourire. Entrez tous ! C'est un peu le bazar à l'intérieur, mais nous serons mieux pour discuter ».
Tous entrent dans la demeure et suivant Tao, se rendent dans la chambre à coucher. Puis, Tao soulève le matelas ainsi que quelques planches qui dissimulaient un coffre, similaire à celui dérobé plus tôt par Zarès.
« Excuses-moi, Tao, dit Esteban dubitatif, mais je ne vois franchement pas en quoi cette chambre est l'endroit le mieux gardé de Pattala ! »
« C'est parce que tu ne sais pas, Esteban, quand ils ne sont pas à l'entraînement, combien de temps nos maîtres d'armes y passent ! » répond Tao sur un ton espiègle.
« Oh ! Jeune insolent ! » dit Laguerra, surprise, ce qui n'est pas un mince exploit, les joues soudain un peu rouges, mais un petit sourire aux lèvres.
Le reste de l'assemblée rit un instant, sauf Gaspard, bougon. Puis Tao, nullement intimidé, un index levé posé sur son nez, poursuit:« et quand Mendoza et Laguerra n'y sont pas, des gardes armés patrouillent en permanence...L'endroit est aussi au cœur de la ville et bien éclairé. Difficile de s'y introduire sans se faire repérer.»
- Cela n'a pourtant pas empêché ce tueur d'entrer, dit Laguerra. Mais ce n'était pas non plus n'importe qui...
- Tao » dit Mendoza un peu amusé, lui frottant la tête et lui faisant un petit clin d'oeil. « Ce ne sont pas ces raisons-là que tu avais mises en avant quand tu nous avais demandé, Laguerra et moi, de veiller aux artefacts. Il va falloir que nous discutions de tes manières, jeune homme !
- Ahah ! Oui, excuses-moi, Mendoza ! Toi aussi, Laguerra ! » rit Tao en remettant ses cheveux en ordre, conscient d'avoir peut être un peu poussé les limites...
« Nous devrions partir tout de suite pour Constantinople, dit Esteban : si nous prenons les artefacts, cela fera diversion : ça éloignera Zarès de la ville et il ne l'attaquera pas...
- Tu as raison » dit Laguerra, Mendoza l'approuvant. « Nous venons avec vous, bien sûr ! »
« Mon fils, dit Athanaos se tournant vers Esteban. Je viens aussi avec vous, cette fois ! »
« Mais, Père ! » s'exclame Esteban le regardant et levant les bras au ciel. « C'est sans doute encore un voyage très dangereux et qui va nous mener on ne sait où !
- Je te l'ai dit hier, lui répond le Prophète Voyageur : nous ne nous quitterons plus, désormais. Là où tu iras, j'irai! Je veillerai sur toi et les autres.. Il m'a fallu du temps, trop, pour me préparer à tout cela, mais j'en suis maintenant capable !
- Je viens aussi avec vous ! dit Indali à Tao d'un ton sans appel.
- Mais, Indali, s'inquiète Tao, c'est périlleux !
- Tu te souviens, ajoute-t-elle en le regardant intensément. Avant que vous n'arriviez ici, Esteban, Zia et toi et alors que les adultes n'étaient plus là, j'ai su protéger la ville...Je sais me défendre si besoin ! Et je connais la langue muénne, ce qui pourrait vous être utile.».
Zia approuve et soutient la jeune hindoue en hochant la tête.
« Mais enfin, Indali, je ne veux pas qu'il t'arrive quelque chose... » tente désespérément Tao.
« C'est ma décision ! » lui dit fermement Indali, lui faisant toutefois une bise sur la joue pour le remercier de cette attention. « Et puis, finit-elle taquine, Zia ne va pas partir sans moi ! Elle ne m'a pas encore raconté cette fameuse histoire de son enlèvement par un individu suspect portant un masque d'oiseau ! ».
« Aaaaaaaahh ! s'écrie Tao, dépité et se tirant les cheveux.
« Ahahah ! rit Esteban de bon coeur : Indali est aussi intelligente et obstinée que toi, Tao ! Vous allez bien ensemble ! »
Le jeune Prince cède alors : « Bien, Indali, comme tu voudras...».
« Gunjan, Li Shuang, Gaspard, Nyamita, Naïa, reprend-il : si vous êtes d'accord et que cela ne vous ennuie pas, je préférerai que vous restiez à Pattala et dirigiez l'Ordre en notre absence. Pour veiller à la sécurité de la ville ainsi qu'à celle du Temple... »
Le jeune hindou et Li Shuang acceptent immédiatement. Nyamita et Naïa se font du soucis pour leurs hommes respectifs mais acceptent, ceux-ci les rassurant que tout se passera bien car ils connaissent les aptitudes des enfants. Gaspard, lui, rechigne bien à l'idée de laisser encore Mendoza traîner seul avec Laguerra, mais il reconnaît la gravité de la situation et finit lui aussi par accepter de rester à Pattala.
« Nous serons donc neuf en tout ! dit Esteban à Tao. Le Grand Condor va être bien rempli ! ».
« Oui, lui répond le garçon, nous allons devoir y installer des sièges supplémentaires, prendre quelques bagages, remplir la soute de vivres et de boissons, et y placer aussi le coffre des artefacts, mon livre et le coffret de Rana'Ori. ».
«A ce sujet, Tao, demande Zia, y avait-il d'autres objets dans cette boîte ? »
Le jeune homme acquiesce.
« Oui, j'ai regardé. Je n'ai pas su résister, tu penses bien, répond-il. Il y avait deux bracelets ainsi que deux petites plaques, tous ces éléments étant faits d'orichalque pur...Je les prendrai aussi avec nous même si, pour le moment, je ne vois pas du tout à quoi ça peut servir...Il n'y avait aucune inscription dessus en tous cas. »
Puis, il dit à l'assemblée: « Je laisserai quelques instructions ici à Pattala et ensuite, nous pourrons décoller dès que nous seront prêts... »
Tous tombent d'accord et se séparent le temps d'effectuer rapidement les préparatifs...
Machine Olmèque d'Ambrosius. Région de Pattala. Inde. Fin de matinée.
Après avoir pris quelques heures de repos, Ambrosius finit de revêtir son armure et sa robe, dont il n'a toutefois pas encore réussi à enlever l'espèce de poudre jaune, rappel cuisant de son dernier échec en date...
« Tao me paiera cet affront ! » , se jure-t-il, serrant le poing, « ça et tout le reste ! ».
« Donato, dit-il au tueur, je sors... Je vais en finir avec eux une fois pour toutes et maintenant ! Tant pis pour la subtilité ! Je ne ferai pas dans le détail... Avec ma nouvelle armure, ils n'ont pas la moindre chance et je refuse de perdre davantage de temps... Incroyables tout de même, ces enfants, il faut le reconnaître.» poursuit-il pensant à ce que lui a révélé l'assassin. « Ils ont réussi à empêcher la fin du monde, rien que ça, et cela ne leur suffit pas pour autant! Ils repartent à l'aventure !
- Pardon, Messire ? » dit Donato incrédule et n'ayant pas compris tous les tenants et aboutissants de la conversation espionnée la veille. « La fin du monde ? »
« Je vous raconterai un jour, promet Ambrosius. Quand nous aurons du temps pour cela. J'y vais ! »
Là dessus, il sort de la machine et file à toute vitesse vers Pattala.
Centre de Pattala. Inde. Fin de matinée.
Le Condor est prêt. Esteban s'est mis au poste de pilote, Zia et Tao à ses côtés. Tout a été chargé à bord et les voyageurs, après avoir salué leurs amis restant en ville, finissent de s'y installer. Quand soudain, Pichu s'agite et bat frénétiquement des ailes...
« Danger ! Danger ! Danger ! Zarès ! Zarès ! » babille-t-il.
Les passagers regardent dans la direction indiquée par le volatile et voient au loin, une forme noire bien trop familière, s'approcher à toute vitesse.
« Bon sang ! Il est déjà là ! dit Mendoza. Vite, Esteban, décolles ! »
Esteban acquiesce et tire sur le levier en forme de serpent. Le Condor commence à déplier ses ailes et à prendre son envol.
Voyant cela, Zarès accélère encore davantage et hurle : « Oh ! Non ! Vous ne m'échapperez pas ! »
Les croyant, à tort, déjà hors de portée, Tao ne peut s'empêcher de le narguer : « Ambrosius, j'aime beaucoup la nouvelle couleur de ta robe !»
Zarès, piqué au vif, pousse brusquement les gardes lui barrant la route, arrive en dessous de l'oiseau d'or et effectue un bond prodigieux, dans le but d'en saisir le bec.
Il se rapproche dangereusement des passagers, mais l'Enfant du Soleil connaît déjà les formidables capacités de l'armure de l'alchimiste, dont ils ont déjà fait les frais par le passé.
« Accrochez-vous ! » dit alors Esteban à l'intention de ses amis, qui obtempèrent immédiatement.
Il fait brusquement pivoter l'oiseau d'Or sur sa droite, faisant rater sa cible à l'alchimiste : ce dernier retombe ensuite lourdement sur le sol, mais se relève presque instantanément.
Ce n'est pas fini : Ambrosius ôte alors rapidement sa robe noire, la laissant tomber au sol et révélant l'intégralité de son armure. Celle-ci a été améliorée : il semble y avoir ajouté un étrange appareil fixé sur son dos, qu'il actionne et qui se met à vrombir...
« Vous allez avoir une vilaine surprise, morveux ! » promet-il d'un air mauvais, en regardant le condor et les enfants.
L'alchimiste se met en extension, bras tendus et pointes des doigts posées sur le sol et se prépare à être propulsé vers l'oiseau par son nouveau dispositif.
Malheureusement pour lui, la terre se met soudain à trembler, de plus en plus fort, lui faisant perdre l'équilibre...Il entend alors également des barrissements.
Il se retourne et voit qu'un troupeau entier d'éléphants, tous couverts de toisons dorées arborant des motifs en formes de condors et menés par Gunjan, est en train de le charger !
Ambrosius, distrait et soudain un peu inquiet, n'a pas le temps de se remettre en position et de reprendre le contrôle de son appareil que celui-ci se déclenche, propulsant l'alchimiste aléatoirement de part et d'autre de la ville. L'alchimiste heurte violemment le mur d'une maison, puis d'une autre, heurte le sol, rebondit, puis touche une troisième demeure et encore une quatrième. Son armure le protège grandement, mais il ne peut s'empêcher de pousser quelques grognements et jurons à chaque impact.
Son appareil dorsal souffre également de ces chocs répétés et se retrouve endommagé. Au bout d'un moment, il le propulse à travers la jungle, Zarès disparaissant alors de la vue de tous.
Voyant la menace éloignée, Gunjan stoppe ses pachydermes et lève la tête, disant au revoir de la main aux enfants, qui le félicitent et le saluent en retour.
Puis, Esteban, joyeux, se calant sur son siège, se reconcentrant sur son pilotage et tenant fermement la manette en forme de serpent, dit aux autres : « Ah ! Les amis ! Piloter cet oiseau, cela m'avait manqué ! ». Tao et Zia lui mettent chacun la main sur une épaule et sourient, les autres passagers en faisant autant.
Puis, le Fils du Soleil, penché en avant et d'un air décidé, ajoute : « En avant, Grand Condor !».
Le majestueux condor s'exécute, filant alors vers l'ouest, vers sa destination : Constantinople...
Fin du Chapitre.
Quelles nouvelles aventures et dangers attendent nos amis à Constantinople ? Ambrosius va-t-il renoncer à les poursuivre ? Nos héros trouveront-ils ce « Byzas » mentionné par Rana'Ori ?
Vous le saurez en lisant le prochain chapitre des Mystérieuses Cités d'Or !
Documentaire
« Voilà que Zarès peut voler, maintenant ! s'indigne Pichu. Mais c'est pas juste, il n'a pas à battre des ailes, lui ! .
- En effet, dit la voix off : il utilise ce qui ressemble à un propulseur dorsal, aussi appelé « Jetpack » en anglais. Ce genre d'appareil existe bel et bien à notre époque et se contrôle avec des manettes, même si le fonctionnement est toutefois encore approximatif...Les modèles récents fonctionnent en utilisant de l'eau envoyée sous forte pression, ou bien des turbines...
- des tur quoi ? dit le perroquet.
- des turbines, répète la voix off. Une machine avec des petites ailes qui tournent très rapidement.
- Ah, voilà ! Je me disais bien qu'il devait lui aussi avoir des ailes ! » dit Pichu.
https://fr.wikipedia.org/wiki/R%C3%A9acteur_dorsal
Le Scoop de Pichu
« Oulàlà... » constate Pichu : « les éléphants qui en ont après Zarès ne sont vraiment pas contents !
- Oui, dit la voix off : et avec leurs six tonnes chacun, mieux vaut ne pas être sur leur chemin ! Ces pachydermes qui en temps normal peuvent être sympathiques peuvent, quand ils sont énervés, courir à quarante kilomètres heure ! Peu d'hommes peuvent espérer les distancer à la course, encore moins si celle-ci dure longtemps... Zarès s'en tire plutôt à bon compte... »
http://www.guide-de-survie.com/survivre ... -elephant/
Au revoir, à bientôt !
PS : Merci à Teeger59 pour le nom de la compagne de Sancho !
Chapitre suivant : La Sublime Porte
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