FANFIC : "Au-delà des Mers" - republication

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Anza
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Re: FANFIC : "Au-delà des Mers" - republication

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CHAPITRE 8

Mise au point

Sur le pont, le temps était mi-figue, mi-raisin. Un peu frais même. Un bon petit vent faisait se gonfler les voiles d’orgueil et avancer les deux navires à bonne allure. Quand la belle Inca apparût, elle fut sifflée par quelques matelots admiratifs. Elle ne leur accorda aucun intérêt et ayant repéré l’Olmèque, elle partit directement le rejoindre. Une fois près de lui, elle observa un court silence tandis qu’elle s’accoudait à l’épaisse balustre. Il lui lança un coup d’œil rapide. Elle avait le visage fermé.
-Mendoza se demande s’il peut te faire confiance, fit-elle en guise d’introduction.
Calmèque eut un petit rire ironique.
-Parce que tu crois que moi je ne me le demande pas ?
Elle esquissa un sourire un peu fade.
-Tu peux lui dire, assura l’Olmèque, que je suis basique à ce niveau-là. Si on ne me fait pas de coups tordus, j’en fais pas en retour. Aussi simple que ça.
Elle ne répondit rien de suite et fit mine de plonger son attention sur le large avant de poursuivre.
-Le petit détour par le Comptoir Commercial, nous fera gagner un peu de temps, mais nous atteindrons Barcelone dans un mois tout au plus.
-Je sais.
-Il est vital, et je choisis mes mots avec soin Calmèque, qu’il sache qu’il peut avoir confiance en toi d’ici-là.
Il arqua ses sourcils en signe d’impuissance.
-Je te remercie de ta sollicitude, mais je ne vois pas ce que je peux faire pour changer ce qu’il pense de moi.
Marinchè changea de position et se mis dos à la rambarde du bateau afin de pouvoir s’appuyer sans contraindre son corsage un peu trop serré à son goût. Les vêtements de femmes européennes étaient décidément infiniment plus jolis et raffinés que tout autres mais terriblement moins pratiques. « Sois belle et bouge pas. » Elle regrettait sa robe inca à la fois féminine et facile à vivre.
Non loin d’elle, un marin l’avait prise en ligne de mire ne cachant pas ses lubriques envies et reluquant sa jolie poitrine mise en valeur par le corset. L’Inca s’en amusa. « Les hommes sont tellement manipulables, deux centimètres de chair qui dépassent et on en fait ce qu’on veut… pour un peu il sa baverait dessus… »
Cette réflexion faite, elle se reconcentra sur Calmèque.
-Lâche un peu de mou. Quand il a essayé de te saouler c’était pour tenter d’en savoir un peu plus sur toi. Vraiment Toi ! Pas l’ancien Commandant de Menator, celui-là, tout le monde préfèrerait l’oublier, plaisanta-t-elle. Et ne me prétends pas qu’il n’y a rien à dire. On a tous une histoire. Et…
Elle hésita à lui dire ce qu’elle pensait mais conclut que ce n’était plus le moment de tourner autour du pot.
-Et à en juger par certaine de tes nuits, je dirais que ton histoire n’a pas du être qu’un conte de fées.
Il inclina vers elle une tête où l’on pouvait lire à la fois de la stupéfaction et de la contrariété.
-De quoi « j’me mêle » ? s’offusqua-t-il.
-Tu as tors, ça te rendrait plus humain.
-Ah bon ? Si j’avais eu une vie sans problème je ne serais pas « humain » ? Les horreurs rendent fréquentable ? C’est un concept intéressant. Je retiens !
-Fais ce que tu veux Calmèque, mais y’a un temps pour la pudeur et un temps pour sauver sa peau ! Il ne s’agit pas de lui raconter ta vie mais de te livrer un peu. La seule chose qui permette à deux personnes d’avoir une pleine confiance entre elles, c’est le temps, les années,… et tu n’as pas ce luxe.
Ils se turent l’un et l’autre. Un long moment. Puis Marinchè reprit la parole d’une voix douce.
-La lettre Calmèque. C’est une proposition faite à Mendoza pour qu’il soit le Navigateur d’un navire partant pour l’Angleterre. Une Comtesse de je n’sais quoi qui est copine avec La Reine Catherine d’Aragon et à qui cette dernière offre une nef et un équipage pour qu’elle puisse regagner son pays. Et la Comtesse veut Mendoza et personne d’autre comme Navigateur. Par contre, elle ne veut pas de ta présence, sauf si Mendoza se porte garant. Tu lui fais peur, ajouta-t-elle. Dans sa lette, elle t’appelle « la créature » c’est dire…
Elle le vit du coin de l’œil amorcer un soupir de lassitude.
-Du coup Mendoza a besoin de savoir s’il peut assurer de ta loyauté. Ce ne sera pas une promenade de santé. La route est dangereuse. S’il ne devait pas être certain de pouvoir compter sur toi les yeux fermés, il sera contraint de se débarrasser de toi à Barcelone et là… que ce soit en homme libre ou en esclave, je donne moins de deux semaines à l’Inquisition pour te mettre le grappin dessus… Ces gens-là sont des monstres Calmèque, crois-moi.
Le petit homme soupira longuement. Et les minutes s’étirèrent comme des cirrus. Marinchè continuait de faire « mousser » son crétin de matelot libidineux pour passer le temps.
« Abruti, le pis c’est qu’il croit qu’il peut me plaire… non mais, il s’est regardé le Casanova ? »
Le vent fraichissait et devenait un peu piquant. Calmèque frissonna. Ils avait passé sa veste sans sa chemise, qui trempait en cabine pour essayer d’en ôter les taches de sang et, bras nus, la température devenait inconfortable. Il avait envie de se retrouver seul, aussi profita-t-il de ce prétexte pour clore la conversation et se retirer.
-Je vais rentrer, dit-il. J’ai froid.
Et sur ce, il quitta le pont, l’air un peu abattu et sans un regard pour l’Inca. Elle resta pour sa part encore un moment, pensive, avant de rentrer elle-aussi et de regagner sa propre cabine, plantant-là son andouille de matelot.

Calmèque n’avait pas envie de voir Mendoza, il avait besoin de faire le point, il gagna donc les calles les plus profondes du navire, celles où seule l’obscurité régnait et où personne ne viendrait le chercher.
Le bois de la coque craquait et grinçait sous la pression de l’eau. Ses yeux s’habituèrent très vite au noir ambiant et en peu de temps, il commença à discerner ce qui l’entourait comme s’il n’était que dans la peine-ombre. Il s’assit à même le sol et s’adossa à la paroi du bateau, se laissant bercer par le léger roulis.
« Se livrer… »
« Avoir confiance… »
Elle en avait de bonnes ?!?

Dans la cabine, Mendoza s’était allongé sur sa couchette, une jambe repliée et les mains passées sous sa tête, il regardait le plafond fixement, les pensées perdues bien loin. Quand il croyait avoir pris une décision, elle volait en éclats une heure plus tard. Peut-être qu’il fallait simplement mettre cartes sur table et avoir une solide conversation avec l’Olmèque, tout simplement ?
Le problème qui l’ennuyait le plus était que Calmèque avait tendance à n’en faire qu’à sa tête. Il lui avait dit de ne pas s’occuper de Marinchè, mais il l’avait fait quand-même, et si les choses s’étaient bien terminées, elles auraient pu avoir une issue plus tragique. L’Espagnol serra les dents. Jamais il n’aurait imaginé que Calmèque deviendrait un cas de conscience. C’était un comble. Il en était à peser le pour et le contre afin de lui éviter ce qu’il lui aurait volontiers infligé lui-même cinq ans plus tôt. L’ironie de l’existence…
Il se remémorait le voyage jusqu’à ce jour. Cherchant à décortiquer les réactions, les détails, les expressions, les faits, les dits et les non-dits, les engueulades et les bons moments,… Aurait-il du être plus ferme avec lui depuis le début ? L’avait-il trop laissé prendre ses aises ? Aurait-il pu faire autrement ? Mendoza n’avait pas pour habitude de brimer les gens. Ce n’était pas sa façon de faire. Il aimait acquérir le respect parce que ses actes et ses dires l’imposaient simplement. Forcer le respect était d’après lui une ineptie. On impose la crainte, la peur, la soumission,… mais pas le respect. Or qu’y avait-il de plus important, de plus solide et de plus nécessaire que ça ? C’est là, ses pensées se livrant bataille, qu’il comprit quelque chose de tristement évident : il ne respectait pas Calmèque. Il ne le détestait pas, n’avait même plus vraiment d’animosité à son égard, y’avait prescription, ou presque, mais il ne lui inspirait pas ce sentiment qui lui semblait fondamental. Et cette constatation l’ennuyait… D’un autre côté, il n’avait jamais respecté Sancho et Pedro non plus, et s’était pourtant lancé avec eux dans une des aventures des plus incroyables. Mais ces deux là le craignaient d’une certaine manière, pas vraiment de peur, mais plutôt parce qu’ils savaient que Mendoza leurs était très largement supérieur. Ce qui n’était pas du tout le cas de Calmèque. Tout le problème était là. Calmèque était quelqu’un qui ne lui était pas « inférieur », ce n’était pas quelqu’un qu’on pouvait dominer intellectuellement. Soit ils acceptaient tous les deux de former une équipe, soit… pas.
Et le voilà qu’il revenait à son point de départ : impossible d’envisager un après avec l’Olmèque sans un respect et une confiance mutuels qui les amèneraient tous les deux à pouvoir faire route ensemble.
« Pffffffffffff… »


Quand le petit homme réapparut, il était tard et la nuit était tombée depuis longtemps. Il s’était attendu à ce que Mendoza soit « de sortie » ou endormi, mais il n’en était rien. Et Calmèque fut surpris de le trouver attablé, les bras croisés, attendant vraisemblablement qu’il rentre.
-Faut qu’on parle, lâcha froidement Le Navigateur.
Le petit Olmèque avait les yeux fatigués et il sembla à l’Espagnol qu’ils étaient plus clairs que d’habitude. Qu’importe.
-OK, fit platement l’autre, sans émotion apparente.
Mendoza semblait ressasser son humeur maussade depuis des heures et il n’était pas à prendre avec des pincettes. Calmèque le contourna et s’assit sur son lit, lasse. Ses propres réflexions l’avaient emmené bien plus loin qu’il ne l’aurait voulu, remuant de vieux souvenirs douloureux.
-Premièrement, attaqua l’Espagnol, quand je te donne un ordre, je veux que tu le suives ! Je t’avais dit de ne pas t’occuper de Marinchè et tu l’as fait malgré mon interdiction.
Calmèque ne s’était pas attendu à une engueulade en bonne et due forme et ce reproche le réveilla d’un coup. Même s’il était très éprouvé, il n’avait pas l’intention de se laisser marcher dessus.
-J’aurais du la laisser crever sous nos pieds ? répondit-il d’un ton coupant.
-Oh ça va ! s’énerva l’Espagnol. T’es responsable de la mort de centaines de personnes tant Mayas qu’Olmèques, alors me la joue pas genre « je me rachète une conscience » !
Les yeux de Calmèque s’écarquillèrent, visiblement offusqué.
-Je suis responsable ? Je ? Moi ? En mode « tout seul » ? Y’avait personne d’autre d’impliqué ? Je suis le Grand Méchant de l’histoire pour vous ? Sérieux ?
-Et tu nies en plus ?
-Mais je ne nie pas mon implication, s’emporta l’Olmèque, mais de là à me mettre tout sur le dos, c’est peut-être un peu facile, non ?
-Aie le courage de tes actes, Calmèque, siffla Le Navigateur, l’air mauvais.
-Ok ! D’accord ! lâcha brusquement l’Olmèque dans une colère mal contenue. J’ai commis des erreurs ! Et ces erreurs ont anéanti mon peuple ! Vous croyez qu’on se sent comment avec autant de sang sur les mains ?
Mendoza ne répondit pas, il serrait les dents, et ne quittait son Olmèque des yeux, l’atmosphère était électrique.
-Et si un jour un autre cas « Marinchè » débarque, poursuivit l’Olmèque en montant le ton, je referais la même chose ! Vos directives je m’en torche ! Parce que plus jamais de ma vie je ne suivrai un ordre sans réfléchir ! Jamais, vous m’entendez ?
-T’y arrivais pourtant bien avec Menator ! invectiva sèchement Mendoza.
-Ben justement ! rétorqua Calmèque. Et vous n’imaginez pas le nombre de fois que j’ai ressassé les événements dans ma tête en me disant : t’aurais dû t’écouter Cal, ta conscience te hurlait que tout partait en couilles, t’aurais pu arrêter cette escalade, si seulement… mais t’a continué à jouer les bons petits soldats, à suivre les ordres sans discuter, comme un pauvre abruti ! Et ça me bouffe tous les jours ! cria-t-il. Merde !
Et dans un mouvement de rage, Calmèque se saisit de la table de la cabine d’une main et l’envoya valser contre le mur. Le souffle court.
Les deux hommes se foudroyaient du regard.
-Tu te sens mieux ? persifla Mendoza qui n’avait pas esquissé un mouvement tandis que la table s’était envolée pour s’écraser conte la cloison de bois et que tout ce qui se trouvait dessus était tombé au sol dans un énorme fracas.
Calmèque garda le silence un moment, rongé par un profond ressentiment, il en voulait à l’Espagnol de le juger sans savoir, alors qu’il avait passé des années à se débattre avec sa conscience. Il s’était bien assez torturé tout seul, il n’avais pas besoin que Mendoza en remette une couche !
-Vous jouez les vertueux, finit-il par lâcher plus calmement, avec ironie, qui regarde la scène de haut, mais vous ne savez rien, Mendoza, rien du tout, et quoi que vous en pensiez, vos considérations sont très loin de la réalité.
-Mais éclaire-moi, Calmèque, nargua l’Espagnol, éclaire-moi ! C’est quoi cette réalité dont je suis si loin ?
A ces mots, lentement, le petit homme aux cheveux blancs changea d’expression, la colère céda la place à un sentiment plus lourd : le dépit, et il secoua la tête négativement, vaincu, puis s’assit sur sa couche, le dos courbé. L’ire était retombée, et il se sentait vide. A quoi bon ? Cet Espagnol le prenait pour un monstre, il avait fait son procès et l’avais jugé coupable sans même lui permettre de se défendre. Il aurait pu dire n’importe quoi, Mendoza ne l’aurait jamais cru.
Alors il se tut.
Mendoza, quant à lui, assis sur sa chaise, à l’autre bout de la petite pièce, scrutait son interlocuteur devenu muet. Et à nouveau ce malaise s’insinuait, parasitant ses aprioris. S’il devait garder quelques chose de cet échange houleux, c’était que l’Olmèque semblait très sincèrement regretter ce qui s’était passé. Evidement, encore une fois, on pouvait tout imaginer, qu’il mentait et se moquait du Navigateur, mais si c’était le cas, cet homme était un comédien exceptionnel. Mendoza avait pour habitude de se fier à son instinct, et ce dernier lui soufflait que cette dispute était une étape seine, peut-être la première, dans sa relation avec Calmèque. Et qu’il lui ait objecté que sa désobéissance venait du fait qu’il ne laisserait plus jamais un ordre supplanter sa conscience afin de ne plus commettre les erreurs du passé, voilà qui éclairait la personnalité de l’Olmèque sous une lueur nouvelle, un lueur que Mendoza jugeait tout à fait respectable. Et ça lui arracha un petit sourire de satisfaction.
Du coin de l’œil, il vit Calmèque s’allonger, la mine grave, abattu par la fatigue et les émotions. Et Mendoza se dit qu’il devrait en faire autant. Il était épuisé lui aussi. La nuit précédente fut courte.
Il ôta donc ses bottes, sa cape, le haut de ses vêtements pour ne conserver que son pantalon, un dernier regard indéfinissable à son compagnon de voyage qui lui avait tourné le dos et Mendoza sa coucha à son tour après avoir soufflé la flamme vacillante de la lampe tempête.
Une fois couché, il se sentit étrangement plus léger, déchargé de la sensation négative qui le hantait depuis des semaines et il laissa son esprit repartir cinq ans plus tôt. Il fallait reconnaître qu’il se sentait moins concerné émotionnellement par cette période que Calmèque. Pour lui, c’était juste un épisode riche en rebondissements dans son aventure avec les enfants. Pour sa part, s’il avait été triste par empathie pour Estéban et Zia quand ils perdirent leurs pères, il n’avait pas vraiment eu à subir de douleur propre. Il y eut des batailles, des tristesses, de regrettables pertes, des douleurs, des victoires et des joies,… rien qu’il n’avait déjà vécu au moins dix fois par le passé. Et puis, s’impliquer émotionnellement le moins possible en toutes circonstances était devenu son mot d’ordre depuis bien longtemps. Ca restait le meilleur moyen pour se préserver de la vie et de ses coups bas.
Et il s’endormit.
Modifié en dernier par Anza le 08 juin 2021, 11:48, modifié 1 fois.
8) Fane absolue de la 1ère saison, certes imparfaite, mais avec tant de qualités qu'on peut lui passer beaucoup de choses !
Perso préféré : Calmèque, cherchez pas, mon psy a jeté l'éponge ! MDR

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CHAPITRE 9

Cinquante-trois ans plus tôt

La lumière blanche devenait fatigante pour les yeux, et le scientifique ne cessait de les plisser fortement pour contrecarrer ses envies de repos. Il passait du microscope à ses notes, remplissant des colonnes et des colonnes de chiffres, inlassablement. Il s’interrompit un instant, le stylo suspendu dans les airs. Les résultats étaient démoralisants et ils devraient rendre des comptes le lendemain auprès du Sénat.
Dans son dos, le scientifique entendit des bruits de pas. Son frère, certainement. Étonnant qu’il ne soit pas couché à cette heure.
-Kié ! fit une voix un peu nasale. Qu’est-ce que tu fous encore à bosser à cette heure ?
-Je termine les relevés des derniers essais infructueux. J’essaye de voir si…
-Tu es stupide ! l’interrompit l’autre. Ca fait 20 ans qu’on travaille là-dessus, une nuit de plus n’y changera plus rien ! C’est un échec, il nous faut l’accepter !
Loumen pouvait être d’une froideur terrible et Kiémen tressaillit en entendant le mot « échec ». C’était la première fois que son frère prononçait ce mot. Coupant comme une lame. Implacable. Vingt ans de travail résumé en deux minables syllabes… « E-CHEC »…
Kiémen baissa la tête, en proie à une profonde tristesse et son frère ainé le considéra avec mépris.
-Va te coucher, ordonna-t-il. Le plus important est d’avoir l’esprit clair pour notre rapport de demain. Si nos génomes sont trop éloignés, ce n’est pas de notre faute !


Il était dix heures du matin. La nuit avait été courte et peu reposante.
Kiémen et Loumen pénétrèrent chargés de leurs dossiers dans l’imposant hémicycle du Sénat. Le silence était terriblement pesant et tous les regards convergèrent dans leur direction. C’est Loumen qui prendrait principalement la parole, il était infiniment plus doué pour ça que son cadet. Mais pour l’heure, l’estrade était occupée par un Atlante du Haut-Conseil, Yorann. Un homme que les deux frères ne portaient pas dans leur cœur. Farouchement opposé à leurs travaux depuis le début, Yorann n’avait cessé de tenter de faire suspendre leurs subsides, trouvant répugnante l’idée de « métisser » leur race à celle des Hivians.
-Ces travaux sont une honte pour notre peuple ! invectiva-t-il à l’encontre des membres du Sénat. Nous ne pouvons tolérer plus longtemps qu’une telle insulte soit cautionnée.
Une rumeur parcouru l’assemblée. L’opinion était divisée. Yorann faisait partie d’une « vieille garde » d’Atlantes fières de leurs origines ethniques et horrifiés à l’idée de la salir. Des Ariens avant l’heure en somme. Le problème était que cette poignée de vieux bornés faisait partie du Haut-Conseil et gardait donc une influence importante au sein de leur société. Kiémen soupira à l’idée de ce qui les attendait.
Quelques minutes plus tard, tandis que Yorann avait fini son discours de propagande, un autre Atlante monta sur l’estrade et s’adressa à ses pairs.
-Messieurs, l’opinion de notre Éminent Membre Yorann ne manquera pas, j’en suis sûr, de peser dans la balance le moment venu. Mais pour l’heure, je vous prie d’accueillir les frères Men-Ator, respectables scientifiques de notre Communauté, que vous connaissez tous, et qui vont nous éclairer sur l’avancé de leurs travaux.
Et joignant le geste à la parole, l’Atlante se tourna vers les deux frères, les invitant à prendre place sur l’estrade. Les deux scientifiques échangèrent un regard pour se donner du courage avant de s’avancer. Loumen prit la parole après avoir compulsé ses notes un court instant.
-Messieurs, nous sommes honorés de cette audience et de l’intérêt que vous portez à nos recherches, commença-t-il. Mandatés il y a près de vingt ans maintenant par le Haut-Conseil, il nous avait été demandé de voir si un quelconque bénéfice pouvait être tiré d’un métissage complet ou partiel entre notre race et celle des Hivians.
Loumen prit une profonde inspiration.
-Mon frère, généticien, et moi-même, biochimiste, avons conjugué nos efforts pendant de nombreuses années afin de tirer un éventuel profit génétique de cette association. Mais force est de constater que nos deux races sont aujourd’hui pratiquement devenues deux espèces distinctes, ce qui rend le métissage pratiquement impossible. La mutation génétique dont notre peuple a fait l’objet nous a trop éloignés des Hivians restés en surface.
A quelques mètres de là, Yorann affichait un sourire conquérant.
-Néanmoins, comme vous le savez certainement, ce constat établi, nous avons concentré nos efforts, sur des possibilités d’hybridation et de chimérisme. Afin de voir si un développement cellulaire était possible jusqu’à un certain stade afin de pouvoir extraire des cellules-souches d’embryons et de pouvoir s’en servir afin de corriger la déficience génétique dont est frappée notre peuple et espérer ainsi voir à nouveau des naissances féminines.
Il y avait quelque chose « d’épais » dans l’atmosphère de l’hémicycle. Le moment était d’importance et chacun retenait sa respiration, la survie de leur peuple dépendait de naissance double X. Les réserves d’ovocytes faites 350 ans plus tôt s’amenuisaient et les tentatives de clonage de ces cellules reproductrices avaient été de douloureux échecs. Sans parler des problèmes de consanguinité que ça aurait fini par créer. Trouver une alternative était donc devenu la priorité absolue.
Loumen se tut. Ce qu’il avait à annoncer allait réduire vingt ans d’espoir à néant. Mais d’une certaine façon, ce serait un soulagement pour lui et son frère, ne plus avoir cette pression sur les épaules. Ce n’était pas un manque de compétences qui les avait amenés à échouer, mais la nature même de leur espèce. Leur mutation était plus profonde qu’il n’y paraissait.
Le scientifique se racla discrètement la gorge avant de poursuivre.
-Malheureusement, si dans un premier temps les résultats furent encourageants, il s’avère qu’aucun hybride n’a survécu à plus de 3 semaines de mitose cellulaire… stade auquel aucune cellule n’est encore exploitable.
Silence.
-Nous avons tout tenté, mais à chaque fois nous rencontrions de nouveaux obstacles rendant l’hybridation ou le chimérisme impossible. Il semble donc aujourd’hui grandement improbable d’obtenir des résultats en s’obstinant dans cette direction.
Kiémen n’osait pas lever les yeux, il se sentait scruté de la tête aux pieds, il supportait mal la situation et devinait la jubilation qui devait se lire sur le visage de ce détestable Yorann.
Le biochimiste ne disait plus rien, il se contentait de tourner quelques pages de ses notes sans vraiment les lire, pour se donner de la contenance. Il n’avait plus rien à ajouter et il espérait que le Président du Sénat reprendrait vite sa place sur l’estrade afin de les délivrer. Dans l’assemblée, les visages étaient sombres, beaucoup d’Atlantes avaient foi en la découverte d’une solution scientifiques à leur problème d’extinction et cette nouvelle, si elle ne sonnait pas le glas, réduisait quand-même de beaucoup leur champ d’actions futures.
Le Président du Sénat, un peu sonné, finit par réagir et à regagner l’estrade de l’hémicycle, permettant aux deux frères de se retirer.
D’interminables discours des uns et des autres allaient suivre dans l’indifférence absolue des deux scientifiques. La politique était bien loin de leur préoccupation. Ils n’avaient qu’une envie, rentrer chez eux et se reposer. Il fallait qu’ils digèrent ces dernières années. Sans compter qu’ils se retrouvaient à présent sans labo, sans subside et sans plus aucun projet de recherche officiel. Une vraie galère en perspective. Kiémen avait bien envie de se consacrer à quelques recherches qui lui tenaient à cœur depuis longtemps, mais ça ne paierait pas les créances et le quotidien.
« Misère… »
Tandis qu’ils sortaient, un peu abattus, de l’enceinte du bâtiment sénatorial pour regagner les rues de Sitnalta, Loumen et son frère furent abordés par un Atlante qu’ils ne connaissaient que de vue. Un Diplomate du Haut-Conseil qui ne leur avait jamais été présenté. L’homme était de grande taille et assez jeune, la trentaine tout au plus. Il affichait un sourire commercial et il avait un timbre de voix qui donnait envie de l’écouter. Un futur « Grand ».
-Messieurs, fit-il en tendant la main à Loumen qu’il savait être le meneur des deux scientifiques. Je me nomme Prenntiz et moi et mes amis aimerions vous entretenir d’un projet.
Une expression de surprise se peignit sur les visages des deux intéressés.
-A quel propos ? s’enquit Kiémen.
-Je ne peux vous en dire d’avantage ici, mais si vous voulez bien me suivre… fit-il en leur montrant un véhicule stationné à quelques mètres.
Il n’en fallait pas plus pour éveiller la curiosité de nos deux frères et le trio échangea quelques regards accommodants avant de monter ensemble dans le véhicule aux armoiries d’une vieille famille atlante, les « Tiz-Altis ».
Ils gagnèrent une riche propriété en dehors de la ville souterraine. Les propriétés en surface étaient rares et nécessitaient d’avoir énormément d’argent et d’influence. Aussi le manoir des Tiz-Altis dominait une vaste plaine entourée d’un bois, le tout excessivement bien gardé, ce qui dissuadait d’éventuels visiteurs. Les Atlantes vivants en surface se fondaient dans le décor autant que possible et utilisaient les croyances locales sur les elfes, gobelins et autres créatures mythologiques pour éloigner les importuns. Leur technologie faisait le reste, semant la peur dans des esprits au savoir encore trop primitif.
Ils pénétrèrent dans une demeure aux proportions hors-normes et les deux frères impressionnés essayèrent de cacher leur émoi. Sans être d’origine médiocre, la famille des Men-Ator était loin d’être aussi riche et prestigieuse. Prenntiz les devançait et marchait à bonne allure dans les longs couloirs du manoir familiale. Ils obliquèrent deux fois avant de parvenir à une pièce des plus accueillantes où crépitait un feu de bois. Trois Atlantes d’âges respectables étaient confortablement installés dans deux canapés placés en vis-à-vis. A leur entrée, les trois hommes se levèrent avec politesse et hochèrent la tête en guise de salut. Prenntiz et ses deux invités leur rendirent leurs bonnes grâces en silence avant de s’installer à leur tour et ils s’assirent tous les six.
Un domestique vint s’enquérir d’éventuelles envies auprès des nouveaux venus, mais Prenntiz commanda du thé sans autre forme de procès et fit comprendre sans animosité au domestique qu’il ne fallait plus les déranger jusqu’à nouvel ordre. L’homme apporta dans la foulée un plateau où fumait une théière et le service fut rapide. Les deux frères remercièrent leur hôte. Le domestique se retira. L’entrevue pouvait commencer.
L’un des hommes déjà présent à leur arrivée prit la parole en premier.
-Nous sommes enchantés de faire votre connaissance à tous les deux. Votre réputation dans le milieu scientifique est sans égal. Je suis Haltiz, l’oncle de Prenntiz dont vous avez déjà fait la connaissance. Nous siégeons tous au Haut-Conseil et voici nos vénérables confrères et amis Kentrig et Souyam.
Hochements de têtes.
Les noms de Kentrig et Souyam éveillèrent l’intérêt des deux frères. En effet, ces deux personnages étaient certainement deux des membres les plus influents du Haut-Conseil et leur présence en ces lieux laissait entrevoir l’importance de la réunion.
-Tous ça semble bien « confidentiel », amorça Loumen.
-Et de fait, acquiesça Kentrig avec un petit sourire au coin des lèvres.
Muni d’une télécommande, Prenntiz actionna un pan de mur qui se leva et parti se perdre dans le plafond, révélant un grand écran blanc. Et de suite, une série d’images apparurent. Des plans, des installations énergétiques, des photos, des graphiques, des laboratoires, un cristal, une montagne,…
-« Apuchi », fit Prenntiz. Une vieille base délaissée il y a près de mille ans par nos ancêtres sur le nouveau continent. Ca fait des mois que, dans le plus grand secret, nous avons, avec l’accord des plus éminents membres du Haut-Conseil, financé et envoyé des équipes d’ingénieurs et d’ouvriers pour remettre ces installations en état.
Kiémen et Loumen était surpris de voir à quel point des choses pouvaient se manigancer impliquant autant de monde sans que personne n’en n’ait vent.
« L’argent peut avoir un pouvoir terriblement occultant. »
-Vous n’êtes pas sans savoir que des factions dissidentes et terroristes menacent chaque jour d’avantage la sécurité des Élus. Nous avons donc décidé de faire d’une pierre deux coups, expliqua Kentrig, le plus âgé d’entre eux. Nous voulons envoyer les Élus en sécurité à Apuchi, loin des conflits que connait Sitnalta. Il y a là-bas tout le nécessaire pour le maintient de leur stase mais aussi des installations scientifiques de premier ordre.
Il s’interrompit un instant afin de bien se faire comprendre.
-Et nous aimerions que ce soit vous qui preniez les rennes de cette base excentrée. Vous auriez tout le budget nécessaire et les coudées complètement libres pour vos travaux.
-Mais…, argua Kiémen d’un ton contrit. Nos travaux se sont soldés par une impasse. Tout l’argent et les moyens du monde n’y changeront rien.
-Nous savons ça, rassura Souyam. Mais ce n’est pas sur l’hybridation que nous voulons que vous orientiez vos recherche, mais sur la possibilité d’arriver à « retarder le vieillissement » ou peut-être même… l’enrailler…
-L’immortalité ? fit Kiémen, incrédule. Mais c’est impossible !
-Un rapport de votre frère, et l’homme qui parlait à présent venait de visser son regard dans ceux de Loumen, nous laisse entendre le contraire.
Kiémen se tourna vers son frère ainé, quémandant une explication.
-J’ai effectivement émit quelques théories à ce sujet lors d’une thèse, mais ce n’était que des théories, se défendit Loumen.
-Théories pourtant pour le moins pertinentes ! assura Haltiz. Nous les avons étudiées et nous pensons que ce n’est pas aussi farfelu que ça.
-Lou ? Tu m’expliques là ? s’impatienta doucement Kiémen.
-C’est grotesque, poursuivit le biochimiste sans prêter une seconde attention à son frère. Mes théories se basaient sur le fait qu’on serait en mesure de récupérer de l’ADN et des cellules d’Origine. Or ça fait bien longtemps que nous n’en avons plus !
-Effectivement, renchérit Kentrig, mais vous aurez accès à de l’ADN atlante dont la mutation s’est interrompue il y a plus de 400 ans… et certains enfants Hivians peuvent fournir un matériel génétique de substitution s’ils sont compatibles, n’est-ce pas ?
Kiémen et son frère restèrent interdits l’un comme l’autre durant un temps indéfinissable avant de réagir.
-Vous voulez dire qu’on pourra utiliser l’ADN et les cellules des Élus ? demanda Loumen, les yeux brillants.
-Vous pourrez les découper en morceaux et les passer à la centrifugeuse si c’est nécessaire, assura Souyam.
-Aujourd’hui nous n’avons plus le loisir de faire dans la parcimonie, argua Prenntiz. La fin justifiera les moyens. Nous sommes certains que vous êtes ceux qu’il nous faut.
-Vous serez secondé par l’équipe de votre choix. Dites un nom et il sera des vôtres, déclara Kentrig d’une voix ne laissant aucune place au doute.
Loumen n’en croyait pas ses oreilles et trouvait que cette journée qui avait bien mal commencée prenait une tournure radicalement opposée.
-Mais, osa timidement le généticien. Si nous avons accès à l’ADN des Élus, nos travaux sur l’hybridation est à envisager sous un nouveau jour. Ce qui nous rend incompatibles aujourd’hui avec les Hivians, n’était peut-être pas encore présent avec 400 ans de mutation en moins.
Haltiz resté le plus silencieux jusqu’ici, prit la parole.
-Le métissage, l’hybridation ou le chimérisme ne sont plus à l’ordre du jour, sauf s’ils rentrent en ligne de compte pour votre nouvel objectif. Comme vous le savez, bon nombre d’Atlantes sont réfractaires au fait de nous « mélanger » avec les Hivians. Déjà les cas d’Impurs nés au cours de notre histoire, quand nos ADN étaient encore compatibles, ont toujours été très mal vus, ça ne date pas d’hier. Le fait que cette direction ait échoué en réjouit plus d’un et… pour être tout à fait francs, nous aussi.
Voilà qui avait le mérite d’être clair, soupira intérieurement le généticien.
Modifié en dernier par Anza le 08 juin 2021, 11:49, modifié 1 fois.
8) Fane absolue de la 1ère saison, certes imparfaite, mais avec tant de qualités qu'on peut lui passer beaucoup de choses !
Perso préféré : Calmèque, cherchez pas, mon psy a jeté l'éponge ! MDR

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Re: FANFIC : "Au-delà des Mers" - republication

Message par Anza »

CHAPITRE 10

Fiddle

La jolie rousse faisait pleurer son instrument mélancoliquement depuis plus d’une demi-heure en s’abîmant dans la contemplation du soleil couchant. Pour des raisons sans doute pratiques, elle avait préféré délaisser robes et dentelles pour revêtir une tenue beaucoup moins féminine. Elle arborait à présent une sorte de très longue chemise blanche resserrée à la taille par une étoffe simplement nouée, le tout sur un pantalon trois quart de couleur marron qui laissait entrevoir une partie de ses mollets, ce qui, pour l’époque, était très inconvenant pour une femme. Mais ce détail semblait bien loin de ses considérations. Elle paraissait évoluer dans un autre monde, quelque part, loin…, au-delà des frontières connues, au-delà de ce que les yeux pouvaient voir.
Elle ? Elle jouait et rien d’autre n’existait, installée à califourchon sur le bastingage de proue, laissant aux autres la peur qu’elle ne tombe.
Quelques passagers prenaient plaisir à l’écouter en silence sur fond de ciel pourpre en savourant la fraîcheur de cette fin de journée. Ces deux derniers jours avaient été particulièrement chauds.
Calmèque était là, depuis presque le début de ce concert improvisé, assis contre le mât de misaine. Il aimait l’écouter. Il avait découvert la sonorité de cet instrument le soir de leur « rencontre » avec les pirates et il avait trouvé celle-ci unique, en rien comparable avec les instruments qu’il connaissait. Il en aimait la texture, le délié et les grandes différences de variations possibles. Certaines notes lui semblaient « vivantes ». Il avait toujours été très sensible à la musique, comme si c’était une langue qu’il comprenait naturellement. Comme une évidence. Mais de là d’où il venait, il n’y avait pas place pour ces « futilités ».
Il était tellement absorbé par le jeu de la jeune femme qu’il n’entendit pas arriver Marinchè. Et quand il s’aperçu de sa présence, elle s’asseyait déjà à ses côtés. Elle se pencha à son oreille avec un petit sourire malicieux.
– Tu as bons goûts, elle est très jolie…
Il lui rendit son sourire.
– Ce n’est pas la fille qui m’intéresse, c’est sa musique.
– C’est évident…, fit l’Inca peu convaincue.
Elle regarda autour d’elle et il lui vint une idée.
– Combien y-a-t-il de personnes sur ce pont, Calmèque ?
L’Olmèque savait toujours avec précision ce qui l’entourait, déformation professionnelle sans doute, c’était instinctif en tous cas, et Marinchè avait eu l’occasion de s’en rendre compte à plusieurs reprises. Et c’est sans lui accorder plus d’attention qu’il lui répondit platement qu’ils étaient 14.
– Armés ? demanda encore la belle brune.
« Où veut-elle en venir ? »
– Certains, oui, souffla-t-il.
Et afin de clore le sujet au plus vite, Calmèque se lança dans une courte et rapide énumération des différentes armes et propriétaires qui se trouvaient sur le pont.
– Contente ?
Marinchè en fut très impressionnée et fit la moue. Mais son petit air malicieux ne l’avait pas quitté.
– Et… ? renchérit-elle. Ta couleur préférée ?
– Quoi ?
– Réponds, sans réfléchir !
– C’est quoi ce traquenard ? fit-il méfiant. T’as pas envie de te trouver une autre victime pour tes séances de psychanalyse ?
– Mais aller ! Insista-t-elle. C’est juste une couleur !
Convaincu qu’elle était certaine de pouvoir tirer des conclusions fumeuses grâce à cette information, Calmèque préféra lui mentir.
« On ne sait jamais… »
Et c’est sur la défensive qu’il articula :
– Kaki.
– Le kaki ? s’étonna Marinchè.
– Oui, c’est une couleur qui va avec tout, affirma-t-il.
En réalité, le kaki était une couleur qu’il avait en horreur, il trouvait que c’était une teinte sale, un truc mal défini, une tache de peinture faite par erreur sur un nuancier à la faveur de mélanges accidentels, si ça n’avait tenu qu’à lui, le kaki aurait été banni du spectre visuel humain !
– Très bien, fit l’Inca, tu veux pas jouer le jeu, c’est dommage. Ceci dit, le fait que tu aies peur de me dévoiler quelque chose sur base d’une réponse aussi anodine est bien la preuve que tu caches un truc.
– A moins que ce ne soit juste l’envie de couper court à cette conversation à la fois débile et inquisitrice.
– Je finirai par en avoir le cœur net, Calmèque, crois-moi !
Agacé, l’Olmèque obliqua son visage dans sa direction.
– Trouve-toi une mouette et étouffe-toi avec !
Au même moment, l’Espagnol parut sur le pont, et ce fut pour partir rejoindre Diaz qui tenait la barre. Le Comptoir Commercial serait en vue dans la matinée si le vent ne faiblissait pas. Les deux hommes échangèrent un moment, les yeux rivés sur une carte entre les mains du Navigateur. Le Comptoir, répondant au nom de Lizoa, était une propriété portugaise d’assez bonne réputation, il n’empêche, ces lieux étaient toujours le repaire de nombreux bandits et escrocs en tous genres, il conviendrait de rester vigilants. Toujours à quelques coudées de La Myrta, Le Nazaré fendait les flots avec Jiménez aux commandes. La caravelle avait fière allure avec son bois sombre et ses voiles latines gigantesque en partie affalées. Taillée pour la vitesse, la belle était un régal pour les yeux et Mendoza ne se lassait pas de la contempler.
« Presque aussi belle qu’une femme »
Et c’est les yeux accrochés à la caravelle, perdu dans ses pensées, qu’il quitta Diaz pour rejoindre ses deux acolytes à l’avant de la nef.
Toujours la carte enroulée à la main, il s’assit à son tour.
– On est mélomane ? lança-t-il.
Marinchè voulu répondre quelques chose mais ses mots s’évanouirent à la lisière de ses lèvres, coupée par Calmèque qui fut plus rapide.
– Oui et « on » aimerait pourvoir écouter…
Mendoza lança un regard médusé à l’Inca qui se contenta d’hausser les sourcils. Le silence fut donc observé un certain temps, ce qui permit à Mendoza de prendre plaisir, lui aussi, à cette musique.
Il avait appris à jouer de la « guitarra latina » quand il était enfant, parce que savoir jouer d’un instrument quand on est de bonne famille, était dans les mœurs, et puis sa mère y tenait. Mais il devait avouer ne pas être particulièrement doué. Son professeur ne cessait de lui seriner qu’il avait un épouvantable sens du rythme.
La douleur de ses petits doigts meurtris par les cordes lui revint en mémoire et une grimace tordit ses lèvres un court instant.
« Définitivement plus agréable à écouter qu’à faire. »
Des souvenirs de sa mère accompagnèrent cette irruption dans sa mémoire. Il la revoyait toujours souriante. C’était une femme d’une grande douceur et d’une intelligence remarquable que lui et son père chérissaient tendrement. Mendoza n’avait que 11 ans quand elle mourut des suites d’une affection respiratoire qui la cloua au lit de nombreuses semaines. Elle avait fini ses jours à cracher du sang et à délirer sous l’effet de la fièvre. Mais même en ces moments sombres, quand elle était consciente, elle avait toujours sur le visage cette expression de douceur et de sagesse infinie. Elle l’avait rassuré dans les derniers instants, tandis qu’il pleurait à son chevet, lui avait serré les mains, caressé le visage et prodigué d’ultimes recommandations avant de lui dire adieu et de fermer ses beau yeux d’ébène pour la dernière fois. L’enfant qu’il était alors avait senti que quelque chose était mort en lui ce jour-là, quelque chose de profond.
L’Espagnol refit surface tandis que la musicienne venait de s’interrompre. Son jeu s’était arrêté brusquement, en plein milieu d’un mouvement, sans raison apparentes. Elle avait suspendu ses notes comme on suspend le fil de ses idées. Sans un mot, sans un regard, indifférente à son public, elle semblait ne plus vouloir reprendre. Le vent venait faire voler les boucles de sa chevelure de cuivre et au loin l’horizon finissait de perdre ses couleurs.
Calmèque se leva et ses deux compagnons lui lancèrent un regard un peu surpris.
Il partait ?
En fait, il était hors de question de s’éterniser, sans quoi cette emmerdeuse de Marinchè ne manquerait pas de lui faire remarquer qu’il restait malgré que la belle Irlandaise ait arrêté de jouer, avec toute la lourdeur des sous-entendus que ça impliquait. Et ça, il s’en passait.
– Je vais m’allonger un peu, argüa-t-il.
Quand Marinchè et Mendoza furent seuls, l’Inca se pencha vers son voisin.
– J’ai un doute à son propos, je jurerais qu’il en pince pour la violoniste mais… le kaki, ça t’inspire quoi ?
Mendoza, étrangement peu surpris par la question, haussa les épaules en faisant la moue.
– Des fientes d’oiseaux, répondit-il.
Marinchè, qui n’y avait pas songé, en fut visiblement surprise.
– Et on revient à la mouette… intéressant… dit-elle pour elle-même.
Puis après une courte réflexion, elle s’adressa à nouveau au marin.
– Tu crois qu’il est homo ?
Le marin resta perplexe.
– Quel rapport avec la mouette ?
– Je sais pas encore, répondit l’Indienne. Mais et donc ? T’en pense quoi ? Homo ou pas ?
Mendoza eut un petit rire franc.
– Pourquoi ? Parce qu’il n’a pas encore essayé de te sauter ?
Elle le gratifia d’une petite tape sur le bras, en réprimande.
– C’que tu peux être cru des fois !
– Ca ne te dérangeait pas trop à une époque…
Marinchè offrit une mine faussement agacée au Navigateur.
– Nostalgique ?
– Peut-être…


Une bonne heure plus tard, Le Navigateur était parti manger avec le Capitaine Diaz, ils devaient discuter des modalités de leurs transactions du lendemain à Lizoa, surtout concernant la caravelle.
Marinchè en profita pour aller tarabiscoter son Olmèque. Quand elle avait une idée en tête…
On frappa à la porte. Les coups sortirent Calmèque de sa rêverie.
– Oui ?
– C’est moi, fit Marinchè.
– C’est ouvert.
L’Inca se glissa dans la cabine et découvrit l’autre plongé dans le noir, allongé sur sa couchette.
– Ca va pas ? s’inquiéta-t-elle.
– Si si, rassura-t-il. Juste envie de calme.
– Ca veut dire que je tombe mal ?
– Non non. Tu peux allumer la lampe si tu veux. J’imagine que tu n’y vois pas grand-chose.
La flamme prit rapidement et une douce lueur vint combler l’espace.
– Tu vois bien dans le noir ? interrogea l’Inca après un moment.
– Oui, on…
Il s’interrompit et se ravisa, vu qu’il était le dernier de son espèce, le « on » n’était plus vraiment d’actualité. Et c’est à regret qu’il se corrigea.
– Je vois presqu’aussi bien qu’en plein jour.
– Pratique…, admit-elle.
Elle tira à elle une des deux chaises de la cabine et s’assit près du lit.
– Meilleure vision, meilleure ouïe,… c’est pareil pour tes trois autres sens ?
Elle avait sa voix douce et son air de petite fille curieuse qu’elle ne partageait qu’avec peu de monde. Un aspect de sa personnalité qu’elle cachait la plupart du temps. En général, Marinchè se drapait dans une sorte de froide dignité flirtant avec le mépris, le verbe coupant et acerbe. Une carapace qui maintenait le monde à distance.
Qu’elle accepte de se livrer sous une autre lumière était un privilège dont l’Olmèque avait conscience et qu’il souhaitait protéger.
– Pour l’odorat, je pense que oui. Pour le goût et le toucher…, il eut une expression d’ignorance. Aucune idée. Je devrais pouvoir me glisser dans la peau de quelqu’un d’autre pour pouvoir comparer, plaisanta-t-il.
L’Inca regarda autour d’elle et attrapa un morceau de serrano qui se trouvait sur la table. Elle adorait ce jambon espagnol.
– J’ai discuté un peu avec Mendoza, fit-elle en mâchant le bout de viande avec élégance.
– Et ?
– Il remettra sa décision à la Comtesse après l’escale au Comptoir.
L’Olmèque assimila l’information sans mot dire.
– Combien de temps restera-t-on à Lizoa ? finit-il par demander.
– Difficile à prédire avec exactitude, mais les emplettes de Diaz devraient être bouclées dans les vingt-quatre heures, par contre la vente de la caravelle est plus aléatoire. Il faut trouver un amateur et négocier. Mais Mendoza semble confiant. Il dit que c’est un excellent navire et qu’il trouvera acquéreur de toute façon.
Calmèque fixait le plafond de la cabine, les mains croisées sous sa tête. Une fois son morceau de jambon terminé, l’Inca se mit à entortiller une de ses mèches de cheveux. Peut-être était-ce en prévision de cette petite manie, qu’elle s’était gardé une mèche longue de chaque côté de son visage, ne coupant que le reste. Ca lui faisait une coupe improbable mais qui somme toute lui allait bien. A cet égard, l’Olmèque se fit la réflexion que même avec un pot de chambre sur la tête, elle devait rester jolie à regarder.
– Je peux te poser une question indiscrète ? lui demanda-t-elle soudain.
L’Olmèque ne put s’empêcher de rire malicieusement, il se doutait qu’elle avait quelque chose en tête, sans quoi, elle ne serait pas là à se tortiller les cheveux avec son petit air de sainte-nitouche.
– Fais-toi plaisir ! Au point où on en est…
Un court silence durant lequel Marinchè se demanda comment tourner sa question, et puis finalement, elle conclut que le plus directe serait le mieux.
– T’aimes les hommes ?
Calmèque pouffa de rire.
– Je sais pas pourquoi, je la sentais arriver celle-là, et j’imagine que ta question ne porte pas sur la philanthropie, remarqua-t-il.
Elle le regarda, narquoise. Et attendit quelques instants.
– Et donc ?
L’autre prit un air embêté, ce genre de conversation le mettait mal à l’aise.
– Si je te dis que ça ne te regarde pas, ça clos le débat ?
– Aucune chance !
Calmèque soupira profondément en cherchant ses mots.
– Et si on remettait cette conversation à plus tard ? tenta-t-il.
– Tu veux vraiment prendre le risque de me laisser le temps d’interpréter les choses à ma façon ?
Calmèque lui décocha un sourire crispé.
Puis, il réfléchit à la manière la plus adéquate de répondre. Il se lança au bout d’une trentaine de secondes.
– Tu te souviens d’Apuchi ?
L’Inca fit une grimace comique.
– C’est une vraie question ?
Calmèque poursuivit sans relever le sarcasme.
– On avait des vies de moines à Apuchi, saupoudrées de science, de routine, de froideur et d’ennui. Une austérité d’une grisaille sans égal… ironisa-t-il. Et avec nos têtes bizarres, pas moyen de foutre un pied dehors sous peine de se faire lyncher par les Mayas du coin, et donc aucune chance de rencontrer qui que ce soit en dehors de nos épaisses murailles. Donc…
Et il la regarda droit les yeux.
– Donc, disais-je, se découvrir homo un beau matin à Apuchi était une bénédiction qui assurait de pouvoir prétendre à un minimum d’affectivité. Chance que je n’ai pas eue.
Marinchè, la moue aux lèvres, lui accorda une minute.
– Et… ? T’as essayé ?
– Quoi ? s’offusqua Calmèque. Mais NON !
Puis il prit une mine un peu moins convaincante.
– Enfin… pas vraiment.
Pas un mot ne sortit de la bouche de notre Inca, mais son regard à la fois curieux et inquisiteur n’avait pas besoin de sous-titres.
Calmèque soupira aussi longuement que ses poumons le lui permirent. Il en avait trop dit ou pas assez. Autant lâché l’affaire de suite où elle lui pourrirait la vie jusqu’à ce qu’il craque.
Il se jeta donc à l’eau, avec toutes les précautions qui s’imposaient.
– Disons que… amorça-t-il, tentant de choisir ses termes au mieux. Quand on est au fond du trou…
Et brusquement, il s’interrompit, se sentant obligé de préciser :
– Et y’a pas de jeu de mots !
Il continua.
– Des fois quand on a le moral dans les chaussettes et qu’on ne serait pas contre une oreille compatissante ou… un câlin bah…
Minutes de suspension.
– Bah ? insista Marinchè qui n’avait pas l’intention de lâcher l’affaire.
L’Olmèque lui adressa un regard appuyé.
– Bah voilà ! Des fois, à la faveur d’une journée de merde on peut se dire que finalement « des bras, ce sont des bras ! »
Regard incisif de l’Indienne.
– Et… ces bras ont un nom ?
– Me souviens pas ! Et de toutes façons j’ai pas pu et ça n’a pas été plus loin, coupa sèchement l’Olmèque qui n’avait visiblement pas envie d’entrer dans les détails.
– Et… y’en a eu d’autres, « des bras » ? asticota-t-elle encore, un peu malicieuse.
– Je viens de te dire que ça n’était arrivé qu’une fois, que j’avais coupé court et que ça m’avait convaincu que c’était pas mon truc ! siffla Calmèque. Tu veux quoi de plus ?
Elle tournicota sa mèche en dodelinant de la tête. L’air de pas y toucher.
– Mmmmmm, fit-elle. Comme quoi, j’avais raison.
Mimique incrédule du petit homme.
– Raison à propos de quoi ?
Et elle se mit à imiter quelqu’un jouant du violon, une mine taquine accrochée au visage.
– Mais tes parents t’ont fini à la fouine, toi, c’est pas possible !
– Si ça veut dire que tu penses que je vais te harceler jusqu’à ce que, si nécessaire, tu te l’avoues à toi-même… je plaide coupable ! Je vais faire de ta vie un enfer !
C’est à cet instant, n’ayant rien vu venir, que Marinchè se prit l’oreiller de l’Olmèque en pleine figure, ce qui eut pour effet de la décoiffer un peu, et tandis qu’elle remettait ses cheveux en place, elle le regardait, triomphante.
– La violence, mon petit Calmèque, lui dit-elle d’une voix narquoise, est l’argument de ceux qui n’en ont point d’autre.
Assis en tailleur sur sa couche, le polochon menaçant, l’Olmèque la dévisageait, impassible. C’est à ce moment, que quelque part dans le ventre du navire, se mit à résonner l’instrument de l’Irlandaise. Et le son confiné dans cet entre clos, donnait aux notes une nouvelles dimension. Sublime.
– Voilà qui ponctue en ne peut mieux cette petite conversation, s’amusa Marinchè.
Tentant de ne pas manifester son agacement, Calmèque lui répondit de la façon la plus détachée qu’il put.
– Je ne sais pas pourquoi tu t’obstines dans cette direction, Marinchè, mais tu te trompes lourdement, je t’assure. Mon seul intérêt pour cette fille sont ses qualités de musicienne. Mais peut-être que tes oreilles, bien trop petites, ne peuvent percevoir les nuances te les subtilités de son jeu.
Marinchè n’en crut pas un mot, convaincue qu’elle était par son intuition qui, en cette matière, ne lui avait jamais fait défaut. A présent que son petit doute quant à son orientation sexuelle était balayé, Calmèque pouvait bien lui affirmer ce qu’il voulait, sur les nuances et les subtilités du jeu de la donzelle, et même peut-être le croire très sincèrement, mais elle était certaine que l’Olmèque n’était pas indifférent aux charmes, purement féminins, de la jeune femme. Il pouvait bien lui baratiner ce qu’il voulait !
Néanmoins, elle avait bien perçu que son interlocuteur était sur la défensive, et elle préféra faire mine de le croire. Aussi changea-t-elle de conversation afin de décrisper l’atmosphère.
– Ca s’est bien passé hier avec Mendoza ?
Elle faisait allusion à l’échange heurtant que les deux hommes avaient eu la veille.
– Oh, fit Calmèque. Des accrochages on en aura d’autres, essaye-t-il de minimiser. Il croit que je suis un monstre, assena-t-il avec un sourire un peu triste, et franchement, avec ce qu’il connait de moi, c’est compréhensible. Du coup…
Et il ne continua pas sa phrase.
En fait, il avait décidé de prendre sur lui. Conscient que la mauvaise humeur ne lui apporterait rien, bien au contraire. Le Navigateur lui ayant déjà reproché ce comportement, il essayait donc de ne pas le contrarier outre-mesure. Il jouait quand-même sa vie dans cette histoire.
Mais en réalité, l’incident l’avait tellement remué qu’il n’avait pu s’empêcher d’être maussade une bonne partie de la journée, évitant l’Espagnol autant que faire se peut, tout en restant poli. Après tout, cacher son désaccord au risque de représailles très désagréables, était un exercice de funambulisme dans lequel il excellait depuis son plus jeune âge.
Il conclut donc à l’intention de Marinchè par un magnifique sourire.
– Tout va bien, mentit-il.
Mais ils n’étaient dupes ni l’un ni l’autre.
Ils discutèrent de choses et d’autres durant plusieurs heures, la petite discussion tendue laissée loin derrière, cédant le pas à un badinage anodin. Ca faisait du bien de se détendre et d’arrêter de s’inquiéter quelques heures sans penser au lendemain. Un bien fou. Quand la nuit fut bien avancée, l’un et l’autre commencèrent à sentir la fatigue les gagner et Calmèque qui était toujours dans son lit s’allongea et ferma les yeux tout en continuant leur conversation, la voix de plus en plus lointaine. Il n’allait plus tarder à sombrer. Il le sentit et s’en excusa.
– Y’a les bras de Morphée qui m’attendent…
– C’est pas un homme, ça ? le taquina-t-elle gentiment.
– Recommence pas, dit-il doucement.
Puis il parut s’assoupir mais il fit un effort pour lui parler une dernière fois.
– Tu peux éteindre la lumière avant de partir s’il te plaît…
– Promis…
Et l’Olmèque s’endormit.
Restée seule, l’Inca sentit poindre une petite boule au ventre qu’elle commençait à bien connaître. Elle tenta de penser à autre chose et resta encore un moment dans la cabine, assise sur la chaise, sous la lumière rassurante de la lampe tempête. L’océan était calme et les bruits de craquements du navire étaient devenus une rengaine apaisante.
Elle aurait du prendre congé et gagner ses propres quartiers, mais elle n’en avait pas envie. L’angoisse la gagnait de plus en plus. Son long mois claquemurée dans la coque du navire lui avaient laissé des peurs que la nuit et le noir faisaient remonter sans ménagement. Elle se réveillait couverte de sueur, les yeux terrifiés, balayant les ténèbres de sa cabine en proie à une panique sans nom, croyant voir des ombres se faufiler au ras du sol et gratter le plancher de leurs petites pattes griffues. Les rats… un cauchemar qu’elle risquait de traîner avec elle un bon moment.
Elle ramena ses pieds sur la chaise pour qu’ils ne touchent plus le sol, passa ses bras autour de ses jambes et cala ses genoux sous son front. Au-dessus d’elle, la flamme de la lampe vacillait, sans doute l’huile commençait-elle à manquer, elle s’éteindrait seule. Marinchè ferma les yeux.

Au beau milieu de la nuit, un fracas fit bondir Calmèque hors de son sommeil comme un clown à ressort.
« Aïe !» Entendit-il juste à côté de son lit.
Il découvrit Marinchè vautrée de tout son long, occupée à se redresser pitoyablement au milieu des barreaux de la chaise qui avait cédé.
« Elle s’était endormie là ? » Il n’en avait aucun souvenir. Perplexe, il l’observa sans rien dire.
– Merde… la trouille que j’ai eu… saloperie de chaise !
– Ca va ? finit-il par lui demander, mettant doucement de l’ordre dans ses propres idées.
– Oui oui… souffla-t-elle, mais le réveil est un peu rude… je vais avoir des bleus partout…
– Mais qu’est ce que tu foutais là ? Tu t’es endormie sur la chaise ?
– Mmmmmm… fit-elle en guise de réponse, un peu gênée, comme un enfant pris la main dans le sac. Avais pas envie de retourner dans ma cabine, maugréa-t-elle.
L’Olmèque en fut surpris.
– Pourquoi ne pas avoir dormi sur la couchette de Mendoza plutôt ?
– Laisse tomber.
Elle avait l’air de mauvais poil et ces derniers mots s’étaient perdus dans un grognement d’insatisfaction. Aussi Calmèque préféra ne pas insister et la laisser faire ce qu’elle voulait. Il la vit donc se diriger vers la couche de Mendoza sans demander son reste et s’y allonger visiblement contrariée. Le petit homme se recoucha.
Mais dix minutes plus tard, alors qu’il commençait à se rendormir, il fut à nouveau sorti de ses nimbes. Marinchè le secouait doucement.
– Calmèque… Cal… réveille-toi s’il te plait...
– Mais qu’est-ce que t’as ? grommela-t-il.
Elle ne répondit pas. Contrite. Debout à côté du lit. Sans plus un geste.
– J’ai peur…
– Hein ?
Cette révélation aida notre Olmèque à se réveiller.
– Mais peur de quoi ?
– Mon cerveau me joue des tours et j’ai l’impression de voir grouiller des rats partout, fit-elle la voix étranglée. Je deviens dingue…
Et sans demander la permission, elle enjamba brusquement le petit homme pour se glisser dans son lit entre lui et le mur. Le mouvement fut tellement rapide, que Calmèque n’eut pas le temps de protester. Il l’observa, médusé. Elle s’était blottie et prenait le moins de place possible. Il souffla bruyamment et fit mine de se lever pour gagner l’autre lit, mais voyant qu’il partait, Marinchè passa de justesse son bras autour de lui afin de le maintenir près d’elle.
– Je t’en prie, reste… je suis vraiment morte de trouille… je te jure…
– Tu me mets mal à l’aise Marinchè…
– Juste un peu… et puis je m’en vais…
Sa voix s’étranglait et elle n’avait, pour l’heure, plus rien de sa superbe, on aurait même dit qu’elle allait se mettre à pleurer, et Calmèque céda… vaincu par sa propre fatigue et l’émotion sincère qu’il percevait dans le timbre de l’Inca.
Au bout de plusieurs longues secondes, elle le sentit détendre progressivement ses muscles et se rallonger, signe qu’il acceptait, bon gré mal gré.
– Merci… fit-elle d’un ton ténu, la tête enfouie entre l’oreiller et l’épaule de son hôte.
– De rien…, murmura-t-il.
Épuisée et se sentant enfin en sécurité, Marinchè s’endormit très rapidement. Calmèque, lui, sensiblement crispé, mit plus de temps, mais le sommeil finit par le rattraper à son tour.
Modifié en dernier par Anza le 08 juin 2021, 11:50, modifié 2 fois.
8) Fane absolue de la 1ère saison, certes imparfaite, mais avec tant de qualités qu'on peut lui passer beaucoup de choses !
Perso préféré : Calmèque, cherchez pas, mon psy a jeté l'éponge ! MDR

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Message par TEEGER59 »

ANALYSE:

Des femmes ayant pris Marinchè en pitié, lui avaient donné de quoi se vêtir correctement et la donzelle inca se pavanait à présent dans une toilette impeccable lui rendant une partie de son éclat. :arrow: Pauvres cruches! Si vous saviez! :roll:
Lors de son court interrogatoire, la jeune femme rousse s’était offusquée d’avoir été prise pour une Anglaise et se revendiqua « Irish ». :arrow: Ça, ça va faire plaisir à Chaltimbanque si elle lit. ;)
À qui pouvait-on vraiment se fier après tout ? Ne lui avait-il pas sauvé la vie cet après-midi même ? :arrow: Toujours se méfier de l'eau qui dort...
:Marinche: : Vous allez me laisser comme ça ? Comme une conne sans rien dire ? :arrow: Et revoilà le langage fleuri! :lol:
:Mendoza: : Il a raison. Tu nous prends de court. La prochaine fois, mets-nous ça par écrit. :arrow: N'oublie pas ton codex bescherelles, Mendodo! :x-):
:Mendoza: : Ça ne te ressemble pas de t’inquiéter pour les autres, Marinchè. :arrow: :shock: Ouais! C'est louche. Qu'a-t-elle derrière la tête?
:Marinche: : La vie, le temps et les événements nous changent Mendoza. Nous changent tous. :arrow: Céline Dion n'est pas de cet avis! :lol:
:Marinche: : J’ai l’intuition qu’il est bien plus digne de confiance que certaines personnes dont tu ne te méfies pas assez. :arrow: Peut-être plus que toi, en tout cas!
:Marinche: : Ça te changera des deux boulets que tu te trimbalais avant. :arrow: :x-): :x-): :x-):

:Pichu: :Pichu: :Pichu:

:Marinche: : « Les hommes sont tellement manipulables, deux centimètres de chair qui dépassent et on en fait ce qu’on veut… pour un peu il se baverait dessus… » :arrow: Ça dépend du morceau! :lol:
Marinchè continuait de faire « mousser » son crétin de matelot libidineux pour passer le temps. :arrow: Une sal**e, vous dis-je! :P
Mendoza n’avait pas pour habitude de brimer les gens. :arrow: Ah bon? :Sancho: et :Pedro: ne doivent pas être du même avis que toi... :x-):
Calmèque: Vos directives je m’en torche ! :arrow: Quelle partie du corps? :shock:
:Mendoza: : Tu te sens mieux ? persifla Mendoza qui n’avait pas esquissé un mouvement tandis que la table s’était envolée pour s’écraser conte la cloison de bois et que tout ce qui se trouvait dessus était tombé au sol dans un énorme fracas. :arrow: Zen, soyons zen. Du sang-froid dans les veines...
Et puis, s’impliquer émotionnellement le moins possible en toutes circonstances était devenu son mot d’ordre depuis bien longtemps. :arrow: Le fameux: Désolé Estéban, mais la mort ne m'émeut plus depuis longtemps...

CORRECTIONS:

CHAPITRE 7.

...et laisser repousser ses cheveux de jais.
Elle aurait bien, à ce propos, abordé un autre sujet, mais elle se ravisa.
:Marinche: : Prends-le avec toi. Il est très malin, débrouillard, pas tire-au-flanc et il sait se battre.

:Pichu: :Pichu: :Pichu:

CHAPITRE 8.

:Marinche: : Tu as tort, ça te rendrait plus humain.
...il gagna donc les cales les plus profondes du navire, celles où seule l’obscurité régnait et où personne ne viendrait le chercher.
...comme s’il n’était que dans la pénombre.
Calmèque le contourna et s’assit sur son lit, las.
Et à nouveau ce malaise s’insinuait, parasitant ses à priori. (Invariable).
Mendoza avait pour habitude de se fier à son instinct, et ce dernier lui soufflait que cette dispute était une étape saine...
...une lueur que Mendoza jugeait tout à fait respectable.
...et Mendoza se coucha à son tour après avoir soufflé la flamme vacillante de la lampe tempête.

:Pichu: :Pichu: :Pichu:

La suite prend une tournure plus sombre et on entre dans la psychologie des personnages. C'est bon ça!
Le voyage suit son cours.
J'arrête là pour ne pas faire un pavé trop important mais je continue à lire en te donnant mes impressions "à chaud".
La suite dans quelques instants.
:Laguerra: : AH! Comme on se retrouve!
:Mendoza: : Ma première leçon ne t'a pas SUFFIT?
:Laguerra: : Cette fois, tu ne t'en sortiras pas si FACILEMENT!
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TEEGER59
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Re: FANFIC : "Au-delà des Mers" - republication

Message par TEEGER59 »

ANALYSE:

53 ans plus tôt. :arrow: Waouh! Quel bond en arrière! Mais si c'est pour connaître la génèse des Olmèques...
Des Ariens avant l’heure en somme. :arrow: Jolie comparaison, ça promet!
je vous prie d’accueillir les frères Men-Ator, respectables scientifiques de notre Communauté... :arrow: Tiens! Voilà André Vésale! :tongue:
Leur mutation était plus profonde qu’il n’y paraissait. :arrow: Il n'y a qu'à voir leur tronche à ces faces de craie!
... des photos, des graphiques, des laboratoires, un cristal, une montagne,… :arrow: Des photos? À cette époque? :x-): Enfin! Ce sont des Olmèques et ils en connaissent un rayon en ce qui concerne la technologie.

:Pichu: :Pichu: :Pichu:

La jolie rousse faisait pleurer son instrument mélancoliquement depuis plus d’une demi-heure en s’abîmant dans la contemplation du soleil couchant. Pour des raisons sans doute pratiques, elle avait préféré délaisser robes et dentelles pour revêtir une tenue beaucoup moins féminine. :arrow: Pourquoi ai-je la sensation bizarre qu'il s'agit d'un membre de la famille d'Isabella Laguerra?
Calmèque: « Où veut-elle en venir ? » :arrow: Ça, j'aimerai bien le savoir!
Calmèque: Trouve-toi une mouette et étouffe-toi avec ! :x-): :x-): :x-): Encore faut-il pouvoir l'attraper! Hein, :Sancho: et :Pedro: ?
Calmèque: Oui et « on » aimerait pourvoir écouter… :arrow: :? Toujours aussi pinçant, la crevette!
Elle l’avait rassuré dans les derniers instants, tandis qu’il pleurait à son chevet, lui avait serré les mains, caressé le visage et prodigué d’ultimes recommandations avant de lui dire adieu et de fermer ses beau yeux d’ébène pour la dernière fois. L’enfant qu’il était alors avait senti que quelque chose était mort en lui ce jour-là, quelque chose de profond. :arrow: Comme c'est triste! :cry:
... sans quoi cette emmerdeuse de Marinchè... :arrow: C'est le cas de le dire! :x-):
:Mendoza: : Des fientes d’oiseaux. :x-): Ah, le guano! :roll:
:Mendoza: : Pourquoi ? Parce qu’il n’a pas encore essayé de te sauter ? :arrow: :x-): :x-): :x-): Comme Calmèque, j'y réfléchirai à deux fois après le tableau que Mendoza a dépeint d'elle...
:Marinche: : C’que tu peux être cru des fois !
:Mendoza: : Ça ne te dérangeait pas trop à une époque… :arrow: Oh! Va-t-on avoir des révélations à ce sujet?
... l’Olmèque se fit la réflexion que même avec un pot de chambre sur la tête, elle devait rester jolie à regarder. :arrow: :x-): :x-): :x-): Mais punaise! Où vas-tu chercher des comparaisons pareilles? Je suis pliée!
Pas un mot ne sortit de la bouche de notre Inca, mais son regard à la fois curieux et inquisiteur n’avait pas besoin de sous-titres. :arrow: Mais nous non plus! :lol:
Calmèque: Et y’a pas de jeu de mots ! :arrow: :x-): :x-): :x-):
Calmèque: Mais tes parents t’ont fini à la fouine, toi, c’est pas possible ! :lol: Excellente, celle-ci!
Calmèque: Y’a les bras de Morphée qui m’attendent…
:Marinche: : C’est pas un homme, ça ?
Calmèque: Recommence pas. :arrow: Elle est bien placée, cette tirade!
Il découvrit Marinchè vautrée de tout son long, occupée à se redresser pitoyablement au milieu des barreaux de la chaise qui avait cédé. :arrow: Un bobo? Tu veux un Anzaplast, Marinchè? :tongue:
Marinchè passa de justesse son bras autour de lui afin de le maintenir près d’elle. :arrow: Elle veut se faire une crevette ou quoi?

CORRECTION:

CHAPITRE 9.

...et marchait à bonne allure dans les longs couloirs du manoir familial.

CHAPITRE 10.

:Marinche: : Tu as bon goût, elle est très jolie…
:Marinche: : Ceci dit, le fait que tu aies peur de me dévoiler quelque chose sur base d’une réponse aussi anodine est bien la preuve que tu caches un truc.
Marinchè voulu répondre quelque chose mais ses mots s’évanouirent à la lisière de ses lèvres...
Son professeur ne cessait de lui seriner qu’il avait un épouvantable sens du rythme.
...croyant voir des ombres se faufiler au ras du sol et gratter le plancher de leurs petites pattes griffues.

:Pichu: :Pichu: :Pichu:

Deux chapitres intéressants. Le 9 plus sérieux que le suivant.
C'est toujours aussi bien écrit.
La suite au prochain épisode.
:Laguerra: : AH! Comme on se retrouve!
:Mendoza: : Ma première leçon ne t'a pas SUFFIT?
:Laguerra: : Cette fois, tu ne t'en sortiras pas si FACILEMENT!
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IsaGuerra
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Re: FANFIC : "Au-delà des Mers" - republication

Message par IsaGuerra »

Chapitre 1
→ Alors déjà c'est assez bizarre de voir Mendoza acheté un esclave mais après tout il agit toujours bizarrement et puis quand on sait qui est la crevette bah...
→ Calmèque avec de cheveux j'ai du mal à voir le truc mdrr
Oh ! Surtout pas ! Venant de toi, j’aurais l’impression d’avoir une centaine d’années ! : :lol: :lol:
→ Mendoza beau parleur avec les femmes roooh mais que vas-tu imaginer là :roll:

Chapitre 2
→ « L'apparition » de Marinché ah mais ok mdrr
→ La petite discussion entre les 2 m'a fait mourir de rire, et que je te lance des pics et que je te les rends :lol:
→ T'y vas pas de main morte niveau langage c'est excellent !

Chapitre 3
→ Le coup de la blanchisseuse bah génial
→ J'aime bien aussi le fait que Mendoza, bien qu'il haïsse Calmèque, lui enseigne de nouvelles choses
→ Pour le véritable nom de Calmèque tu t'es lâchée :x-):

Chapitre 4
→ La crevette qui prend une sa première cuite j'adore
→ Le contenu de la lettre a vraiment l'air intéressant en tout cas

Chapitre 5
→ Une petit abordage rien ne vaut les pirates pour mettre un peu d'ambiance dans une croisière

Chapitre 7
→ Femme rousse, irlandaise un peu cliché mais ça me va quand même j'aime bien
→ Petite discussion entre Mendoza et Marinchè plutôt sympathique

Chapitre 8
→ On voit que l'histoire devient de plus en plus sérieuse c'est sympathique

Chapitre 9
→ Chapitre fort intéressant on en apprend un peu plus sur la déchéance et le nouvel espoir de la survie Olmèques. Bien vu

Chapitre 10
Ce n’est pas la fille qui m’intéresse, c’est sa musique : La musique attendrirait le cœur de ce cher Calmèque ? Sympa
→ Visiblement pas que la musique :x-):
Marinchè se prit l’oreiller de l’Olmèque en pleine figure : BATAILLE DE POLOCHON ! (hum pardon)
→ On dirait n'empêche une toute autre Marinchè que tu nous as fait là

En somme, j'ai bien aimé lire tout ces chapitres ^^
T'es cash dans certains passages et je trouve ça top ça donne un bon petit coup de pep's
Et remercie Teeger c'est elle qui m'a conseillé de lire ta fic et franchement je suis pas déçue
« On le fait parce qu'on sait le faire » Don Flack
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Re: FANFIC : "Au-delà des Mers" - republication

Message par Anza »

Teeger,

pour tes corrections, je te jure que tu ne fais pas ça dans le vide, mais je dois faire ça aidée de deux écrans, l'un avec tes corrections et l'autre avec le texte original pour corriger aux bons endroits, ensuite je dois refaire le chapitrage et les copier/coller sur le site. Parce que, si je ne corrige qu'ici, ce serait dommage ;)
Donc ne te décourage pas ! Ton travail de fourmi n'est pas vain !
8) Fane absolue de la 1ère saison, certes imparfaite, mais avec tant de qualités qu'on peut lui passer beaucoup de choses !
Perso préféré : Calmèque, cherchez pas, mon psy a jeté l'éponge ! MDR

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Re: FANFIC : "Au-delà des Mers" - republication

Message par Anza »

Toujours pour Teeger :
Pour les commentaires, ça me fait toujours autant plaisir.
N'aie crainte, le petit volet parallèle, sur la génèse de nos grandes oreilles, ne prend pas trop de place, il est juste là pour apporter quelques infos importantes complémentaires.
Quant à une éventuelle idylle entre Gargouille et Vipère, j'ai pas envie de te spoiler, mais j'ai juste envie de te dire... rassure-toi (tu en concluras ce que tu veux) MDR
Tu verras aussi que si certains chapitres se concentrent d'avantage sur la psychologie des personnages et pourraient donner un tournant plus sombre au récit, j'essaye malgré tout, de laisser un place à la légèreté, je laisse à Zola les histoires de nana qui meure sous les escalier d'une maison dans l'indifférence totale PTDR (je me comprends). Pas envie de tomber dans un truc sans humour. Il y a donc des chapitres plus "sérieux" et des chapitres plus "funs", histoire de garder un équilibre (enfin, j'essaye !)
Merci d'avoir conseillé à IsaGuerra la lecture de la fic, c'est très gentil, j'espère que ni l'une ni l'autre ne le regrettera :)
Bizzzzzzz

PS : on a les mêmes références musicales, j'étais morte de rire, et j'ai fini de lire ton post en chantonnant "C'line et Zazie" :x-):
Modifié en dernier par Anza le 04 déc. 2020, 10:42, modifié 1 fois.
8) Fane absolue de la 1ère saison, certes imparfaite, mais avec tant de qualités qu'on peut lui passer beaucoup de choses !
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Re: FANFIC : "Au-delà des Mers" - republication

Message par Anza »

Bonjour IsaGuerra :)
Je suis ravie que tu te joignes à nous !
Je vais donc prendre le temps de répondre à certains de tes commentaires.
Je constate, déjà, que d'une personne à l'autre, ce ne sont pas forcément les mêmes choses qui marquent et je trouve ça très encourageant :)
Pour ta première réflexion : Mendoza qui achète un esclave, il ne faut pas le voir de cette façon, disons plutôt qu'il récupère un personnage. Imaginons, qu'il ait vu Calmèque à Lima dans les circonstances décrites. Il est difficile d'imaginer qu'il aurait simplement passé son chemin. Y'a trop de passif entre les deux personnages, il es forcément obligé de faire "qqch" : soit il le tue simplement par pure haine ou alors, ce personnage infiniment plus nuancé qu'est Mendoza, décide qu'il serait plus jouissif de lui faire payer ses erreur en l'achetant (et donc en l'humiliant) lui même. Et je dirais que c'est une des premières raisons qui pousse Mendoza à cet achat, la possibilité inespérée de faire payer à Calmèque tous les ressentiments qu'il a nourri à son encontre. Mais aussi d'autres raisons qui seront exposées plus tard...
Pour Calmèque avec des cheveux, bah... je dirais que c'est comme Ripley dans Alien 3 qui se rase la tête... au début ça fait bizarre et après on s'y habitue MDR
J'ai fait des dessins de Calmèque avec des cheveux... ils sont visibles dans "Calmèque, ma petite obsession" (Fanart),si tu veux aller voir MDR (ça reste ma vision, mais bon, si ça t'aide !)

Pour le nom de Calmèque, je vais poster un mini ademdum qui explique comment se forment les noms Atlantes (si si ! Y'a une règle ! C'est pas juste une suite de syllabes arbitrairement assemblées entre elles MDR)

Le caractère de Marinchè loin de l'idée qu'on s'en fait : et bien, si on analyse les données, Mendoza est le seul personnage qui ait été suffisamment fouillé (en 4 saisons) que pour qu'on s'en fasse une idée plus précise. Marinchè et Calmèque, eux, sont des personnages à peine ébauchés, si on veut les faire évoluer, on est obligé d'extrapoler et impossible de les limiter à une description aussi monodimensionnelle que celle de la saison 1, le récit n'irait pas loin d'autant que le fond de mon récit est précisément, finalement, de montrer que qqn est rarement aussi simple qu'il n'y paraît et qu'on ne peut réduire une personne qu'à la simple vision qu'une autre personne a d'elle rapport à tel ou tel événement. Les gens sont complexes et plusieurs vérités ou visions des choses peuvent à la fois s'opposer et être parfaitement vraies, selon le point de vue !

Quant au cliché de l'Irlandaise rousse... bah... MDR... t'as déjà été en Irlande ? 10 % de la population est rousse ;) Et en Écosse, 40 % de la population possède le gène récessif porteur de la couleur rousse ;) donc... hihihi y'a quand-même un vivier par-là ;)

Voiloù :)
Au revoir et... à ce soir !

Tiens, j'ai pitié de toi, voici un dessin que j'ai fait au début que j'écrivais cet fic, moi aussi j'avais besoin de me le représenter clairement. Alors, non, je n'ai pas beaucoup modifié le "vrai" Calmèque, je l'ai recopié d'un arrêt sur image dans le DA, donc... j'ai juste adouci son expression et... rajouté la sacro-sainte tignasse ;)
Fichiers joints
2015-09-05 09.48.26.jpg
Modifié en dernier par Anza le 04 déc. 2020, 13:40, modifié 1 fois.
8) Fane absolue de la 1ère saison, certes imparfaite, mais avec tant de qualités qu'on peut lui passer beaucoup de choses !
Perso préféré : Calmèque, cherchez pas, mon psy a jeté l'éponge ! MDR

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Re: FANFIC : "Au-delà des Mers" - republication

Message par Anza »

CHAPITRE 11

Lizoa

On aurait pu croire qu’ils s’étaient endormis dix minutes plus tôt, tant leur position n’avait quasiment pas bougé. Pourtant, quand Mendoza pénétra d’un pas plus que décidé dans la pièce, il était près de 9h, et l’Espagnol eut un bref mouvement de recul en apercevant ses deux comparses enlacés dans le même lit. Le claquement de la porte sortit l’Olmèque de son sommeil et il lui fallu quelques secondes avant de se rappeler ce que Marinchè faisait là. La méprise étant évidente et Calmèque sentit qu’il devait dire quelque chose.
-Ce n’est pas ce dont ça a l’air…, se justifia-t-il. Elle fait des cauchemars terribles à cause des rats…
En s’entendant, l’Olmèque se rendit compte que son explication n’était pas limpide et il fit un effort de concentration afin d’être plus clair.
-En fait…
-Je m’en fiche de ce que vous foutez tous les deux, coupa sèchement l’Espagnol. Lève-toi !
C’était la première fois que Le Navigateur le sortait de son lit, aussi Calmèque comprit qu’il ne fallait pas se faire prier. En bougeant, il secoua l’Inca qui devait avoir accumulé tant d’heure de sommeil en retard, qu’une masse aurait été plus alerte. Tout en enfilant sa chemise et sa veste en hâte, il vit Mendoza se saisir d’une carafe d’eau qui traînait sur la table et en jeter sans ménagement le reste du contenu sur Miss Marmotte avant de reposer l’objet du délit sur la table. Marinchè fit un bond et un cri impressionnants, et la mine horrifiée par ce réveil brutal, l’Olmèque fut la première cible de son regard courroucé.
-Ah non ! fit ce dernier en secouant la tête négativement et en pointant l’Espagnol du doigt. C’est lui !
-Debout Marinchè, lui intima l’Espagnol sans lui laisser le temps de dire quoi que ce soit, j’ai besoin de toi aussi !
Tandis que l’Olmèque finissait de boucler sa ceinture, Mendoza lui tendit son couteau qu’il ne prenait pas systématiquement avec lui.
-T’en auras besoin.
Cette révélation enleva toutes envie de velléités à l’Inca qui prit un air sombre.
-Qu’est-ce qui se passe ?
-Lizoa est en vue, commença l’Espagnol. Et Jiménez m’a fait savoir que Diaz avait l’intention de se débarrasser de moi après la vente de la caravelle.
-Pourquoi Jiménez te met-il en garde ? s’étonna l’Inca en se mettant debout et en s’essuyant le visage avec la couverture.
-Parce qu’il est intelligent et qu’il sait qu’un homme qui peut trahir une fois pour de l’argent, le refera forcément, fit Calmèque en comprenant les enjeux et en ajustant son fourreau.
-Exactement, et il sait que le prochain sur la liste c’est lui…, conclut Mendoza. Donc…
L’Espagnol sortit de sa veste une lettre cachetée qu’il tendit à l’Inca.
-Toi, tu t’habilles de tes plus élégantes dentelles et tu portes cette missive à la Comtesse de Messy. Et tu ne reviens pas sans la réponse ! insista-t-il.
-Quelle réponse suis-je en droit d’attendre ?
-Je décris dans ce pli la situation sans ménagement et je demande à la Comtesse si elle nous suit ou si elle reste sur La Myrta avec ce scélérat de Diaz. Elle te posera sans doute des questions. Réponds avec diplomatie mais sans ambages, je sais que tu sauras trouver les mots !
Marinchè accueillit le compliment avec un sourire en coin.
-Si elle ne vient pas, renchérit Le Navigateur, tant pis, mais j’aimerais autant qu’elle soit du voyage. En amie de la Reine Catherine d’Aragon, elle est en possession d’un sauve-conduit royal qui pourrait bien nous être utile.
-On va voler Le Nazaré ? réalisa Calmèque.
-On ne vole rien du tout ! Techniquement Le Nazaré appartient à ceux qui l’ont trouvé et c’est Jiménez et moi-même qui sommes montés à son bord en premier, fit Mendoza avec un clin d’œil.
L’Olmèque fit une moue amusée.
-Toi, dit Mendoza en lui tendant une bourse pleine de pièces d’or, tu vas retrouver Jiménez sur le pont dès que nous auront touché terre. Il m’a assuré qu’il pouvait s’entourer d’un équipage loyal mais que ces hommes demanderaient à être payés afin d’être certains de ne pas se retrouver floués dans l’aventure. Voilà de quoi les mettre en confiance. Le reste de l’équipage profitera de l’escale pour aller s’encanailler à n’en pas douter. Moi, je me charge d’occuper Diaz le temps qu’il faudra.
Mendoza se saisit de son épée qui pendait la plupart du temps à un crochet près de sa couche.
-Il faudra aussi bourrer les calles du Nazaré de vivres. Envoie des hommes acheter discrètement ce qu’il manquerait, je ne veux pas risquer de tomber à court de quoi que ce soit.
-Puis-je prélever quelques pièces afin de débaucher le cuisinier ? demanda Calmèque alors qu’il inspectait machinalement le contenu de la bourse. A moins que vous n’ayez envie de vous retrouver derrière les fourneaux, ironisa-t-il.
-Je n’y avais pas pensé, admit Mendoza. Fais au mieux !
Marinchè lança un regard réjoui à son camarade de nuit. Par ces actes, Mendoza acceptait de remettre en partie sa vie, et son or, entre les mains de l’Olmèque, ce qui semblait prouver qu’il avait pris le parti de lui accorder sa confiance.
L’Espagnol, ayant fini de donner ses ordres et de récupérer son arme, fit volte face et sortit de la cabine.


La Myrta et Le Nazaré accosteraient à Lizoa dans une vingtaine de minutes. Marinchè avait revêtu ses atours les plus nobles et s’était rendue directement à la cabine de la Comtesse. Elle y fut accueillie avec politesse et la missive qu’elle transmit lui permit de se voir accorder une audience privée avec La Lady. Celle-ci arborait une mise sombre, que Marinchè reconnu comme une tenue de deuil. La Comtesse devait avoir la quarantaine et avait une allure très altière mais pas condescendante comme c’était souvent le cas chez les aristocrates. Elle fit bonne impression à l’Inca qui se dit que des années loin des cours d’Europe lui avaient sans doute apporté simplicité et respect, ce qui faisait généralement cruellement défaut aux « grands » de ce monde.
La Comtesse de Messy invita Marinchè à s’assoir et leur fit servir du thé tandis que La Lady prit le temps de lire la missive.
-Ainsi donc, commença-elle, Don Mendoza envisage de lever l’ancre à bord du bateau pirate ?
-Oui Madame. Je ne sais quels ont été les mots exactes de Don Mendoza dans sa lettre, mais il m’a assuré de son fidèle contenu quant à la situation et il m’a chargée de rester à votre disposition afin de répondre à vos interrogations et de recueillir votre réponse.
La comtesse détourna un peu les yeux.
-Voilà qui nous bouscule quelque peu, admit-elle.
Et Marinchè décela une pointe d’amusement dans le propos de l’aristocrate. Cette dernière poursuivit.
-Don Mendoza signale également que son homme de main sera du voyage et qu’il a une totale foi en lui, poursuivit-elle. Quelles sont vos impressions à son propos ?
Marinchè se souvint qu’elle n’était censée être à bord que depuis quelques jours et choisit ses mots avec soin.
-Et bien, je le connais depuis peu, mais il m’a semblé être quelqu’un d’honnête et de droit. Une personne honorable.
L’aristocrate la gratifia d’un sourire un peu étrange.
-Il est vrai, dit-elle la voix teintée d’ironie, que vous n’êtes pas à bord depuis… longtemps.
L’Inca cru comprendre que la Comtesse n’était pas dupe quant à sa soi-disant captivité sur le bateau pirate, mais préféra ne pas relever, d’ici quelques heures, tout ça n’aurait plus aucune importance. Elle n’aurait su dire pourquoi, mais cette femme lui inspirait un étrange sentiment, un épais mystère l’enveloppant.
Consciente qu’ils étaient un peu pressés par les événements, l’aristocrate ôta ses gants et se leva, indiquant à Marinchè qu’il était temps de prendre congé.
-Voulez-vous que je revienne d’ici une petite heure afin de vous laisser un peu de temps pour prendre votre décision ? s’enquit l’Inca.
La Lady lui tendit la main dans un mouvement gracieux, paume vers le bas, invitant Marinchè à la lui prendre et à s’incliner. La belle Inca s’exécuta comme l’exigeait l’étiquette et quand elle releva les yeux, ce fut pour apercevoir une infinie compassion dans les yeux de la Comtesse.
-Ce ne sera pas nécessaire, lui assura-t-elle. Vous pouvez prévenir Don Mendoza que je suis heureuse de le suivre et d’avoir trouvé un homme d’aussi grande valeur entre les mains de qui remettre ma destinée.
Et sur ce, elle inclina la tête pour saluer son interlocutrice et lâcha sa main avec délicatesse.


Marinchè regagna le pont en hâte. Elle espérait pouvoir y trouver Le Navigateur afin de lui faire part de la bonne nouvelle. L’équipage des deux navires avait commencé les manœuvres d’approche dans la baie de Lizoa. La côte n’était plus qu’à une centaine de mètres. Jiménez donnait des ordres afin de positionner Le Nazaré de façon optimum pour leur départ et l’embarquement des marchandises. A la proue de La Myrta, Le Capitaine Diaz et Mendoza devisaient comme si de rien n’était et l’Inca ne put s’approcher. Aussi attendit-elle de croiser le regard de l’Espagnol à la dérobée pour lui faire comprendre, que pour La Comtesse, l’affaire était entendue. Le Navigateur lui sourit discrètement, satisfait, tandis que ce rapace de Diaz s’extasiait sur la profusion de marchandises que le Comptoir recélait, ravi par les perspectives de bénéfices que ça augurait.
La Myrta fut appontée à une sorte de petit débarcadère tandis que Le Nazaré avait jeté l’ancre, côté large, en parallèle à la nef. De cette façon, la caravelle n’aurait pratiquement aucune manœuvre à exécuter pour reprendre rapidement la mer. Et Mendoza reconnu là l’esprit pratique de son collègue.
« Bien vu. »

Marinchè rejoignit Calmèque un peu plus loin, qui attendait que Le Navigateur, Le Capitaine et le gros de l’équipage ne quittent le navire pour commencer les tractations avec Jiménez et les marins sélectionnés par ce dernier. Les choses allaient rapidement bouger.
-Alors ? demanda-t-il à l’approche de l’Inca.
-C’est dans la poche pour l’aristo.
-Elle n’a plus peur de moi ? s’étonna Calmèque.
-Il faut croire que non…
Et elle lui offrit un sourire complice qu’il reçu avec plaisir.

Mendoza et Diaz mirent pied à terre et, accompagnés de quatre hommes, ils disparurent, happés par la foule multicolore du Comptoir. Calmèque fronça les sourcils, il n’aimait pas trop l’idée que Mendoza soit en nette infériorité numérique, même si Diaz ne lui ferait aucun mal tant que la caravelle n’aurait pas trouvé preneur. Mais l’heure n’était pas à ces réflexions, ils avaient du pain sur la planche et Mendoza était loin de ne pas savoir se défendre le cas échéant. Et c’est en s’efforçant de penser à autre-chose que Calmèque se rendit à bord du Nazaré où l’attendait Jiménez. Celui-ci, dont l’expression du visage paraissait ne jamais connaître de changement, lui tendit une poignée de main franche et solide.
-Eugénio Jiménez Carcaño, mais tu peux m’appeler Jiménez, fit le marin en guise de présentation.
-Calhayan Mek-Enzi, mais on m’appelle Calmèque, répondit l’autre afin d’équilibrer les politesses.
Jiménez acquiesça de la tête en signe s’approbation avant d’en venir aux faits.
-Mendoza m’a dit que tu apporterais de quoi apaiser les craintes de nos hommes.
-J’ai ce qu’il faut, fit Calmèque en sortant la bourse.
-Très bien. J’ai sélectionné une trentaine de bons marins. Des gars qui connaissent leur boulot et qui sont pas des tire-aux-flanc. La plupart, se méfiant de Diaz depuis le début, sont bien contents de ce retournement de situation, mais la preuve d’un salaire honnête est toujours l’assurance de se fidéliser un équipage.
L’Olmèque approuva silencieusement.
-Quelle solde leur as-tu promise ?
-Deux pièces d’or, une de suite et une à l’arrivée. C’est un peu trop bien payé, mais c’est le prix de la sécurité.
Cela représentait soixantes pièces d’or pour le salaire le l’équipage. La bourse en contenant plus de deux cent, Calmèque en conclut que le prix était honnête et que Mendoza ne s’était pas attendu à moins.
-Parfait.
Le petit homme sortit trente pièces de la bourse et les tendit à l’ancien Second du Capitaine.
Ce dernier les compta rapidement et en rendit une à l’Olmèque.
-J’ai dit une trentaine, mais en fait ils sont vingt-neuf, lui avoua-t-il.
Calmèque lui sourit et adjoignit à cette pièce vingt-huit autres avant de les tendre à nouveau à Jiménez.
-Il est préférable que nos hommes n’aient qu’un seul interlocuteur pour chaque chose. Et tu me sembles le mieux placé pour leur salaire puisque c’est toi qui les a engagés. De cette sorte, ça évite tous risques de confusions futures.
De par ce geste, Calmèque savait qu’il courait le risque de voir décamper Jiménez avec l’argent de tout l’équipage dès qu’il en aurait l’occasion. Mais ça voulait aussi dire au Second qu’il lui accordait foi, ce qui eut pour effet de sceller entre eux une sorte de respect mutuel. Et Jiménez qui était un homme droit, apprécia particulièrement cette marque de confiance. Passant à un autre sujet, Calmèque l’interrogea sur l’état des réserves de vivres et Jiménez lui assura qu’il y avait de quoi largement terminer la traversée avec un équipage aussi réduit, surtout depuis qu’ils y avaient ajouté les réserves du Nazaré. Calmèque réfléchit un moment et estima malgré tout qu’il était préférable de stocker de quoi parer à d’éventuels imprévus. Il trouvait d’ailleurs que les réserves du navire manquaient cruellement de quelques produits de première nécessité. Aussi prit-il congé de Jiménez, pour faire le point.

La cuisine était aussi propre qu’on pouvait l’espérer dans les conditions qui étaient les leurs et il trouva le cuistot occupé à couper quelques tranches d’aliments fumés en sifflotant.
-Ortega, lança-t-il. Que dirais-tu d’un meilleur salaire et de moins de travail ?
Le cuisinier ventripotent accueillit les propos du petit « homme étrange » avec sa bonhomie habituelle et se fendit d’un sourire.
-Qu’est-ce que tu me chantes ?
-Un refrain sympathique, plaisanta Calmèque, mais avec un certain aplomb, laissant entendre que la plaisanterie n’en était pas vraiment une.
La curiosité du cuisinier piquée au vif lui fit arquer les sourcils, invitant son interlocuteur à en dire d’avantage.
Calmèque exposa la situation dans les grandes lignes à Ortega qui au fur et à mesure du récit prenait un air de plus en plus enjoué. Et en guise de conclusion, l’Olmèque exhiba deux pièces d’or.
-Et deux autres à la fin du voyage.
Ortega se mit à rire de bonheur.
-C’est un plaisir de faire affaire avec toi, « Le Bizarre ». Je t’aime bien !
Et le cuistot se saisit de l’argent.
-On lève l’ancre dans deux heures tout au plus, informa Calmèque.
-Aucun problème ! J’emballe mes ustensiles de suite !
-J’avais une question. A-t-on du sucre ou du miel à bord ?
-Un peu de miel, oui.
-Du thym ou des clous de girofle ?
-Non. Mais j’ai du basilic et de la cannelle, répondit le cuisinier sans comprendre où l’Olmèque voulait en venir.
-Du sel ? continua l’autre.
-Oui, de quoi préparer des salaisons de poisson si nous devions pêcher, assura Ortega.
-Peux-tu, quand tu auras transvasé tes affaires, faire un rapide inventaire de nos réserves afin de savoir de quoi nous disposons et ce qu’il serait judicieux de se procurer en plus.
Ortega fit oui de la tête.
-Je vais t’envoyer quelqu’un pour t’aider. Rends-toi à terre. Achète ce qui te semble manquer, rajoute ce dont je t’ai parlé et fais embarquer le double de la quantité d’eau potable que nous possédons déjà.
-On prend pas le vin ? s’inquiéta le cuisinier.
-Si, s’amusa Calmèque, ne t’inquiète pas ! Prends autant de vin que tu veux, mais il y a quantité de choses qu’ on peut faire avec de l’eau et qu’on ne peut pas faire avec du vin !
-Ah bon… fit le cuisinier médusé et peu convaincu. Si tu le dis…

Quand il fut sur le pont, Calmèque constata avec plaisir que le transport des marchandises et autres affaires avaient déjà commencé entre les deux navires. Et il partit retrouver Jiménez occupé à orchestrer ce va et vient.
-Je me disais un truc, commença Calmèque.
L’autre se tourna vers lui, attendant qu’il poursuive.
-Nous partirons avec de l’avance et notre navire est plus rapide, mais au cas où nous nous ferions rattraper malgré tout, ne faudrait-il pas s’assurer de délester La Myrta de son arsenal ?
Cette possibilité était assez improbable, d’autant que Diaz devrait d’abord retrouver un nouveau navigateur avant de pouvoir les courser, mais parer à l’imprévisible était toujours préférable.
Jiménez fit la grimace.
-Transporter les canons serait trop long, lâcha-t-il simplement.
-Dans ce cas, il serait peut-être judicieux d’envoyer les boulets et la poudre par le fond. Des canons sans ces deux éléments sont d’une utilité toute relative, ironisa l’Olmèque.
Jiménez l’observa un court instant, impossible de savoir ce qui se passait dans la tête de cet homme inexpressif.
-Bonne idée, finit-il pas admettre. Je vais envoyer deux hommes s’occuper de ça.
-Autre chose, fit Calmèque. J’ai débauché Ortega, le cuisinier et j’ai promis de lui envoyer un gars pour l’aider à acheter quelques provisions complémentaires.
-Andrés, lui répondit le marin qui semblait lire dans les pensés du petit homme. C’est un gamin qui bosse dure et qui ne rêve que de quitter sa condition de mousse. Un brave gosse. Tu peux lui confier cette tâche et l’argent nécessaire aux achats. Aucun risque qu’il ne nous fasse faux bond, assura-t-il.
Jiménez fit un tour sur lui-même afin de localiser le jeune homme.
-Il est là, fit-il en pointant du doigt un garçon qui ne devait pas avoir vingt ans.
Le jeune gaillard ne ménageait pas sa peine et acceptait avec patience, quolibets et reproches de ses ainés. Les mousses étaient souvent les mandailles des matelots confirmés. C’était ainsi. Tous les marins commençaient par là. Un passage obligé au bas de l’échelle. Histoire de faire ses preuves. Et le gamin « en voulait », à n’en pas douter. Calmèque le héla et le mousse vint à sa rencontre sur le champ.
-Monsieur ?
Tient donc, une bourse bien remplie et on passe de « créature » à « Monsieur » se dit Calmèque. Ce revirement l’amusa.
-Tu sais lire et écrire ? interrogea l’Olmèque.
Le jeune homme baissa la tête en signe de déception et avoua tristement que non.
-Pas grave, le rassura Calmèque. Tu as une bonne mémoire ?
-Oh ça oui Monsieur ! se ragaillardit-il.
-Parfait ! J’ai une mission pour toi.
Une expression de fierté se mit à briller dans les yeux du mousse et Calmèque lui expliqua ce qu’il attendait de lui.

Une heure plus tard, il tomba sur Marinchè qui donnait un coup de main aux dames de compagnie de la Comtesse pour transbahuter ses effets.
-Marinchè ! Tu tombes bien… J’ai un petit service à te demander.
Et l’Olmèque joignit les mains en une parodie de prière.
-Mais épargne-moi tes sous-entendus, s’il te plait.
Si Calmèque commençait en ces termes, ça voulait dire que ça allait plaire à l’Inca et elle savoura l’instant à l’avance.
-Essaye de trouver la musicienne et demande-lui de venir…, demanda-t-il.
-Tiens donc…, se récréa-t-elle.
Il fit mine de ne pas relever sa réplique lourde de sens.
-S’-il-te-plaît…, articula-t-il en détachant chacune de ses syllabes. Si c’est moi qui demande, elle refusera.
-Qu’est-ce qui te fait croire ça ?
Il pointa sa propre tête avec une expression d’évidence en guise de réponse.
-Qu’est-ce que j’y gagne, moi ? le taquina-t-elle.
-Ce que tu veux !
La belle Inca se fendit d’un sourire victorieux et l’Olmèque sentit qu’il aurait mieux fait de se taire.
-Tu me laisses dormir avec toi durant deux semaines, lâcha-t-elle.
-Hors de question ! s’opposa catégoriquement l’Olmèque.
-Trois, se contenta-t-elle de rétorquer.
-Mais non ! s’indigna-t-il, ahuri qu’elle puisse insister.
-Quatre, lui dit-elle presque en chuchotant avec une pointe de sadisme feint.
-On peut savoir où t’as appris à marchander ? lui demanda-t-il, outré.
-Oh mais je ne marchande pas, c’est moi qui ai toutes les cartes en mains, fit-elle, le sourire en coin.
Les yeux de l’Olmèque s’étrécirent et il inspira bruyamment. Il venait de se faire rouler dans la farine.
-T’as de la chance que j’ai pas le temps d’ergoter, fit-il pour sauver les apparences.
Et il lui colla la bourse dans les mains.
-Planque ça !
Et il tourna les talons, visiblement pressé.

Les matelots finissaient d’embarquer les marchandises dans le ventre de la caravelle sous les yeux attentifs de Jiménez et Calmèque. Le soleil commençait à entrer dans sa phase descendante et l’Olmèque sut que le début d’après-midi avait sonné. Mendoza ne devait plus trop tarder, il avait été convenu qu’il prétexterait, après son repas à terre avec Diaz, de vouloir regagner La Myrta pour une raison ou une autre. Au loin, Calmèque aperçu Ortega et Andrés qui revenaient de leurs courses et qui faisaient signe à quelques marins de venir leur prêter mains fortes afin de monter les nouvelles denrées à bord. Tout se passait comme prévu. A part l’absence du Navigateur.
Scrutant la foule qui arpentait les quais de Lizoa, Calmèque redoutait de voir à tout moment quelqu’un qui se rendrait compte de ce qui se tramait à bord des deux vaisseaux et qui donnerait l’alerte. Il valait mieux ne plus trop traîner, l’effervescence avait déjà capté l’attention de pas mal de badauds.
Il hésitait… « Attendre encore un peu ? »
Quelques minutes s’égrainèrent encore. Brusquement, il sauta à bas du pont pour gagner la passerelle, décidé à aller voir ce qui retardait l’Espagnol, mais il fut coupé dans son hélant par la voix de Jiménez.
-Où vas-tu ?
-M’assurer qu’on va récupérer Mendoza en un seul morceau, répondit-il en haussant la voix pour que l’autre l’entende au-dessus du bruit ambiant.
Calmèque le vit se retourner et donner quelques ordres rapides avant de le rejoindre en hâte.
-On ne sera pas trop de deux si ça tourne mal, assura-t-il.

Le Comptoir était comme une respiration tourbillonnante, une débauche de couleurs, d’odeurs de cris, de musiques à faire tourner la tête. Des chalands, des acheteurs, des brigands, des curieux, des curés, des bonnes-sœurs, des putains et des chiens,… une vraie cours des miracles. Mais surtout, ça faisait bizarre de remettre les pieds à terre, étrangement, durant les premières minutes, il sembla à Calmèque que le sol était bien trop dur et qu’il tanguait. Et cette curieuse impression lui fila une sorte de « mal de terre » de courte durée. Jiménez comprit, à l’expression de l’Olmèque, ce qui se passait et il lui assura que c’était normal après un long séjour en mer. Il fallait que ses sens et son équilibre se réhabituent à ne pas compenser le roulis du bateau.
-Ca te le fait pas à toi ? interrogea le petit homme un peu dérouté.
-Si, mais moi j’ai l’habitude, fit l’autre.
Au bout de dix minutes, après avoir emprunter nombre de ruelles en se demandant s’ils ne les avaient pas déjà prises, ils comprirent que retrouver Mendoza dans ce tableau impressionniste, serait comme de retrouver une aiguille dans une botte de foin. Calmèque fit un signe à son camarade en désignant le toit des petites maisons qui bordaient les rues tortueuses. Des bâtisses à l’architecture aussi chaotique qu’improbable qui offrait des appuis faciles pour l’escalade.
-On va passer par-là, on se repèrera mieux et si nécessaire, on ne nous verra pas arriver.
L’Espagnol eut un bref mouvement de tête positif avant de se lancer avec énergie à l’assaut de la façade à sa droite. A coté de lui, il vit Calmèque grimper et se hisser sur le sommet de la bâtisse avec une facilité déconcertante.
Sur le dernier mètre, le pied de Jiménez glissa de son appui et il faillit retomber deux étages plus bas. Mais il se rattrapa de justesse et aidé de l’Olmèque, il parvint à destination de façon un peu moins élégante que son compagnon, mais à destination quand-même.
-Mais t’as du sang de chat dans les veines, s’exclama l’Espagnol.
Calmèque rit en aidant Jiménez à se redresser.
-On discutera de mes origines plus tard.
Une fois sur les toits, ils réalisèrent que l’île était bien moins grande qu’il n’y paraissait.
Ils passèrent de gouttières en gouttières, de terrasses en balcons et au bout d’un quart d’heure, ils finirent par repérer les six hommes au détour d’une ruelle en contrebas. Apparemment Mendoza n’était pas parvenu à leur fausser compagnie comme prévu.
-Qu’est-ce qu’on fait ? s’enquit Jiménez afin d’avoir l’avis de l’Olmèque. On les suit et on attend de voir ?
-Je sais pas, admit l’autre. A trop attendre, on court le risque de se faire repérer et de perdre notre avantage. J’aimerais autant qu’on puisse lever l’ancre au plus vite.
Jiménez, décidément avare de mots, mima une intervention musclée de leur part afin de tirer Le Navigateur de ce mauvais pas et Calmèque ne put qu’acquiescer, il ne voyait pas d’autres solutions. Ils eurent alors tout deux la même préoccupation, s’assurer que le soleil ne projetterait pas leurs ombres sur le sol, trahissant leur position, mais par chance, l’astre leur faisait face et ne représentait aucun danger.
-Bon bah, fit Jiménez, je prends les deux qui sont le long des façades, et toi le félin, tu sauteras plus loin, ironisa-t-il.
Calmèque lui lança un regard goguenard. Ce Jiménez lui plaisait bien.
- « Miaou » , fit-il en guise d’approbation.
« Voilà qui était clair… » Et les deux compères se sourirent avant de s’élancer. Jiménez se laissa tomber sur ses deux gus en premier et égorgea l’un d’eux sans lui laisser la moindre chance de réaliser, le second, reprenant ses esprits en se relevant, dégaina son arme mais pas assez vite que pour éviter la lame de Mendoza qui avait chargé dans la seconde avec une rapidité hors du commun. Diaz blêmit en voyant son Second les attaquer et lança à l’attention des ses deux hommes encore debout quelques ordres lamentables. Les deux bonshommes se ruèrent sur Jiménez et Mendoza au moment où Diaz prenait nos amis en joue avec un pistolet. Le Capitaine ricana, sûre de son coup, « planqué » qu’il était derrière son arme à feu et il ne vit pas arriver le premier coup de l’Olmèque qui lui brisa un genou et le deuxième qui lui retourna le poignet dans un bruit sec. L’homme hurla de douleur en s’effondrant sur le sol tandis que les deux navigateurs en finissaient sans difficulté avec les derniers hommes de main du félon.
Calmèque, qui avait récupéré le pistolet, tenait à présent Diaz en respect, le canon collé sur la tempe et il eut un regard en direction de Mendoza afin d’avoir son assentiment.
« On le liquide ou pas ? »
Le visage de Mendoza resta fermé, regardant le méprisable individu trembler de peur à ses pieds en se tenant la main. Les passants désireux de ne pas avoir d’ennuis avaient fui les lieux comme une traîner d’huile et il faisait étrangement calme. Le Navigateur se pencha vers le visage du Capitaine, l’air peu commode, l’obligeant à baisser les yeux. Sa voix se fit rauque, presque chuchotante, mais le ton n’en fut pas moins coupant et glacial.
-Si je te retrouve sur mon chemin, sale chien, je prendrai plaisir à t’étriper moi-même.
Diaz gémit pitoyablement et les trois hommes virent son entrejambe s’assombrir. Il venait de se « faire dessus ».
Le message semblait être passé.
Mendoza se redressa et il se détourna avec cette dignité qui lui était propre.
Il se fit emboîter le pas sans un mot par Jiménez tandis que Calmèque fermait la marche en pointant toujours l’arme sur le triste sire. Quand les deux autres furent assez loin, et qu’il estima que tout danger était écarté, il désamorça le pistolet et le glissa à sa ceinture avant de les rejoindre et de disparaître tous trois en direction du débarcadère.
Doucement les badauds réapparurent, les bruits et les clameurs avec eux, la scène disparut sous la multitude et bientôt tout serait oublié jusqu’au prochain règlement de compte. Ici, c’était monnaie courante.
Quand les trois hommes montèrent à bord du Nazaré, ils furent accueillir avec joie par un équipage prêt à appareiller et pressé d’en découdre avec l’océan sous les ordres de leur nouveau Capitaine.
La logique aurait voulu que ce soit Jiménez qui assume ce rôle, mais la prestance naturelle de Mendoza lui imposa cette nouvelle fonction comme une évidence et personne n’y trouva à redire. Le Navigateur était respecté, chacun connaissait sa valeur et il inspirait confiance. Aussi, quand il prit la barre et lança l’ordre de lever l’ancre, tout le monde s’activa de bon cœur et l’Espagnol, le sourire aux lèvres, se réjouit de cette aventure qui prenait une direction toute imprévue.
Près de l’escalier qui menait à la dizaine de petites cabines que comptait la caravelle, Calmèque reconnu la belle Inca, toujours revêtue de ses plus beaux atours et qui regardait avec plaisir le Nazaré quitter le port de Lizoa, la totalité de ses voiles latines offerte au vent et prenant rapidement de la vitesse. La mine sereine, elle se tourna vers Calmèque et lui adressa un signe élégant de la main l’enjoignant à venir la retrouver. Le petit homme jeta un œil à la chorégraphie bien huilée qu’exécutaient les matelots sur le pont, ajustant les cordages, vérifiant les gréements, montant aux sommets des mâts,… sous les yeux des deux marins expérimentés. Et il comprit que sa présence était devenue obsolète. Du coup, il fut surpris quand quelqu’un lui tira poliment la manche par derrière. Il se retourna. C’était le petit mousse, Andrés, dont les yeux étaient emplis de fierté.
-J’ai trouvé les aliments spéciaux que vous vouliez Monsieur et tout a été chargé et entreposé selon vos ordres.
Cette nouvelle acheva de le mettre de bonne humeur et quand le jeune homme lui remit l’excédant d’argent, l’Olmèque le salua avec reconnaissance ce qui eut pour effet de visser sur le visage du mousse, un sourire qui faisait plaisir à voir. Le gamin s’en fut, fier comme un paon, non sans avoir salué quantité de fois celui qui lui avait accordé sa première mission d’importance.
Calmèque se rendit ensuite auprès de la brune d’un pas nonchalant.
-Je nous ai réservé la cabine avec le lit le plus large, commença-t-elle. Mais je dois t’avouer que ça reste étroit…
Calmèque en déduisit que la musicienne avait accepté, sans quoi, il n’aurait pas à honorer « sa part nocturne » du marcher et ça lui fit plaisir. Se résoudre à laisser derrière lui une telle musicienne et un instrument aussi incroyable aurait été criminel. Et mis à part le fait que l’Inca allait lui voler la moitié de son espace de repos pendant une durée qu’il se promettait de renégocier à la première occasion, ce nouveau départ commençait on ne peut mieux.
A l’autre bout du pont, Jiménez finissait de surveiller le déploiement de la petite voile de proue située sur le mât de beaupré tout en rejoignant son collègue et désormais Capitaine.
Quant il fut à sa hauteur, il pointa son visage aride en direction de l’Olmèque qui se trouvait de l’autre côté, près du château arrière.
-Où Diable as-tu pêché ce curieux personnage, Mendoza ?
Le Navigateur laissa s’esquisser un léger sourire au coin de ses lèvres et pour la première fois, il se félicita intérieurement de ne pas avoir laissé l’Olmèque finir ses jours sous les coups d’Ibañez à Lima.
-Ca, fit-il, c’est une longue histoire Jiménez… une bien longue histoire…
Modifié en dernier par Anza le 08 juin 2021, 11:51, modifié 2 fois.
8) Fane absolue de la 1ère saison, certes imparfaite, mais avec tant de qualités qu'on peut lui passer beaucoup de choses !
Perso préféré : Calmèque, cherchez pas, mon psy a jeté l'éponge ! MDR

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