Re: [FANFIC - SPOILERS SAISON 4] : UNE SUITE POTENTIELLE (Marcowinch)
Posté : 24 avr. 2021, 20:57
La 8e Cité
Chapitre XIV : Les Terribles Esprits
Sur le Lac Lamou. Début d'après midi.
Les amis se sont dispersés aux quatre coins de l'embarcation conçue par Tao, afin de répartir leurs poids et limiter le risque que la couche de glace ne cède. Ils se sont ainsi engagés dans une sorte de détroit formé entre l'extrémité du lac proche du camp des évenques et le rivage sud-ouest de l'archipel. Ayant déjà parcouru plusieurs kilomètres et continuant de glisser, ils sont déjà arrivés à la moitié de la banquise et leur but leur paraît tout proche à présent. Ils observent l'île, profitant que leur position leur en offre une bonne vue d'ensemble. Cet endroit est très étrange car ils comporte différents paysages : ils aperçoivent des criques et des falaises, mais aussi un peu plus loin des collines de conifères et d'un autre côté des dunes et des rochers de marbre.
Rompant le silence régnant sur l'embarcation, la chasseresse indique aux amis une forme au loin : la plus grande colline visible : « l'Obo où nous devons placer les offrandes de mon peuple se trouve au sommet de ce monticule. » Puis s'adressant à l'ancien naacal, elle ajoute : « nous y serons rapidement. Ton invention est remarquable, Tao ! Tu es très intelligent !
- Merci, Kushi, répond le jeune prince en se grattant la tête, mais pas peu fier. Enfin quelqu'un qui remarque mes talents ! Ahah ! Enfin, se dépêche-t-il d'ajouter : quelqu'un d'autre qu'Indali ! » L'intéressée sourit.
« Gamin, ajoute Gaspard, je dois reconnaître que tu m'impressionnes encore. » Puis, se tournant vers sa nouvelle amie, il poursuit : « il faudra que je te raconte tout ce que nous avons vécu les gamins et moi, ainsi que Mendoza et les autres, bien sûr. C'est une longue histoire, mais tu seras très surprise...
- Gaspard, le taquine le navigateur, je ne t'ai jamais connu aussi bavard ! Quelque chose aurait-il changé récemment ? » Tous, sauf le maître d'armes et la chasseresse, rient à la remarque, ayant bien compris les nouveaux sentiments unissant ces derniers. « N'en profites pas en tous cas pour t'arrêter de tourner cette satanée manivelle!
- Oui, Gaspard, ajoute Pedro : c'est mou là-dedans ! Tournes-là plus vite, vieille baderne, qu'on sorte de ce rafiot ! Je serai plus tranquille sur terre que sur cette fichue glace...Elle ne m'inspire pas confiance.
- Plus tranquille sur terre ? C'est un marin qui dit cela ? Hihihi» se moque Zia. Pedro se renfrogne un peu.
« Kushi, conseille Esteban en la regardant : ne fais pas trop de compliments à Tao, s'il te plaît : sinon, on ne va pas arrêter d'en entendre parler ! Car Môssieur est un Grand Inventeur du Peuple de Mû ! ajoute-t-il malicieux et levant les yeux au ciel.
- Souvenez-vous de l'honneur de Mû ! ajoute Pichu en babillant et tournoyant au dessus du Fils du Soleil.
- Mais de quoi parles-tu, Esteban ? demande Kushi au jeune garçon. Et que dit cet oiseau ? Et déjà : est-il normal qu'il parle, d'ailleurs ?
- Ahah, oui, c'est un perroquet, explique Zia. Tu n'en avais sans doute jamais vu avant. Pour répondre à ta question, Tao et moi, nous sommes originaires du peuple de Mû.
- Un peuple très ancien et légendaire ! précise l'ancien naacal, s'enthousiasmant. Et j'en suis le dernier Prince en date ! »
La chasseresse ne comprend vraiment pas grand chose à tout ce verbiage, mais ces enfants lui semblent sincères et savoir ce qu'ils font. Elle s'accommode donc du manque d'explications pour le moment...
« Et Esteban ? demande-t-elle toutefois. Lui aussi vient du même peuple que vous deux ?
- Oh, lui ? le taquine Tao. Non : ce n'est qu'un atlante ! Nul n'est parfait !
- Ah oui, c'est comme ça ? réplique Esteban, qui n'est pas dupe du fait que son ami ne fait que plaisanter. Attends qu'on arrive sur l'île ! Tu vas voir la correction qu'il va te passer, l'atlante ! Ahah !»
Revenant à des choses plus sérieuses, Zia demande à l'évenque : « Kushi, peux-tu nous en dire plus sur la sorcière évoquée par Temujin ?
- Non, malheureusement, seul mon chaman l'a déjà rencontrée quand il vient sur l'île pour rendre hommage à ses prédécesseurs, dont les dépouilles ont été incinérées près du cairn. Temujin m'a emmenée une fois sur ce lieu, quelques années à peine après ma naissance, pour me donner mon nom de clan. Je n'ai rien remarqué d'anormal à cette époque, mais j'étais très jeune et très peu attentive.
- En tous cas, les prévient Mendoza, nous allons devoir être particulièrement prudents, désormais : si les ennemis mentionnés par Byzas se trouvent ici, peut être nous ont-ils déjà repérés... »
Laguerra acquiesce. La bretteuse évite toutefois de croiser le regard de son bien-aimé, car elle ne sait pas encore comment lui annoncer la nouvelle qu'elle lui cache. La perspective d'un changement d'une telle ampleur dans sa vie la paralyse quelque peu. Elle craint aussi de ne plus pouvoir se battre comme elle le devrait si besoin et redoute que cela ne compromette leur mission.
Au bout d'une heure de navigation supplémentaire, guidés par Kushi, les compagnons atteignent l'île et accostent dans une petite crique. Ils mettent leur embarcation à l'abri sur la berge, puis prennent avec eux un sac de matériel de campement et les sacs d'offrandes des évenques. Ils longent la crique en direction de l'est, la chasseresse leur montrant un sentier montant à flanc de falaise et sur lequel ils s'engagent. Bien que ce soit le début de l'après midi, ce chemin est encore à demi-noyé dans la brume et il s'avère assez étroit. Ils doivent donc faire attention à ne pas glisser, ce qui les ferait tomber à coup sûr dans le lac gelé. La tâche n'est pas simple car ils sont tous chargés. Bien que la hauteur de la falaise ne soit pas si élevée que cela, Esteban n'est pas non plus à son aise... Le passage est bordé de poteaux garnis chacun d’une multitude de rubans colorés. Les morceaux de tissu ballottent à chaque souffle de vent.
« Ce sont des totems...Ils marquent l'entrée du domaine des esprits », leur dit Kushi, devançant ainsi une question de Tao. « En avançant, poursuit-elle, il faut leur rendre hommage...Nouez à chacun de ces poteaux un des rubans que les miens ont mis dans les sacs. » Ne voulant ni vexer la chasseresse, ni d'éventuelles puissances surnaturelles, les compagnons s'exécutent. Esteban, Zia et Tao attachent consciencieusement les petits rubans colorés autour des piquets. Continuant ensuite leur ascension, ils arrivent dans une petite forêt emplie de mélèzes. Ils la traversent puis, très vite, atteignent une zone parsemée de collines. Ils aperçoivent la plus haute de celles-ci et entreprennent son ascension.
« Qu'est ce ça monte ! Pfff ! » se plaint Pedro, épongeant de sa manche la sueur coulant déjà de son front alors qu'ils n'ont grimpé que quelques mètres...
« Pour ça, oui ! Pfff ! » confirme Sancho en se tenant les reins. « Ces ci..ci.cici..Cités d'Or, il faut toujours que ce soit dans des endroits ina..inaca.inacess..inacib..difficiles à atteindre !
- C'est sans doute pour ça que personne ne veut y rester, dans ces cités ! ajoute Pedro. Ca et aussi le fait qu'elles se replient d'un coup et vous aplatissent dès qu'on touche à quelque chose...
- Gardez votre souffle et arrêtez de vous plaindre, vous deux, c'est un ordre ! Les gronde Mendoza.
- Eh, mais, Mendoza, t'es plus notre capitaine, maintenant ! Tu te souviens ? Tu nous a donné congé il y a plus d'un an ! On n'a plus à suivre tes ordres ! dit Pedro, faisant exagérement semblant de se rebiffer.
- Ca c'est bien vrai ! complète Sancho. Je..jetez l'ancre ! Carguez les voiles, ki.kiki..kikiki.. qu'y disait ! A peine un an tranquilles et hop, nous v'là à l'aut' bout du monde, dans l'froid, chargés de sacs, à gravir des montagnes et avec Zarès et un gamin fou derrière nous ! »
Mendoza se prend le front d'une main, ferme les yeux un instant et soupire. Puis, il fait comme s'il n'avait rien entendu et poursuit son ascension. En milieu d'après midi, les compagnons atteignent finalement le cairn désigné par Kushi. Il s'agit d'un simple monticule de pierres.
Suivant les instructions de l'évenque, tous posent leurs sacs et les ouvrent. Ils déposent au pied de la structure les différentes offrandes : des victuailles, mais aussi quelques petites peaux de bêtes et des objets réalisés à la main, tels que des poteries ou sculptures en bois à l'effigie d'animaux. Kushi leur indique comment bien placer ces dons, pour rendre hommage aux esprits. Esteban, Tao, Indali et Zia suivent à la lettre ses recommandations, sous l'oeil curieux d'Athanaos. Tandis qu'ils procèdent, Sancho et Pedro se reposent, s'allongeant à même le sol comme s'ils venaient d'accomplir un exploit. Mendoza reste vigilant, surveillant les alentours. Le navigateur souhaiterait tout de même prendre Laguerra dans ses bras un instant mais la bretteuse s'éclipse prestement, allant à son tour participer au dépôt des offrandes. Gaspard, n'ayant rien de mieux à faire pour le moment, décide de participer lui aussi au rituel.
Esteban, passant par hasard sa tête entre les parois du cairn remarque soudain quelque chose de curieux : des inscriptions gravées... Il croit reconnaître là quelques signes atlantes, mais ses connaissances sont encore beaucoup trop rudimentaires pour qu'il en soit sûr. Il signale alors ce qu'il a vu à Tao, Indali et Zia. L'endroit est toutefois exigu et les enfants se cognent la tête en se précipitant tous en même temps pour voir de quoi il retourne. Ils se massent la tête puis, Tao ayant le plus d'expérience sur le sujet, les autres le laissent voir en premier. Le cairn n'étant ni très haut ni très large, l'ancien naacal est obligé de se contorsionner pour finalement se mettre sur le dos, sous les pierres. Il parcourt de son index les inscriptions...
Il reste allongé un long moment, se grattant la tête, prenant parfois son encyclopédie. Puis, finalement, il sort et se relève en se massant le dos. « Même si les traits des idéogrammes y ressemblent un peu, dit-il à Esteban, ce n'est ni de l'atlante, ni du muen ! Je n'ai jamais vu cette langue...
- C'est très bizarre ! déclare Esteban.
- Oui, confirme Indali qui plaisante ensuite : une langue que Tao ne connaît pas, je ne croyais pas cela possible !
- En faisant des recoupements et par déduction, je pense tout de même avoir déchiffré quelques syllabes : Sin...Tash..Ta..
- Sin..tash..ta ? Qu'est ce que ça veut dire ? lui demande Esteban
- Comment veux-tu que je le sache ? s'agace Tao. C'est pas si simple que tu crois ! »
Mendoza hausse les épaules : « ce n'est pas important dans l'immédiat, Tao : la carte de Byzas n'indiquait pas cet endroit-ci, mais un emplacement situé plus au nord ouest. Nous allons devoir marcher encore plusieurs heures...
- Nous devrions nous dépêcher, suggère Laguerra : le soleil va bientôt décliner...
- J'ai décidé de venir avec vous ! leur annonce Kushi. Si comme l'a suggéré Esteban la sorcière qui règne sur l'île est une usurpatrice, je veux en avoir le cœur net, pour prévenir les miens. »
Laguerra acquiesce, se réjouissant de la décision de la chasseresse puis ajoute, un brin espiègle : « et puis, ce serait dommage que tu te sépares d'un si bel homme tel que Gaspard ! »
Kushi prend la remarque au premier degré et approuve, sans gêne aucune.
Les autres compagnons sourient, même Gaspard, qui prend un air béat. Ils continuent alors leur route...
Machine Olmèque d'Ambrosius. Fin d'après midi.
Cela fait deux jours déjà que la machine stationne au même endroit. A l'intérieur Ivan et ses troupes, enfin surtout Ivan, s'agitent... Zarès aussi est nerveux : l'attente lui semble longue et il craint d'être passé à côté de quelque chose d'important... Il n'arrive plus non plus à supporter les jérémiades continuelles du Prince. Il fait sortir tout le monde de la machine, en sort, referme la porte et la verrouille.
« Attendez-moi là ! ordonne-t-il de sa voix caverneuse. Je vais vérifier quelque chose. Ce sera vite fait... »
Il se met en marche vers la localisation du condor, telle qu'indiquée sur l'écran du poste de commande de la machine. L'alchimiste pourrait utiliser sa prodigieuse vitesse pour atteindre sa destination mais choisit de ne rien en faire, pour ne pas risquer de se faire remarquer d'Esteban et ses amis dans le cas où ils seraient proches de l'appareil. Après quelques minutes, il s'approche du lieu recherché, qu'il distingue au loin, mais n'y voit pas l'oiseau d'or !
«Qu'est ce que cela signifie ? S'étonne t-il. Ou sont-ils ? Il est impossible que le condor se soit posé là ! Ce n'est pas un espace à découvert, ni même assez large. »
Ayant le détestable sentiment d'avoir été joué, Zarès fait fi de la discrétion et se rue à l'emplacement exact. Fouillant les environs, il aperçoit alors la pierre lancée par Zia et comportant toujours son dispositif de pistage émettant le signal. « Nooon ! Il n'ont pas pu m'échapper ! Pas encore ! » dit-il de rage, sa terrible voix faisant s'enfuir tous les animaux présents sur plus d'une centaine de mètres à la ronde. L'alchimiste reprend l'émetteur et pulvérise la pierre sans effort, rien qu'en serrant les doigts.
« Mais comment ont-ils su que je les suivais ? se demande-t-il. Et comment ont-ils pu me berner avec cette pierre ? La déplacer sur une telle distance et aussi vite ? » Il réfléchit intensément et, s'il ne voit pas de réponse à sa première question, identifie celle de la seconde : « La couronne de Sûndagatt ! Ou bien Zia ! Bien sûr ! Elle s'est déjà servie de son pouvoir contre moi ! Si c'est elle qui a fait cela, sa capacité semble être devenue encore plus puissante...Il faudra que je m'occupe d'elle en premier lieu. Il faut que je les retrouve ! »
Il retourne rapidement à la machine, y fait embarquer tout le monde, moscovites, prince et apprenti et fait décoller la Machine Olmèque. Il envisage de retourner immédiatement à un des endroits où se trouvait précédemment le condor, néanmoins la nuit tombe et depuis les hauteurs l'alchimiste n'y voit pas grand chose. A contrecoeur, il repose donc la machine avec dans l'idée de continuer les recherches à la première heure le lendemain matin...
Île d'Ol-Honn. Soirée.
Les compagnons ne sont plus qu'à quelques kilomètres de l'endroit précis marqué sur la carte de Byzas. Ils ont atteint une zone rocheuse, parsemée de petites montagnes et entourée d'une forêt de conifères.
Esteban souhaite qu'ils poursuivent leur route, mais Mendoza refuse : « Esteban, nous sommes levés depuis l'aube, même un peu avant pour certains d'entre nous.. Nous avons construit l'embarcation conçue par Tao, continué nos efforts pour la faire avancer, escaladé la colline de l'obo et marché durant des heures...Je pense que la plupart d'entre nous, à commencer par moi, sommes fatigués..
- Mais, Mendoza, le temps presse ! dit le Fils du Soleil.
- Je suis conscient de l'urgence de la situation, poursuit le navigateur. Mais nous sommes épuisés. S'il y a des ennemis proches, nous ne pouvons nous permettre de les combattre affaiblis : nous ne ferions pas le poids...
- Mendoza a raison, Esteban, approuve Zia, amenant son bien-aimé à la raison. Nous poursuivrons notre quête demain.
- Montons un petit campement ici, dit Indali désignant un endroit à couvert. »
Ils s'abritent aussi bien que possible et se couvrent de quelques pelisses supplémentaires qu'ils ont amené avec eux dans un des sacs restants pour ne pas souffrir du froid. Après avoir diné, Mendoza étudie à nouveau la carte de Byzas afin de vérifier qu'ils suivent le bon chemin. Il la montre ensuite à la chasseresse, dans l'espoir que celle-ci connaisse le lieu exact.
« Cet endroit, annonce Kushi à l'assemblée, est ce que les peuples voisins du mien nomment le Bourkhan, la « Demeure du Dieu du Lac »... Je ne m'y suis jamais rendue auparavant : seuls nos chamans y sont autorisés. Mais Temujin en a souvent parlé aux miens. C'est là que vivrait la sorcière...
- Kushi, dit Esteban. Quand nous étions à ton campement, ton chaman et ton Zaïssan ne nous ont pas demandé d'explications quant à la raison exacte de notre présence ici. Maintenant, nous te connaissons mieux et je pense que nous sommes tous d'accord pour te faire confiance et te la révéler...
- Oui, ajoute Zia à l'intention de la chasseresse. Si tu choisis de nous accompagner, il me semble normal que tu en sois informée ainsi que des risques.» Les autres compagnons acquiescent.
Esteban indique donc alors à l'évenque, dans les grandes lignes, leurs aventures passées, l'objectif qu'ils poursuivent et leurs motivations. Kushi reste incrédule un long moment, suite à l'évocation des Cités d'Or, du Peuple de Mû, des atlantes, de la grande guerre qui les a opposés, ça et le reste... Elle met un long moment à digérer toutes ces informations.
Pendant ce temps, Zia sert de sa tisane à Laguerra, qui la boit, puis cette dernière entraîne Mendoza à l'écart.
« Ah, c'est le moment ! murmure Zia à Indali. Elle va le lui dire...
- Qu'est ce qu'elle va lui dire ? » demande Esteban, curieux, qui a surpris leur aparté. Les amies sourient devant l'air perplexe du jeune homme.
« Indali, Zia, vous nous cachez des choses ? s'indigne exagérément Tao en faisant un clin d'oeil à sa bien aimée.
- Attendez un peu, vous deux, répond la jeune fille, espiègle, vous allez bientôt savoir...
- Ahlala, les filles, il faut toujours qu'elles aient des secrets ! » soupire l'ancien naacal en direction d'Esteban, qui sourit.
Pendant ce temps, Isabella et le navigateur se sont un peu éloignés des autres... Au dessus d'eux, le ciel est clair et les étoiles scintillent déjà. S'étant éloignés de la chaleur du camp, les deux amants frissonnent et se frottent les bras. La bretteuse est un peu nerveuse...
« Eh bien, qu'y a t-il ? lui demande le capitaine, je te sens distante depuis hier ». L'ancienne espionne évite encore un court instant son regard puis finalement, le fixe dans les yeux et annonce : « Mendoza, il y a quelque chose que je dois te dire maintenant, au cas où demain les choses tourneraient mal. Nous ne savons pas ce qui se cache là ou nous nous rendons, quels dangers nous allons devoir affronter...
- Je suis tout ouïe, lui répond son bien aimé, un peu inquiet. Tu peux tout me dire...
- Tu sais que j'ai des nausées ces derniers temps, lui déclare t-elle...Eh bien, Kushi et Zia sont formelles et Indali s'en doute elle aussi...Quant à moi, je le soupçonnais, mais sans me oser me l'avouer...Mendoza...Tu vas être Père... »
A cette déclaration, le navigateur se redresse, ébahi. Mais son air surpris ne dure que quelques secondes puis il réalise, un immense sourire éclairant son visage et rassurant sa compagne. Le marin prend Isabella dans ses bras, l'embrasse et l'étreint tendrement. « C'est merveilleux, chérie ! » arrive t-il enfin à dire, ému, ses dehors de marin endurci s'effondrant tel un château de cartes sous le vent. « Tu ne pouvais pas m'annoncer plus belle nouvelle ! C'est le début d'une fabuleuse aventure ! La plus belle de toutes !»
« Cela n'arrive pas au meilleur moment, ajoute toutefois la bretteuse : cela risque de diminuer mes capacités, je le crains...
- Ce n'est rien ! Nous réussirons, Isabella...Comme toujours, ensemble... » conclut le navigateur.
Ils restent encore là un moment, enlacés, profitant de l'instant, puis rejoignent leurs compagnons.
Voyant les amants sourire et l'air entendu d'Isabella, Indali et Zia se pressent vers eux, incitant le reste de la troupe à venir avec elles.
« Félicitations ! » s'exclame joyeusement Zia entourant Mendoza de ses bras, Indali faisant de même avec Laguerra.
« C'est magnifique, mon ami ! » dit Athanaos, venant de comprendre et posant les mains sur les épaules du marin.
« Tu crois qu'ils nous expliqueraient ce qu'il se passe ? » s'indigne Esteban à Tao qui hausse les épaules. Les jeunes filles rient devant leur air perplexe, les garçons n'ayant visiblement encore rien compris.
« Je vais avoir un enfant » leur concède Isabella, plus à l'aise maintenant qu'elle a réussi à l'annoncer à son amant.
Les deux frères de cœur réalisant enfin la nouvelle ainsi que Sancho et Pedro, ils écarquillent les yeux puis se ruent à leur tour vers le couple pour le féliciter. Gaspard aussi, sa jalousie et sa rancoeur ayant disparu. Les amis restent ainsi tous groupés un moment.
« Oh ! Oh oh oh oh ! C'est magnifique ! » reprend Tao. « Un ou une future membre de l'Ordre du Condor ! Une nouvelle recrue ! Ahah ! » ajoute-t-il en plaisantant avant de terminer : « une fois revenus à Pattala, nous organiserons une grande fête que personne n'oubliera ! »
Emu, Esteban prend alors à son tour la parole, tout en tenant fermement son médaillon : « Laguerra, Mendoza, quand votre enfant sera né, leur promet-il des larmes de joie aux yeux, je veillerai sur lui, je le protégerai ! Tout comme tu as pris soin de moi, Mendoza, durant toutes ces années...J'en fais le serment devant vous et sur mon médaillon... » A ces mots, le marin esquisse un sourire et lui frotte doucement les cheveux. « Ah ! Merci, Esteban, dit-il. Je ne saurai rêver meilleure protection ! Il va me falloir un peu de temps pour réaliser mais en ce moment, je suis le plus heureux des hommes ! Merci à vous tous ! Vraiment ! Mais nous devrions retourner au camp : nous allons attraper froid...»
Machine Olmèque d'Ambrosius. Matinée.
Zarès a eu du mal à s'endormir : la perspective que la fine équipe d'Esteban ait pu lui échapper l'a tourmenté toute la nuit. Dès que le jour se lève, il enclenche les recherches. La machine Olmèque décolle, pour se poser quelques minutes après dans la zone que l'alchimiste pense être celle où le condor se trouvait précédemment. Malheureusement pour lui, il n'a pas bien mémorisé cette localisation. Ivan, son armée et Ambrosius se déploient pour ratisser le périmètre et trouver les amis.
Île d'Ol-Honn. Matinée.
Les compagnons ont réussi à se protéger du froid en s'emmitouflant sous les pelisses et se serrant les uns aux autres. Sancho et Pedro se sont toutefois malgré tout enrhumés. Au petit matin, la troupe fait le point et tente de se préparer du mieux qu'elle peut aux dangers qui ne vont pas manquer de survenir. Tous avancent vers le point indiqué par la carte et sortent de la zone montagneuse puis, bientôt, se trouvent à la lisière d'une petite forêt les séparant d'un cap sur lequel trône une énorme masse rocheuse...
Калюжный Владимир, Public domain, via Wikimedia Commons
Arrivés devant l'éminence, Zia est inquiète : elle sent comme une menace sourde... Elle se sent
épiée... Esteban sent l'inquiétude de son amie : « que t'arrive-t-il, Zia ? » La jeune inca lui explique son sentiment. Mendoza ne peut qu'aller dans son sens : « la zone est entièrement à découvert, déplore le navigateur. Je ne vois pas âme qui vive, mais cela ne veut pas dire que nous n'avons pas déjà été repérés, ou que nous ne le serons pas dès que ferons un pas en direction de ce rocher...
- Prenons bien le temps d'examiner nos options, conseille l'ancienne espionne.
- Je ne vois rien qui ressemble à une entrée, dit Gaspard. Mendoza, t'es sûr que tu ne t'es pas trompé de caillou ? Il faudrait peut être que tu relises la carte ? Tu ne la tiendrais pas à l'envers, par hasard ? »
Le navigateur choisit d'ignorer la remarque et reste concentré sur son examen des lieux...
« On dirait qu'il y a une sorte de puit ici », déclare Kushi en tendant le bras et désignant le sommet du rocher... La chasseresse ayant une très bonne vue, les amis doivent plisser les yeux pour distinguer, effectivement, un cercle dont les contours semblent être faits de métal.
- Il y a sûrement au moins un autre accès, indique Tao : si cet endroit abrite des individus, cela m'étonnerait qu'ils sortent par là...cela ne serait pas pratique du tout !
- Sauf peut être, précise Zia, si ce sont des Olmèques ou s'ils leurs sont apparentés... Rappelles-toi, Tao : ce sont de bons grimpeurs...
- Oui, de vrais petits singes, se souvient Mendoza.
- Attendez ! dit Esteban : je crois voir quelque chose sur le côté ». Tout en restant à la lisière de la forêt, il se déporte de quelques dizaines de pas sur la droite pour mieux observer, puis revient. « Il y a une sorte de grotte. L'entrée de la base ennemie est sûrement là...
- Je déteste avancer ainsi dans l'inconnu, maugrée Laguerra : nous ne savons pas du tout à quel genre d'ennemi nous allons avoir affaire, ni combien ils sont, ni leurs ressources... Peut être y a t-il encore une autre issue derrière ce roc ? Je pense que je pourrai en faire le tour discrètement, mais si j'y vais seule...
- Y aller seule ? répète Mendoza, inquiet. Je ne doute pas de tes capacités à te dissimuler, mais c'est tout de même assez exposé et très dangereux.Si jamais tu venais à être repérée, nous ne pourrions pas te rejoindre à temps pour te protéger...
- Je sais me défendre, lui rappelle-t-elle. Nous sommes onze, désormais. Y aller tous, ou même à deux ou trois risquerait d'attirer l'attention... J'aurai de plus grandes chances de passer inaperçue seule. » Mendoza rechigne toujours, mais se résout à faire confiance au jugement de la bretteuse. Elle s'élance donc, partant sur la gauche, longeant les fourrés, puis la côte. Ils la voient encore tandis qu'elle s'engage sur la glace du lac et s'y laisse glisser, allongée, afin de disparaître d'éventuels regards. Elle sort ensuite complètement de la vue des compagnons. Au bout d'un long moment qui semble être une éternité à Mendoza, Laguerra réapparaît finalement au loin, sur leur droite...Elle rejoint alors ses amis.
« As-tu vu une autre issue ? lui demande le capitaine.
- Non. J'ai fait le tour pour rien ! Enfin, maintenant, nous en sommes sûrs...
- Bon, dans ce cas, annonce Gaspard en dégainant sa rapière, il n'y a plus qu'à aller voir...
- Pour cette fois, je suis d'accord avec toi, dit Mendoza.
- Euh, on ne peut pas simplement attendre que nos ennemis sortent ? suggère Pedro.
- Ce serait plus prudent ! confirme Sancho en hochant la tête.
- Ah ! Vous deux, vous ne changerez jamais ! leur assène Esteban tout sourire. Si vous voulez, vous pouvez toujours rester ici, tous les deux, pendant que nous, nous irons voir ? »
A la perspective de rester seuls sans protection, les deux loups de mer se ravisent: « non bien sûr, clame Pedro : nous venons avec vous, nous sommes ensemble pour la vie ! » Leurs amis sourient.
« Nous devrions faire deux groupes, suggère Athanaos. L'un qui escaladerait le rocher pour descendre par le puit que Kushi a repéré et l'autre qui passerait par l'entrée vue par Esteban..Nous attirerions moins l'attention et en cas de piège, nous ne tomberions pas tous dedans...
- C'est bien pensé, l'alchimiste ! » lui dit Gaspard en lui donnant une tape sur l'épaule. Laguerra approuve également.
Ils décident donc de suivre l'idée du Prophète Voyageur. Après quelques discussions, un premier groupe est constitué d'Esteban, Tao, Zia, Laguerra et Mendoza. L'autre d'Athanaos, Sancho et Pedro, Indali, Kushi et Gaspard. Les compagnons souhaitent, dans la mesure du possible, équilibrer un peu les compétences...Une fois prêts, ils se séparent, utilisant du mieux qu'ils peuvent la forêt et le relief pour avancer vers le rocher. Ils ne courent pas, pour ne pas faire de bruit, mais marchent le plus rapidement possible. Arrivés près du monticule, ils rampent même, le temps d'atteindre la grotte pour les uns et la base du rocher pour les autres. Entrant dans la grotte, Esteban et les siens voient quelques offrandes à terre, similaires à celles qu'ils ont laissé la veille devant le cairn. Quelque chose intrigue Zia : « des personnes ont marché sur les dons faits aux esprits. Qui que ce soit qui soit passé par ici, ce n'était pas un évenque ou un chaman...
- Cette mise en scène est sûrement un leurre, affirme Laguerra. Pour faire croire qu'il n'y a rien d'anormal et dissuader des gêneurs comme nous d'avancer plus loin..
- La grotte s'enfonce davantage en effet, fait remarquer Esteban. La vraie entrée se trouve probablement au fond. »
Ils continuent donc à s'enfoncer dans les ténèbres... Ils ont bien avec eux quelques lampes portatives qu'ils avaient prises à Ambrosius mais ne les utilisent pas, de crainte de trahir leur présence aux éventuels ennemis. Au bout d'un long moment, ils arrivent à un cul-de-sac. Forts de leurs expériences précédentes, ils ne se fient pas aux apparences et inspectent les parois, trouvant finalement l'emplacement d'une pierre curieusement un peu descellée. Esteban appuie sur celle-ci, et un pan de roche s'enfonce alors puis coulisse sur la droite, révélant un tunnel.
Le Fils du Soleil avance prudemment dans le passage. Il a à peine fait quelques pas qu'une lumière diffuse apparaît, éclairant un peu l'endroit. Ils se trouvent dans une salle hexagonale, dont les murs irradient de teintes roses et blanches.
La pièce comprend deux portes sur la droite et deux autres sur la gauche, une cinquième se trouvant en face d'eux. Tout est silencieux alentours et ils ne détectent pas de présences.
«Ce n'est pas de l'architecture muenne ni atlante... affirme Tao, examinant les murs du regard.
- Ce n'est pas non plus de l'orichalque, ajoute Zia. Byzas nous a pourtant dit que de grandes quantités de ce métal avaient été produites ici, il y a très longtemps...
- Ce n'est donc pas ici que se trouve la Cité d'Or que nos nouveaux ennemis ont pu construire... soupire Esteban en baissant les épaules. Ceci ne doit être qu'une de leurs bases... Elle est peut être désertée ? Avançons, nous découvrirons bien une nouvelle piste... »
Ils décident d'examiner tout d'abord les accès se trouvant sur les côtés. N'écoutant que leur courage, ils les ouvrent l'un après l'autre, révélant à chaque fois ce qui semble être un entrepôt. De grandes caisses de métal y figurent, mais ils ne parviennent pas à les ouvrir car elles sont scellées...Zia pourrait peut être les ouvrir grâce à son pouvoir, mais elle ne le fait pas, pensant que cela ferait trop de bruit. Dépités, ils reviennent alors sur leurs pas et empruntent la porte qui se trouvait en face d'eux à leur arrivée. Là aussi des halos lumineux surgissent. Ils aperçoivent un peu plus loin un pont qui semble surplomber le vide et entendent également un léger vrombissement, à peine perceptible. Esteban menant la marche, ils progressent mais tout juste les compagnons ont-ils dépassé la porte que celle-ci se referme derrière eux et semble ne plus vouloir s'ouvrir ! Des faisceaux bleutés jaillissent soudain de part et d'autre des murs et parcourent les amis. « J'ai horreur de ce genre d'examen, dit Mendoza. Tenez-vous prêts à toute éventualité ». Il dégaine son arme et Laguerra son pistolet et tous se mettent sur le qui-vive. Ils craignent l'apparition d'une tourelle, comme ils en avaient fait l'expérience à Céroessa... Mais cette fois, ils feraient des cibles bien plus faciles, n'ayant aucune échappatoire visible. Heureusement, rien de tel ne se produit : l'endroit reste calme.
« Nous n'avons pas le choix, murmure Esteban à ses amis : nous allons devoir continuer... » Mais ses paroles déterminées se heurtent à la dure réalité : quand il s'approche du pont, son vertige le reprend et ses jambes flageolent. Zia lui met alors une main sur l'épaule, pour le rassurer : « ne regardes pas en bas, Esteban et n'aie pas peur : je suis avec toi. Si tu le souhaites, je peux passer devant et te prendre la main...
- Non, Zia, reprend le jeune homme : s'il y a du danger, je ne veux pas t'y exposer...Je dois le faire... Mais ce satané vertige ne me lâchera donc jamais ! » Là-dessus, il ferme les yeux, inspire profondément, expire, puis concentrant son attention sur l'autre bord du pont, il parvient à avancer.
En dessous, Tao, Zia, Mendoza et Laguerra aperçoivent de nombreuses grappes de couchettes, similaires à celles utilisées par les Olmèques pour leur Grand Sommeil. La seule différence étant que celles-ci sont attachées à des piliers, dont le sommet est lui même fixé à l'immense pont sur lequel ils se tiennent. Ils estiment le nombre d'habitacles à plus d'une centaine, mais ceux-ci sont tous vides. Le vrombissement qu'ils entendent semble venir des piliers.
Une fois le pont traversé, ils arrivent dans une autre salle, mais là aussi la porte qui se trouve derrière eux se verrouille. La pièce est vide et ne comprend qu'une autre issue, également fermée. Une voix sinistre retentit devant eux, semblant venir d'un orifice situé au plafond. « Rendez-vous, dit-elle. Déposez vos armes ! » Les compagnons s'y refusent, considérant leurs options. Zia pense utiliser son pouvoir pour forcer une ouverture, mais elle n'en a pas le temps : ils sont bombardés de vives lumières d'un jaune éclatant. Les trois enfants reconnaissent instantanément le même type de dispositif que celui qui les avait sonnés dans la base du Bouclier Fumant. Ils préviennent bien Mendoza et Laguerra et résistent bien un moment mais, malheureusement, ils finissent par succomber aux effets de l'arme et tombent sur le sol...
Ils se réveillent désarmés, dans une pièce aux murs là aussi roses et blancs. Une porte massive, en métal, leur bloque la sortie. Zia essaie bien de la bouger, mais rien n'y fait. Ils restent donc là, impuissants quand, au bout d'un moment elle s'ouvre, laissant apparaître plusieurs hommes et femmes en armure, similaires à celle que portait Byzas. Ils sont armés de lances dont la pointe se termine par une lame bifide et crépite de petits éclairs. Une femme très âgée se détache du lot et s'avance. Ses cheveux sont argentés et filandreux, avec quelques mèches noires au dessus du front. Sa peau est rose, mais très pâle. Ses yeux sont bleu acier et son regard est dur. Un port altier, elle est vêtue d'une ample robe à capuche bleue marine comportant un liseret rouge au niveau des épaules.
Dévisageant les amis, puis désignant Esteban, Tao et Laguerra, la femme leur dit simplement, d'une voix chevrotante : « Comment vous appelez-vous ?". Les trois amis lui répondent et elle poursuit... "Bien, vous trois, venez avec moi ! Nous allons vous interroger .» Mendoza essaie de s'interposer, mais reçoit soudain une décharge provenant d'une lance d'un des ravisseurs. Il s'effondre sur le sol, gémissant de douleur. Laguerra se jette aux pieds du navigateur pour voir si ce n'est pas trop grave. Le marin est presque paralysé, mais il respire...La bretteuse se relève et foudroie les assaillants du regard mais, malheureusement, elle n'a pas ses armes et ne peut rien faire en cet instant. « Vous feriez mieux d'obéir ! » intime la vieille femme. Esteban ne voulant pas que les siens soient blessés, il accepte de la suivre et Tao aussi. Laguerra s'exécute également, regardant toujours leurs ennemis d'un air glacial. Avant d'être emmené, Tao parvient à glisser dans la main de Zia, qui se trouvait derrière lui, la sono-boite qu'il avait en sa possession.
La cellule se ferme et les trois compagnons, entourés, longent un couloir, parsemé de portes, puis tournent à droite et enfin descendent un escalier. « Qui êtes-vous ? demande Esteban à l'aînée qui les guide. Vous n'êtes pas des Olmèques...
- Vous connaissez donc les Olmèques ? lui répond-elle. Intéressant... » Tao réprimande son ami du regard afin qu'il ne trahisse pas d'autre information à leur sujet. Esteban le regarde, penaud.
« Non, reprend leur ravisseuse. Nous nous appelons les Sintashtas.
- Comme le mot que j'ai décodé ! s'exclame Tao, oubliant toute retenue et pas peu fier : je savais que ma traduction était bonne ! » Mais il se rend instantanément compte de sa bourde.
« Tu sais donc lire les anciennes langues ? » déduit la vieille dame. Là, c'est le Fils du Soleil qui adresse un regard lourd de reproche à son ancien naacal..
Ils traversent ensuite la salle contenant les couchettes, le pont les surplombant cette fois. Ils arrivent enfin dans une pièce dans laquelle se trouvent plusieurs cylindres placés horizontalement et remplis de liquide orangé. Trois individus figurent allongés dans ces tubes, couvercles fermés. Sur un panneau de commande situé non loin, d'autres Sintashtas pianotent sur des claviers. Des lumières de toutes les couleurs se mettent à pulser autour des étranges sarcophages et le liquide qu'ils contiennent prend une teinte aveuglante. Tandis que les cylindres palpitent, la vieille femme prend la parole : « nous vous surveillons depuis que votre appareil muen a commencé à survoler la région... Nous l'avons forcé à se poser. Si vous êtes là, c'est que vous êtes informés que le Grand Cataclysme a été déjoué. Peut-être même y êtes-vous pour quelque chose ? En tous cas, ce qui est certain, c'est que vous connaissez des secrets de Mu et d'Atlantide et vous allez tout nous révéler !
- Nous ne vous dirons rien ! promettent Esteban et Tao de concert. Même sous la torture !
- J'en doute fort ! répond leur interlocutrice. Mais rassurez-vous, nous n'allons pas vous faire de mal : nous avons des méthodes bien plus subtiles. Voyez-vous, l'obtention des secrets est notre spécialité... Attendez juste un instant, que je vous montre comment nous allons faire... »
Esteban demande courageusement à leur ennemie : « êtes-vous cette méchante sorcière que craignent les gens des environs ?
- Moi, une méchante sorcière ? répète-t-elle, hilare. Ahah ! Oui, enfin, c'est ce que j'ai fait croire aux idiots qui vivent dans ces contrées depuis des siècles... Je suis contente de voir que cette vieille ruse fonctionne toujours : cela nous évite les visites de gêneurs... Enfin, en général, vu que vous êtes là... Mon vrai nom est Yesubaha, mais je suis plus connue sur ces terres sous le nom de Baba Yaga. » Cela ne dit absolument rien à Laguerra et aux deux amis, qui haussent les épaules. Yesubaha ne s'en offusque pas. Voyant que les lumières parcourant les cylindres viennent de cesser de clignoter et que les tubes s'ouvrent, elle leur déclare : « laissez-moi vous montrer mon tour de magie favori ! Ahah ! »
A leur grande stupeur, Esteban, Laguerra et Tao voient leurs doubles émerger des tubes, un sourire mauvais aux lèvres !
Fin du chapitre
Quels sont les objectifs des sinistres Sintashtas ? Nos amis leur échapperont ils ?
Vous le saurez en lisant le prochain chapitre des Mystérieuses Cités d'Or !
Documentaire
L'île d'Ol-Honn que parcourent nos héros est en fait de nos jours appelée l'île d'Olkhon. Elle est située au cœur du Lac Baïkal. Son sommet est l'un des plus hauts points culminants au monde pour une île. Elle comporte de nombreux paysages : steppe, plages, dunes, rochers de marbre, collines et forêt de conifères, ainsi que falaises... Dans les mythes et les légendes locales, c'est l'habitat des esprits . Un Khan envoyé par les dieux y serait descendu sous la forme d'un aigle royal à tête blonde. Le fils de cet émissaire serait devenu le tout premier Chaman au monde. Le lieu fort de toutes ces croyances est appelé le rocher des chamans, le Bourkhan.
https://fr.wikipedia.org/wiki/Olkhon
Le Scoop de Pichu
« C'est quoi, un chaman ? Demande Pichu.
- C'est quelqu'un qui pratique le chamanisme... répond la voix off.
- Ca, j'aurai pu deviner !dit le perroquet, contrarié...
- Je plaisante, Pichu, reprend la voix off. Le chamanisme est basé sur la communication avec les esprits. D'après ces croyances, les esprits sont partout: dans l'eau, dans l'air, les montagnes, les maisons, pierres, arbres, feux, etc...Il y a aussi des esprits pour les activités. Par exemple, l'esprit Mongol-Bourkhan, est le patron de l'élevage et le dieu du Baïkal...Les esprits protecteurs des tribus et des lieux aident les gens dans leurs affaires. La déesse Mère-Terre, Etouguin, est la force de la nature; c'est elle qui octroie les bonnes récoltes et la prospérité... Le chaman a la lourde tâche de réconcilier les esprits avec les actions des hommes, dans tous les aspects de leurs vies...
- Ca doit lui en faire, du travail ! » constate Pichu.
Au revoir...a bientôt !
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Chapitre XIV : Les Terribles Esprits
Sur le Lac Lamou. Début d'après midi.
Les amis se sont dispersés aux quatre coins de l'embarcation conçue par Tao, afin de répartir leurs poids et limiter le risque que la couche de glace ne cède. Ils se sont ainsi engagés dans une sorte de détroit formé entre l'extrémité du lac proche du camp des évenques et le rivage sud-ouest de l'archipel. Ayant déjà parcouru plusieurs kilomètres et continuant de glisser, ils sont déjà arrivés à la moitié de la banquise et leur but leur paraît tout proche à présent. Ils observent l'île, profitant que leur position leur en offre une bonne vue d'ensemble. Cet endroit est très étrange car ils comporte différents paysages : ils aperçoivent des criques et des falaises, mais aussi un peu plus loin des collines de conifères et d'un autre côté des dunes et des rochers de marbre.
Rompant le silence régnant sur l'embarcation, la chasseresse indique aux amis une forme au loin : la plus grande colline visible : « l'Obo où nous devons placer les offrandes de mon peuple se trouve au sommet de ce monticule. » Puis s'adressant à l'ancien naacal, elle ajoute : « nous y serons rapidement. Ton invention est remarquable, Tao ! Tu es très intelligent !
- Merci, Kushi, répond le jeune prince en se grattant la tête, mais pas peu fier. Enfin quelqu'un qui remarque mes talents ! Ahah ! Enfin, se dépêche-t-il d'ajouter : quelqu'un d'autre qu'Indali ! » L'intéressée sourit.
« Gamin, ajoute Gaspard, je dois reconnaître que tu m'impressionnes encore. » Puis, se tournant vers sa nouvelle amie, il poursuit : « il faudra que je te raconte tout ce que nous avons vécu les gamins et moi, ainsi que Mendoza et les autres, bien sûr. C'est une longue histoire, mais tu seras très surprise...
- Gaspard, le taquine le navigateur, je ne t'ai jamais connu aussi bavard ! Quelque chose aurait-il changé récemment ? » Tous, sauf le maître d'armes et la chasseresse, rient à la remarque, ayant bien compris les nouveaux sentiments unissant ces derniers. « N'en profites pas en tous cas pour t'arrêter de tourner cette satanée manivelle!
- Oui, Gaspard, ajoute Pedro : c'est mou là-dedans ! Tournes-là plus vite, vieille baderne, qu'on sorte de ce rafiot ! Je serai plus tranquille sur terre que sur cette fichue glace...Elle ne m'inspire pas confiance.
- Plus tranquille sur terre ? C'est un marin qui dit cela ? Hihihi» se moque Zia. Pedro se renfrogne un peu.
« Kushi, conseille Esteban en la regardant : ne fais pas trop de compliments à Tao, s'il te plaît : sinon, on ne va pas arrêter d'en entendre parler ! Car Môssieur est un Grand Inventeur du Peuple de Mû ! ajoute-t-il malicieux et levant les yeux au ciel.
- Souvenez-vous de l'honneur de Mû ! ajoute Pichu en babillant et tournoyant au dessus du Fils du Soleil.
- Mais de quoi parles-tu, Esteban ? demande Kushi au jeune garçon. Et que dit cet oiseau ? Et déjà : est-il normal qu'il parle, d'ailleurs ?
- Ahah, oui, c'est un perroquet, explique Zia. Tu n'en avais sans doute jamais vu avant. Pour répondre à ta question, Tao et moi, nous sommes originaires du peuple de Mû.
- Un peuple très ancien et légendaire ! précise l'ancien naacal, s'enthousiasmant. Et j'en suis le dernier Prince en date ! »
La chasseresse ne comprend vraiment pas grand chose à tout ce verbiage, mais ces enfants lui semblent sincères et savoir ce qu'ils font. Elle s'accommode donc du manque d'explications pour le moment...
« Et Esteban ? demande-t-elle toutefois. Lui aussi vient du même peuple que vous deux ?
- Oh, lui ? le taquine Tao. Non : ce n'est qu'un atlante ! Nul n'est parfait !
- Ah oui, c'est comme ça ? réplique Esteban, qui n'est pas dupe du fait que son ami ne fait que plaisanter. Attends qu'on arrive sur l'île ! Tu vas voir la correction qu'il va te passer, l'atlante ! Ahah !»
Revenant à des choses plus sérieuses, Zia demande à l'évenque : « Kushi, peux-tu nous en dire plus sur la sorcière évoquée par Temujin ?
- Non, malheureusement, seul mon chaman l'a déjà rencontrée quand il vient sur l'île pour rendre hommage à ses prédécesseurs, dont les dépouilles ont été incinérées près du cairn. Temujin m'a emmenée une fois sur ce lieu, quelques années à peine après ma naissance, pour me donner mon nom de clan. Je n'ai rien remarqué d'anormal à cette époque, mais j'étais très jeune et très peu attentive.
- En tous cas, les prévient Mendoza, nous allons devoir être particulièrement prudents, désormais : si les ennemis mentionnés par Byzas se trouvent ici, peut être nous ont-ils déjà repérés... »
Laguerra acquiesce. La bretteuse évite toutefois de croiser le regard de son bien-aimé, car elle ne sait pas encore comment lui annoncer la nouvelle qu'elle lui cache. La perspective d'un changement d'une telle ampleur dans sa vie la paralyse quelque peu. Elle craint aussi de ne plus pouvoir se battre comme elle le devrait si besoin et redoute que cela ne compromette leur mission.
Au bout d'une heure de navigation supplémentaire, guidés par Kushi, les compagnons atteignent l'île et accostent dans une petite crique. Ils mettent leur embarcation à l'abri sur la berge, puis prennent avec eux un sac de matériel de campement et les sacs d'offrandes des évenques. Ils longent la crique en direction de l'est, la chasseresse leur montrant un sentier montant à flanc de falaise et sur lequel ils s'engagent. Bien que ce soit le début de l'après midi, ce chemin est encore à demi-noyé dans la brume et il s'avère assez étroit. Ils doivent donc faire attention à ne pas glisser, ce qui les ferait tomber à coup sûr dans le lac gelé. La tâche n'est pas simple car ils sont tous chargés. Bien que la hauteur de la falaise ne soit pas si élevée que cela, Esteban n'est pas non plus à son aise... Le passage est bordé de poteaux garnis chacun d’une multitude de rubans colorés. Les morceaux de tissu ballottent à chaque souffle de vent.
« Ce sont des totems...Ils marquent l'entrée du domaine des esprits », leur dit Kushi, devançant ainsi une question de Tao. « En avançant, poursuit-elle, il faut leur rendre hommage...Nouez à chacun de ces poteaux un des rubans que les miens ont mis dans les sacs. » Ne voulant ni vexer la chasseresse, ni d'éventuelles puissances surnaturelles, les compagnons s'exécutent. Esteban, Zia et Tao attachent consciencieusement les petits rubans colorés autour des piquets. Continuant ensuite leur ascension, ils arrivent dans une petite forêt emplie de mélèzes. Ils la traversent puis, très vite, atteignent une zone parsemée de collines. Ils aperçoivent la plus haute de celles-ci et entreprennent son ascension.
« Qu'est ce ça monte ! Pfff ! » se plaint Pedro, épongeant de sa manche la sueur coulant déjà de son front alors qu'ils n'ont grimpé que quelques mètres...
« Pour ça, oui ! Pfff ! » confirme Sancho en se tenant les reins. « Ces ci..ci.cici..Cités d'Or, il faut toujours que ce soit dans des endroits ina..inaca.inacess..inacib..difficiles à atteindre !
- C'est sans doute pour ça que personne ne veut y rester, dans ces cités ! ajoute Pedro. Ca et aussi le fait qu'elles se replient d'un coup et vous aplatissent dès qu'on touche à quelque chose...
- Gardez votre souffle et arrêtez de vous plaindre, vous deux, c'est un ordre ! Les gronde Mendoza.
- Eh, mais, Mendoza, t'es plus notre capitaine, maintenant ! Tu te souviens ? Tu nous a donné congé il y a plus d'un an ! On n'a plus à suivre tes ordres ! dit Pedro, faisant exagérement semblant de se rebiffer.
- Ca c'est bien vrai ! complète Sancho. Je..jetez l'ancre ! Carguez les voiles, ki.kiki..kikiki.. qu'y disait ! A peine un an tranquilles et hop, nous v'là à l'aut' bout du monde, dans l'froid, chargés de sacs, à gravir des montagnes et avec Zarès et un gamin fou derrière nous ! »
Mendoza se prend le front d'une main, ferme les yeux un instant et soupire. Puis, il fait comme s'il n'avait rien entendu et poursuit son ascension. En milieu d'après midi, les compagnons atteignent finalement le cairn désigné par Kushi. Il s'agit d'un simple monticule de pierres.
Suivant les instructions de l'évenque, tous posent leurs sacs et les ouvrent. Ils déposent au pied de la structure les différentes offrandes : des victuailles, mais aussi quelques petites peaux de bêtes et des objets réalisés à la main, tels que des poteries ou sculptures en bois à l'effigie d'animaux. Kushi leur indique comment bien placer ces dons, pour rendre hommage aux esprits. Esteban, Tao, Indali et Zia suivent à la lettre ses recommandations, sous l'oeil curieux d'Athanaos. Tandis qu'ils procèdent, Sancho et Pedro se reposent, s'allongeant à même le sol comme s'ils venaient d'accomplir un exploit. Mendoza reste vigilant, surveillant les alentours. Le navigateur souhaiterait tout de même prendre Laguerra dans ses bras un instant mais la bretteuse s'éclipse prestement, allant à son tour participer au dépôt des offrandes. Gaspard, n'ayant rien de mieux à faire pour le moment, décide de participer lui aussi au rituel.
Esteban, passant par hasard sa tête entre les parois du cairn remarque soudain quelque chose de curieux : des inscriptions gravées... Il croit reconnaître là quelques signes atlantes, mais ses connaissances sont encore beaucoup trop rudimentaires pour qu'il en soit sûr. Il signale alors ce qu'il a vu à Tao, Indali et Zia. L'endroit est toutefois exigu et les enfants se cognent la tête en se précipitant tous en même temps pour voir de quoi il retourne. Ils se massent la tête puis, Tao ayant le plus d'expérience sur le sujet, les autres le laissent voir en premier. Le cairn n'étant ni très haut ni très large, l'ancien naacal est obligé de se contorsionner pour finalement se mettre sur le dos, sous les pierres. Il parcourt de son index les inscriptions...
Il reste allongé un long moment, se grattant la tête, prenant parfois son encyclopédie. Puis, finalement, il sort et se relève en se massant le dos. « Même si les traits des idéogrammes y ressemblent un peu, dit-il à Esteban, ce n'est ni de l'atlante, ni du muen ! Je n'ai jamais vu cette langue...
- C'est très bizarre ! déclare Esteban.
- Oui, confirme Indali qui plaisante ensuite : une langue que Tao ne connaît pas, je ne croyais pas cela possible !
- En faisant des recoupements et par déduction, je pense tout de même avoir déchiffré quelques syllabes : Sin...Tash..Ta..
- Sin..tash..ta ? Qu'est ce que ça veut dire ? lui demande Esteban
- Comment veux-tu que je le sache ? s'agace Tao. C'est pas si simple que tu crois ! »
Mendoza hausse les épaules : « ce n'est pas important dans l'immédiat, Tao : la carte de Byzas n'indiquait pas cet endroit-ci, mais un emplacement situé plus au nord ouest. Nous allons devoir marcher encore plusieurs heures...
- Nous devrions nous dépêcher, suggère Laguerra : le soleil va bientôt décliner...
- J'ai décidé de venir avec vous ! leur annonce Kushi. Si comme l'a suggéré Esteban la sorcière qui règne sur l'île est une usurpatrice, je veux en avoir le cœur net, pour prévenir les miens. »
Laguerra acquiesce, se réjouissant de la décision de la chasseresse puis ajoute, un brin espiègle : « et puis, ce serait dommage que tu te sépares d'un si bel homme tel que Gaspard ! »
Kushi prend la remarque au premier degré et approuve, sans gêne aucune.
Les autres compagnons sourient, même Gaspard, qui prend un air béat. Ils continuent alors leur route...
Machine Olmèque d'Ambrosius. Fin d'après midi.
Cela fait deux jours déjà que la machine stationne au même endroit. A l'intérieur Ivan et ses troupes, enfin surtout Ivan, s'agitent... Zarès aussi est nerveux : l'attente lui semble longue et il craint d'être passé à côté de quelque chose d'important... Il n'arrive plus non plus à supporter les jérémiades continuelles du Prince. Il fait sortir tout le monde de la machine, en sort, referme la porte et la verrouille.
« Attendez-moi là ! ordonne-t-il de sa voix caverneuse. Je vais vérifier quelque chose. Ce sera vite fait... »
Il se met en marche vers la localisation du condor, telle qu'indiquée sur l'écran du poste de commande de la machine. L'alchimiste pourrait utiliser sa prodigieuse vitesse pour atteindre sa destination mais choisit de ne rien en faire, pour ne pas risquer de se faire remarquer d'Esteban et ses amis dans le cas où ils seraient proches de l'appareil. Après quelques minutes, il s'approche du lieu recherché, qu'il distingue au loin, mais n'y voit pas l'oiseau d'or !
«Qu'est ce que cela signifie ? S'étonne t-il. Ou sont-ils ? Il est impossible que le condor se soit posé là ! Ce n'est pas un espace à découvert, ni même assez large. »
Ayant le détestable sentiment d'avoir été joué, Zarès fait fi de la discrétion et se rue à l'emplacement exact. Fouillant les environs, il aperçoit alors la pierre lancée par Zia et comportant toujours son dispositif de pistage émettant le signal. « Nooon ! Il n'ont pas pu m'échapper ! Pas encore ! » dit-il de rage, sa terrible voix faisant s'enfuir tous les animaux présents sur plus d'une centaine de mètres à la ronde. L'alchimiste reprend l'émetteur et pulvérise la pierre sans effort, rien qu'en serrant les doigts.
« Mais comment ont-ils su que je les suivais ? se demande-t-il. Et comment ont-ils pu me berner avec cette pierre ? La déplacer sur une telle distance et aussi vite ? » Il réfléchit intensément et, s'il ne voit pas de réponse à sa première question, identifie celle de la seconde : « La couronne de Sûndagatt ! Ou bien Zia ! Bien sûr ! Elle s'est déjà servie de son pouvoir contre moi ! Si c'est elle qui a fait cela, sa capacité semble être devenue encore plus puissante...Il faudra que je m'occupe d'elle en premier lieu. Il faut que je les retrouve ! »
Il retourne rapidement à la machine, y fait embarquer tout le monde, moscovites, prince et apprenti et fait décoller la Machine Olmèque. Il envisage de retourner immédiatement à un des endroits où se trouvait précédemment le condor, néanmoins la nuit tombe et depuis les hauteurs l'alchimiste n'y voit pas grand chose. A contrecoeur, il repose donc la machine avec dans l'idée de continuer les recherches à la première heure le lendemain matin...
Île d'Ol-Honn. Soirée.
Les compagnons ne sont plus qu'à quelques kilomètres de l'endroit précis marqué sur la carte de Byzas. Ils ont atteint une zone rocheuse, parsemée de petites montagnes et entourée d'une forêt de conifères.
Esteban souhaite qu'ils poursuivent leur route, mais Mendoza refuse : « Esteban, nous sommes levés depuis l'aube, même un peu avant pour certains d'entre nous.. Nous avons construit l'embarcation conçue par Tao, continué nos efforts pour la faire avancer, escaladé la colline de l'obo et marché durant des heures...Je pense que la plupart d'entre nous, à commencer par moi, sommes fatigués..
- Mais, Mendoza, le temps presse ! dit le Fils du Soleil.
- Je suis conscient de l'urgence de la situation, poursuit le navigateur. Mais nous sommes épuisés. S'il y a des ennemis proches, nous ne pouvons nous permettre de les combattre affaiblis : nous ne ferions pas le poids...
- Mendoza a raison, Esteban, approuve Zia, amenant son bien-aimé à la raison. Nous poursuivrons notre quête demain.
- Montons un petit campement ici, dit Indali désignant un endroit à couvert. »
Ils s'abritent aussi bien que possible et se couvrent de quelques pelisses supplémentaires qu'ils ont amené avec eux dans un des sacs restants pour ne pas souffrir du froid. Après avoir diné, Mendoza étudie à nouveau la carte de Byzas afin de vérifier qu'ils suivent le bon chemin. Il la montre ensuite à la chasseresse, dans l'espoir que celle-ci connaisse le lieu exact.
« Cet endroit, annonce Kushi à l'assemblée, est ce que les peuples voisins du mien nomment le Bourkhan, la « Demeure du Dieu du Lac »... Je ne m'y suis jamais rendue auparavant : seuls nos chamans y sont autorisés. Mais Temujin en a souvent parlé aux miens. C'est là que vivrait la sorcière...
- Kushi, dit Esteban. Quand nous étions à ton campement, ton chaman et ton Zaïssan ne nous ont pas demandé d'explications quant à la raison exacte de notre présence ici. Maintenant, nous te connaissons mieux et je pense que nous sommes tous d'accord pour te faire confiance et te la révéler...
- Oui, ajoute Zia à l'intention de la chasseresse. Si tu choisis de nous accompagner, il me semble normal que tu en sois informée ainsi que des risques.» Les autres compagnons acquiescent.
Esteban indique donc alors à l'évenque, dans les grandes lignes, leurs aventures passées, l'objectif qu'ils poursuivent et leurs motivations. Kushi reste incrédule un long moment, suite à l'évocation des Cités d'Or, du Peuple de Mû, des atlantes, de la grande guerre qui les a opposés, ça et le reste... Elle met un long moment à digérer toutes ces informations.
Pendant ce temps, Zia sert de sa tisane à Laguerra, qui la boit, puis cette dernière entraîne Mendoza à l'écart.
« Ah, c'est le moment ! murmure Zia à Indali. Elle va le lui dire...
- Qu'est ce qu'elle va lui dire ? » demande Esteban, curieux, qui a surpris leur aparté. Les amies sourient devant l'air perplexe du jeune homme.
« Indali, Zia, vous nous cachez des choses ? s'indigne exagérément Tao en faisant un clin d'oeil à sa bien aimée.
- Attendez un peu, vous deux, répond la jeune fille, espiègle, vous allez bientôt savoir...
- Ahlala, les filles, il faut toujours qu'elles aient des secrets ! » soupire l'ancien naacal en direction d'Esteban, qui sourit.
Pendant ce temps, Isabella et le navigateur se sont un peu éloignés des autres... Au dessus d'eux, le ciel est clair et les étoiles scintillent déjà. S'étant éloignés de la chaleur du camp, les deux amants frissonnent et se frottent les bras. La bretteuse est un peu nerveuse...
« Eh bien, qu'y a t-il ? lui demande le capitaine, je te sens distante depuis hier ». L'ancienne espionne évite encore un court instant son regard puis finalement, le fixe dans les yeux et annonce : « Mendoza, il y a quelque chose que je dois te dire maintenant, au cas où demain les choses tourneraient mal. Nous ne savons pas ce qui se cache là ou nous nous rendons, quels dangers nous allons devoir affronter...
- Je suis tout ouïe, lui répond son bien aimé, un peu inquiet. Tu peux tout me dire...
- Tu sais que j'ai des nausées ces derniers temps, lui déclare t-elle...Eh bien, Kushi et Zia sont formelles et Indali s'en doute elle aussi...Quant à moi, je le soupçonnais, mais sans me oser me l'avouer...Mendoza...Tu vas être Père... »
A cette déclaration, le navigateur se redresse, ébahi. Mais son air surpris ne dure que quelques secondes puis il réalise, un immense sourire éclairant son visage et rassurant sa compagne. Le marin prend Isabella dans ses bras, l'embrasse et l'étreint tendrement. « C'est merveilleux, chérie ! » arrive t-il enfin à dire, ému, ses dehors de marin endurci s'effondrant tel un château de cartes sous le vent. « Tu ne pouvais pas m'annoncer plus belle nouvelle ! C'est le début d'une fabuleuse aventure ! La plus belle de toutes !»
« Cela n'arrive pas au meilleur moment, ajoute toutefois la bretteuse : cela risque de diminuer mes capacités, je le crains...
- Ce n'est rien ! Nous réussirons, Isabella...Comme toujours, ensemble... » conclut le navigateur.
Ils restent encore là un moment, enlacés, profitant de l'instant, puis rejoignent leurs compagnons.
Voyant les amants sourire et l'air entendu d'Isabella, Indali et Zia se pressent vers eux, incitant le reste de la troupe à venir avec elles.
« Félicitations ! » s'exclame joyeusement Zia entourant Mendoza de ses bras, Indali faisant de même avec Laguerra.
« C'est magnifique, mon ami ! » dit Athanaos, venant de comprendre et posant les mains sur les épaules du marin.
« Tu crois qu'ils nous expliqueraient ce qu'il se passe ? » s'indigne Esteban à Tao qui hausse les épaules. Les jeunes filles rient devant leur air perplexe, les garçons n'ayant visiblement encore rien compris.
« Je vais avoir un enfant » leur concède Isabella, plus à l'aise maintenant qu'elle a réussi à l'annoncer à son amant.
Les deux frères de cœur réalisant enfin la nouvelle ainsi que Sancho et Pedro, ils écarquillent les yeux puis se ruent à leur tour vers le couple pour le féliciter. Gaspard aussi, sa jalousie et sa rancoeur ayant disparu. Les amis restent ainsi tous groupés un moment.
« Oh ! Oh oh oh oh ! C'est magnifique ! » reprend Tao. « Un ou une future membre de l'Ordre du Condor ! Une nouvelle recrue ! Ahah ! » ajoute-t-il en plaisantant avant de terminer : « une fois revenus à Pattala, nous organiserons une grande fête que personne n'oubliera ! »
Emu, Esteban prend alors à son tour la parole, tout en tenant fermement son médaillon : « Laguerra, Mendoza, quand votre enfant sera né, leur promet-il des larmes de joie aux yeux, je veillerai sur lui, je le protégerai ! Tout comme tu as pris soin de moi, Mendoza, durant toutes ces années...J'en fais le serment devant vous et sur mon médaillon... » A ces mots, le marin esquisse un sourire et lui frotte doucement les cheveux. « Ah ! Merci, Esteban, dit-il. Je ne saurai rêver meilleure protection ! Il va me falloir un peu de temps pour réaliser mais en ce moment, je suis le plus heureux des hommes ! Merci à vous tous ! Vraiment ! Mais nous devrions retourner au camp : nous allons attraper froid...»
Machine Olmèque d'Ambrosius. Matinée.
Zarès a eu du mal à s'endormir : la perspective que la fine équipe d'Esteban ait pu lui échapper l'a tourmenté toute la nuit. Dès que le jour se lève, il enclenche les recherches. La machine Olmèque décolle, pour se poser quelques minutes après dans la zone que l'alchimiste pense être celle où le condor se trouvait précédemment. Malheureusement pour lui, il n'a pas bien mémorisé cette localisation. Ivan, son armée et Ambrosius se déploient pour ratisser le périmètre et trouver les amis.
Île d'Ol-Honn. Matinée.
Les compagnons ont réussi à se protéger du froid en s'emmitouflant sous les pelisses et se serrant les uns aux autres. Sancho et Pedro se sont toutefois malgré tout enrhumés. Au petit matin, la troupe fait le point et tente de se préparer du mieux qu'elle peut aux dangers qui ne vont pas manquer de survenir. Tous avancent vers le point indiqué par la carte et sortent de la zone montagneuse puis, bientôt, se trouvent à la lisière d'une petite forêt les séparant d'un cap sur lequel trône une énorme masse rocheuse...
Калюжный Владимир, Public domain, via Wikimedia Commons
Arrivés devant l'éminence, Zia est inquiète : elle sent comme une menace sourde... Elle se sent
épiée... Esteban sent l'inquiétude de son amie : « que t'arrive-t-il, Zia ? » La jeune inca lui explique son sentiment. Mendoza ne peut qu'aller dans son sens : « la zone est entièrement à découvert, déplore le navigateur. Je ne vois pas âme qui vive, mais cela ne veut pas dire que nous n'avons pas déjà été repérés, ou que nous ne le serons pas dès que ferons un pas en direction de ce rocher...
- Prenons bien le temps d'examiner nos options, conseille l'ancienne espionne.
- Je ne vois rien qui ressemble à une entrée, dit Gaspard. Mendoza, t'es sûr que tu ne t'es pas trompé de caillou ? Il faudrait peut être que tu relises la carte ? Tu ne la tiendrais pas à l'envers, par hasard ? »
Le navigateur choisit d'ignorer la remarque et reste concentré sur son examen des lieux...
« On dirait qu'il y a une sorte de puit ici », déclare Kushi en tendant le bras et désignant le sommet du rocher... La chasseresse ayant une très bonne vue, les amis doivent plisser les yeux pour distinguer, effectivement, un cercle dont les contours semblent être faits de métal.
- Il y a sûrement au moins un autre accès, indique Tao : si cet endroit abrite des individus, cela m'étonnerait qu'ils sortent par là...cela ne serait pas pratique du tout !
- Sauf peut être, précise Zia, si ce sont des Olmèques ou s'ils leurs sont apparentés... Rappelles-toi, Tao : ce sont de bons grimpeurs...
- Oui, de vrais petits singes, se souvient Mendoza.
- Attendez ! dit Esteban : je crois voir quelque chose sur le côté ». Tout en restant à la lisière de la forêt, il se déporte de quelques dizaines de pas sur la droite pour mieux observer, puis revient. « Il y a une sorte de grotte. L'entrée de la base ennemie est sûrement là...
- Je déteste avancer ainsi dans l'inconnu, maugrée Laguerra : nous ne savons pas du tout à quel genre d'ennemi nous allons avoir affaire, ni combien ils sont, ni leurs ressources... Peut être y a t-il encore une autre issue derrière ce roc ? Je pense que je pourrai en faire le tour discrètement, mais si j'y vais seule...
- Y aller seule ? répète Mendoza, inquiet. Je ne doute pas de tes capacités à te dissimuler, mais c'est tout de même assez exposé et très dangereux.Si jamais tu venais à être repérée, nous ne pourrions pas te rejoindre à temps pour te protéger...
- Je sais me défendre, lui rappelle-t-elle. Nous sommes onze, désormais. Y aller tous, ou même à deux ou trois risquerait d'attirer l'attention... J'aurai de plus grandes chances de passer inaperçue seule. » Mendoza rechigne toujours, mais se résout à faire confiance au jugement de la bretteuse. Elle s'élance donc, partant sur la gauche, longeant les fourrés, puis la côte. Ils la voient encore tandis qu'elle s'engage sur la glace du lac et s'y laisse glisser, allongée, afin de disparaître d'éventuels regards. Elle sort ensuite complètement de la vue des compagnons. Au bout d'un long moment qui semble être une éternité à Mendoza, Laguerra réapparaît finalement au loin, sur leur droite...Elle rejoint alors ses amis.
« As-tu vu une autre issue ? lui demande le capitaine.
- Non. J'ai fait le tour pour rien ! Enfin, maintenant, nous en sommes sûrs...
- Bon, dans ce cas, annonce Gaspard en dégainant sa rapière, il n'y a plus qu'à aller voir...
- Pour cette fois, je suis d'accord avec toi, dit Mendoza.
- Euh, on ne peut pas simplement attendre que nos ennemis sortent ? suggère Pedro.
- Ce serait plus prudent ! confirme Sancho en hochant la tête.
- Ah ! Vous deux, vous ne changerez jamais ! leur assène Esteban tout sourire. Si vous voulez, vous pouvez toujours rester ici, tous les deux, pendant que nous, nous irons voir ? »
A la perspective de rester seuls sans protection, les deux loups de mer se ravisent: « non bien sûr, clame Pedro : nous venons avec vous, nous sommes ensemble pour la vie ! » Leurs amis sourient.
« Nous devrions faire deux groupes, suggère Athanaos. L'un qui escaladerait le rocher pour descendre par le puit que Kushi a repéré et l'autre qui passerait par l'entrée vue par Esteban..Nous attirerions moins l'attention et en cas de piège, nous ne tomberions pas tous dedans...
- C'est bien pensé, l'alchimiste ! » lui dit Gaspard en lui donnant une tape sur l'épaule. Laguerra approuve également.
Ils décident donc de suivre l'idée du Prophète Voyageur. Après quelques discussions, un premier groupe est constitué d'Esteban, Tao, Zia, Laguerra et Mendoza. L'autre d'Athanaos, Sancho et Pedro, Indali, Kushi et Gaspard. Les compagnons souhaitent, dans la mesure du possible, équilibrer un peu les compétences...Une fois prêts, ils se séparent, utilisant du mieux qu'ils peuvent la forêt et le relief pour avancer vers le rocher. Ils ne courent pas, pour ne pas faire de bruit, mais marchent le plus rapidement possible. Arrivés près du monticule, ils rampent même, le temps d'atteindre la grotte pour les uns et la base du rocher pour les autres. Entrant dans la grotte, Esteban et les siens voient quelques offrandes à terre, similaires à celles qu'ils ont laissé la veille devant le cairn. Quelque chose intrigue Zia : « des personnes ont marché sur les dons faits aux esprits. Qui que ce soit qui soit passé par ici, ce n'était pas un évenque ou un chaman...
- Cette mise en scène est sûrement un leurre, affirme Laguerra. Pour faire croire qu'il n'y a rien d'anormal et dissuader des gêneurs comme nous d'avancer plus loin..
- La grotte s'enfonce davantage en effet, fait remarquer Esteban. La vraie entrée se trouve probablement au fond. »
Ils continuent donc à s'enfoncer dans les ténèbres... Ils ont bien avec eux quelques lampes portatives qu'ils avaient prises à Ambrosius mais ne les utilisent pas, de crainte de trahir leur présence aux éventuels ennemis. Au bout d'un long moment, ils arrivent à un cul-de-sac. Forts de leurs expériences précédentes, ils ne se fient pas aux apparences et inspectent les parois, trouvant finalement l'emplacement d'une pierre curieusement un peu descellée. Esteban appuie sur celle-ci, et un pan de roche s'enfonce alors puis coulisse sur la droite, révélant un tunnel.
Le Fils du Soleil avance prudemment dans le passage. Il a à peine fait quelques pas qu'une lumière diffuse apparaît, éclairant un peu l'endroit. Ils se trouvent dans une salle hexagonale, dont les murs irradient de teintes roses et blanches.
La pièce comprend deux portes sur la droite et deux autres sur la gauche, une cinquième se trouvant en face d'eux. Tout est silencieux alentours et ils ne détectent pas de présences.
«Ce n'est pas de l'architecture muenne ni atlante... affirme Tao, examinant les murs du regard.
- Ce n'est pas non plus de l'orichalque, ajoute Zia. Byzas nous a pourtant dit que de grandes quantités de ce métal avaient été produites ici, il y a très longtemps...
- Ce n'est donc pas ici que se trouve la Cité d'Or que nos nouveaux ennemis ont pu construire... soupire Esteban en baissant les épaules. Ceci ne doit être qu'une de leurs bases... Elle est peut être désertée ? Avançons, nous découvrirons bien une nouvelle piste... »
Ils décident d'examiner tout d'abord les accès se trouvant sur les côtés. N'écoutant que leur courage, ils les ouvrent l'un après l'autre, révélant à chaque fois ce qui semble être un entrepôt. De grandes caisses de métal y figurent, mais ils ne parviennent pas à les ouvrir car elles sont scellées...Zia pourrait peut être les ouvrir grâce à son pouvoir, mais elle ne le fait pas, pensant que cela ferait trop de bruit. Dépités, ils reviennent alors sur leurs pas et empruntent la porte qui se trouvait en face d'eux à leur arrivée. Là aussi des halos lumineux surgissent. Ils aperçoivent un peu plus loin un pont qui semble surplomber le vide et entendent également un léger vrombissement, à peine perceptible. Esteban menant la marche, ils progressent mais tout juste les compagnons ont-ils dépassé la porte que celle-ci se referme derrière eux et semble ne plus vouloir s'ouvrir ! Des faisceaux bleutés jaillissent soudain de part et d'autre des murs et parcourent les amis. « J'ai horreur de ce genre d'examen, dit Mendoza. Tenez-vous prêts à toute éventualité ». Il dégaine son arme et Laguerra son pistolet et tous se mettent sur le qui-vive. Ils craignent l'apparition d'une tourelle, comme ils en avaient fait l'expérience à Céroessa... Mais cette fois, ils feraient des cibles bien plus faciles, n'ayant aucune échappatoire visible. Heureusement, rien de tel ne se produit : l'endroit reste calme.
« Nous n'avons pas le choix, murmure Esteban à ses amis : nous allons devoir continuer... » Mais ses paroles déterminées se heurtent à la dure réalité : quand il s'approche du pont, son vertige le reprend et ses jambes flageolent. Zia lui met alors une main sur l'épaule, pour le rassurer : « ne regardes pas en bas, Esteban et n'aie pas peur : je suis avec toi. Si tu le souhaites, je peux passer devant et te prendre la main...
- Non, Zia, reprend le jeune homme : s'il y a du danger, je ne veux pas t'y exposer...Je dois le faire... Mais ce satané vertige ne me lâchera donc jamais ! » Là-dessus, il ferme les yeux, inspire profondément, expire, puis concentrant son attention sur l'autre bord du pont, il parvient à avancer.
En dessous, Tao, Zia, Mendoza et Laguerra aperçoivent de nombreuses grappes de couchettes, similaires à celles utilisées par les Olmèques pour leur Grand Sommeil. La seule différence étant que celles-ci sont attachées à des piliers, dont le sommet est lui même fixé à l'immense pont sur lequel ils se tiennent. Ils estiment le nombre d'habitacles à plus d'une centaine, mais ceux-ci sont tous vides. Le vrombissement qu'ils entendent semble venir des piliers.
Une fois le pont traversé, ils arrivent dans une autre salle, mais là aussi la porte qui se trouve derrière eux se verrouille. La pièce est vide et ne comprend qu'une autre issue, également fermée. Une voix sinistre retentit devant eux, semblant venir d'un orifice situé au plafond. « Rendez-vous, dit-elle. Déposez vos armes ! » Les compagnons s'y refusent, considérant leurs options. Zia pense utiliser son pouvoir pour forcer une ouverture, mais elle n'en a pas le temps : ils sont bombardés de vives lumières d'un jaune éclatant. Les trois enfants reconnaissent instantanément le même type de dispositif que celui qui les avait sonnés dans la base du Bouclier Fumant. Ils préviennent bien Mendoza et Laguerra et résistent bien un moment mais, malheureusement, ils finissent par succomber aux effets de l'arme et tombent sur le sol...
Ils se réveillent désarmés, dans une pièce aux murs là aussi roses et blancs. Une porte massive, en métal, leur bloque la sortie. Zia essaie bien de la bouger, mais rien n'y fait. Ils restent donc là, impuissants quand, au bout d'un moment elle s'ouvre, laissant apparaître plusieurs hommes et femmes en armure, similaires à celle que portait Byzas. Ils sont armés de lances dont la pointe se termine par une lame bifide et crépite de petits éclairs. Une femme très âgée se détache du lot et s'avance. Ses cheveux sont argentés et filandreux, avec quelques mèches noires au dessus du front. Sa peau est rose, mais très pâle. Ses yeux sont bleu acier et son regard est dur. Un port altier, elle est vêtue d'une ample robe à capuche bleue marine comportant un liseret rouge au niveau des épaules.
Dévisageant les amis, puis désignant Esteban, Tao et Laguerra, la femme leur dit simplement, d'une voix chevrotante : « Comment vous appelez-vous ?". Les trois amis lui répondent et elle poursuit... "Bien, vous trois, venez avec moi ! Nous allons vous interroger .» Mendoza essaie de s'interposer, mais reçoit soudain une décharge provenant d'une lance d'un des ravisseurs. Il s'effondre sur le sol, gémissant de douleur. Laguerra se jette aux pieds du navigateur pour voir si ce n'est pas trop grave. Le marin est presque paralysé, mais il respire...La bretteuse se relève et foudroie les assaillants du regard mais, malheureusement, elle n'a pas ses armes et ne peut rien faire en cet instant. « Vous feriez mieux d'obéir ! » intime la vieille femme. Esteban ne voulant pas que les siens soient blessés, il accepte de la suivre et Tao aussi. Laguerra s'exécute également, regardant toujours leurs ennemis d'un air glacial. Avant d'être emmené, Tao parvient à glisser dans la main de Zia, qui se trouvait derrière lui, la sono-boite qu'il avait en sa possession.
La cellule se ferme et les trois compagnons, entourés, longent un couloir, parsemé de portes, puis tournent à droite et enfin descendent un escalier. « Qui êtes-vous ? demande Esteban à l'aînée qui les guide. Vous n'êtes pas des Olmèques...
- Vous connaissez donc les Olmèques ? lui répond-elle. Intéressant... » Tao réprimande son ami du regard afin qu'il ne trahisse pas d'autre information à leur sujet. Esteban le regarde, penaud.
« Non, reprend leur ravisseuse. Nous nous appelons les Sintashtas.
- Comme le mot que j'ai décodé ! s'exclame Tao, oubliant toute retenue et pas peu fier : je savais que ma traduction était bonne ! » Mais il se rend instantanément compte de sa bourde.
« Tu sais donc lire les anciennes langues ? » déduit la vieille dame. Là, c'est le Fils du Soleil qui adresse un regard lourd de reproche à son ancien naacal..
Ils traversent ensuite la salle contenant les couchettes, le pont les surplombant cette fois. Ils arrivent enfin dans une pièce dans laquelle se trouvent plusieurs cylindres placés horizontalement et remplis de liquide orangé. Trois individus figurent allongés dans ces tubes, couvercles fermés. Sur un panneau de commande situé non loin, d'autres Sintashtas pianotent sur des claviers. Des lumières de toutes les couleurs se mettent à pulser autour des étranges sarcophages et le liquide qu'ils contiennent prend une teinte aveuglante. Tandis que les cylindres palpitent, la vieille femme prend la parole : « nous vous surveillons depuis que votre appareil muen a commencé à survoler la région... Nous l'avons forcé à se poser. Si vous êtes là, c'est que vous êtes informés que le Grand Cataclysme a été déjoué. Peut-être même y êtes-vous pour quelque chose ? En tous cas, ce qui est certain, c'est que vous connaissez des secrets de Mu et d'Atlantide et vous allez tout nous révéler !
- Nous ne vous dirons rien ! promettent Esteban et Tao de concert. Même sous la torture !
- J'en doute fort ! répond leur interlocutrice. Mais rassurez-vous, nous n'allons pas vous faire de mal : nous avons des méthodes bien plus subtiles. Voyez-vous, l'obtention des secrets est notre spécialité... Attendez juste un instant, que je vous montre comment nous allons faire... »
Esteban demande courageusement à leur ennemie : « êtes-vous cette méchante sorcière que craignent les gens des environs ?
- Moi, une méchante sorcière ? répète-t-elle, hilare. Ahah ! Oui, enfin, c'est ce que j'ai fait croire aux idiots qui vivent dans ces contrées depuis des siècles... Je suis contente de voir que cette vieille ruse fonctionne toujours : cela nous évite les visites de gêneurs... Enfin, en général, vu que vous êtes là... Mon vrai nom est Yesubaha, mais je suis plus connue sur ces terres sous le nom de Baba Yaga. » Cela ne dit absolument rien à Laguerra et aux deux amis, qui haussent les épaules. Yesubaha ne s'en offusque pas. Voyant que les lumières parcourant les cylindres viennent de cesser de clignoter et que les tubes s'ouvrent, elle leur déclare : « laissez-moi vous montrer mon tour de magie favori ! Ahah ! »
A leur grande stupeur, Esteban, Laguerra et Tao voient leurs doubles émerger des tubes, un sourire mauvais aux lèvres !
Fin du chapitre
Quels sont les objectifs des sinistres Sintashtas ? Nos amis leur échapperont ils ?
Vous le saurez en lisant le prochain chapitre des Mystérieuses Cités d'Or !
Documentaire
L'île d'Ol-Honn que parcourent nos héros est en fait de nos jours appelée l'île d'Olkhon. Elle est située au cœur du Lac Baïkal. Son sommet est l'un des plus hauts points culminants au monde pour une île. Elle comporte de nombreux paysages : steppe, plages, dunes, rochers de marbre, collines et forêt de conifères, ainsi que falaises... Dans les mythes et les légendes locales, c'est l'habitat des esprits . Un Khan envoyé par les dieux y serait descendu sous la forme d'un aigle royal à tête blonde. Le fils de cet émissaire serait devenu le tout premier Chaman au monde. Le lieu fort de toutes ces croyances est appelé le rocher des chamans, le Bourkhan.
https://fr.wikipedia.org/wiki/Olkhon
Le Scoop de Pichu
« C'est quoi, un chaman ? Demande Pichu.
- C'est quelqu'un qui pratique le chamanisme... répond la voix off.
- Ca, j'aurai pu deviner !dit le perroquet, contrarié...
- Je plaisante, Pichu, reprend la voix off. Le chamanisme est basé sur la communication avec les esprits. D'après ces croyances, les esprits sont partout: dans l'eau, dans l'air, les montagnes, les maisons, pierres, arbres, feux, etc...Il y a aussi des esprits pour les activités. Par exemple, l'esprit Mongol-Bourkhan, est le patron de l'élevage et le dieu du Baïkal...Les esprits protecteurs des tribus et des lieux aident les gens dans leurs affaires. La déesse Mère-Terre, Etouguin, est la force de la nature; c'est elle qui octroie les bonnes récoltes et la prospérité... Le chaman a la lourde tâche de réconcilier les esprits avec les actions des hommes, dans tous les aspects de leurs vies...
- Ca doit lui en faire, du travail ! » constate Pichu.
Au revoir...a bientôt !
Chapitre suivant : Les Sintashtas viewtopic.php?p=105603#p105603