Chroniques Catalanes II. La reconquista.

C'est ici que les artistes (en herbe ou confirmés) peuvent présenter leurs compositions personnelles : images, musiques, figurines, etc.
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TEEGER59
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Re: Chroniques Catalanes II. La reconquista.

Message par TEEGER59 »

Merci. J'ai changé pour "récupéré" car je viens de me rendre compte que cela faisait une répétition.
:Laguerra: : AH! Comme on se retrouve!
:Mendoza: : Ma première leçon ne t'a pas SUFFIT?
:Laguerra: : Cette fois, tu ne t'en sortiras pas si FACILEMENT!
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yupanqui
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Re: Chroniques Catalanes II. La reconquista.

Message par yupanqui »

N’y aurait-il pas un peu de Teeger dans Isabella ?
« On sera jamais séparés » :Zia: :-@ :Esteban:
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TEEGER59
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Re: Chroniques Catalanes II. La reconquista.

Message par TEEGER59 »

Euh, pas vraiment...
C'est une femme forte, ce que je ne suis pas.
:Laguerra: : AH! Comme on se retrouve!
:Mendoza: : Ma première leçon ne t'a pas SUFFIT?
:Laguerra: : Cette fois, tu ne t'en sortiras pas si FACILEMENT!
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Re: Chroniques Catalanes II. La reconquista.

Message par yupanqui »

Il y a une sensibilité commune.
« On sera jamais séparés » :Zia: :-@ :Esteban:
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Re: Chroniques Catalanes II. La reconquista.

Message par IsaGuerra »

C'est un très joli passage ^^
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« J'ai de bonnes raisons de faire ce que je fais » Isabella Laguerra
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pedro
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Re: Chroniques Catalanes II. La reconquista.

Message par pedro »

Une tres bonne histoire aussi
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TEEGER59
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Re: Chroniques Catalanes II. La reconquista.

Message par TEEGER59 »

Suite.

No easy way out.

Après avoir passé ses nerfs sur cette pauvre rose, Mendoza se dirigea vers la demeure d'Estéban et Zia. Située, elle aussi, sur les terres du domaine de Miguel, elle était cependant en retrait des annexes liées à l'exploitation. Les élus habitaient en lisière de forêt, au creux de reliefs tissés de sentiers sauvages et de friches bruissantes.
D'habitude, le capitaine n'aimait rien tant que quitter la grand-route pour s'engager sur le chemin de terre paisible qui menait chez eux. Mais ce soir-là, pour la première fois de sa vie, l'isolement et la noirceur de la nuit humide paraissaient lourds de menaces et il accéléra le pas sur la piste cahoteuse, craignant qu'à tout moment quelque chose ne jaillisse des fourrés. Il s'enfonçait toujours plus entre les arbres hiératiques, dans cette obscurité sans fin, comme si atteindre le logis de ses amis devait être une épreuve, un combat acharné contre les éléments.

53..PNG

Il ralentit quand il arriva devant la grange, plissant les yeux pour sonder ses ténèbres. La lueur de sa lanterne fit surgir de l'ombre les balles de paille et la vieille charrue au soc brisé.
La bougie, enfermée dans son cocon de verre, éclaira également la façade écaillée de l'habitat quand il déboucha dans l'allée. Le bâtiment, de même que l'obscurité qui l'entourait, lui semblait menaçant.
Scrutant le jardin envahi par la végétation, il fut soulagé de voir de la lumière à l'intérieur. Il courut sous le porche afin de s'abriter de la pluie. Là, pour une raison qui lui échappait, personne ne vint lui ouvrir. Pourtant, il était convenu que ses amis l'attendaient. Le Catalan cogna sur les battants en poussant à gorge déployée:
:Mendoza: : Estéban! Zia!
Il plaqua son oreille contre le panneau de bois. Un lointain craquement de plancher trahit une présence... Il tambourina de plus belle. Ses coups répétés n'obtinrent aucune réponse.
:Mendoza: : Ils sont devenus sourds ou quoi?!? (Pensée).
Il tourna la poignée au cas où.
:Mendoza: : On peut toujours rêver... (Pensée).
Le capitaine ne parvint pas à ouvrir car la porte était bel et bien verrouillée.
:Mendoza: : Hors de question de rebrousser chemin! (Pensée).
Intrigué, il essaya encore d'actionner la clenche sans plus de succès.
Il se mit alors à pester car il lui était impossible d'entrer. Même la plus puissante des épaules n'aurait pu défoncer la porte. La grosse serrure devait résister à n'importe quel assaut.
C'est alors qu'il sentit que quelqu'un se tenait derrière lui. Le capitaine fit volte-face, le poil dressé sur l'échine comme s'il était hérissé par un aimant. Il n'y avait rien. Rien que l'obscurité et le "ploc, ploc" régulier de l'eau du ciel qui s'écoulait dans les chéneaux. L'Espagnol tendit l'oreille, essayant de faire abstraction des bruits de la pluie, recula pour observer les fenêtres à l'affût d'un mouvement. Puis il s'engagea sur le carré de pelouse détrempée pour faire le tour de la forteresse. Une fois parvenue derrière, il s'arrêta net.
Ce fut comme si une main invisible lui tordait les tripes. La porte de la cuisine était entrebâillée. Il savait que Zia la laissait toujours fermée à clé en poussant la targette.
Il fit quelques pas en arrière, tournant la tête pour regarder à droite et à gauche, jetant un regard vers les ténèbres qui noyaient le jardin. Son premier mouvement fut de saisir sa lame, or, une fois n'est pas coutume, il ne l'avait pas prise. Il pensa s'enfuir en courant, mais sa propre demeure était assez éloignée. De plus, il ne pouvait pas partir comme ça sans savoir ce qu'il était advenu de ses amis. Pour finir, il se dit que si quelqu'un l'attendait en chemin, il le rattraperait aisément.
:Mendoza: : Il faut que je me reprenne. Si Gaspard était encore de ce monde, là, il pourrait dire que j'agis vraiment comme un lâche! (Pensée).
L'éclat de sa bougie lui apporta un peu de réconfort et il s'efforça de rassembler ses esprits. S'il avait surpris un détrousseur, il se dit que le tintouin causé devant l'entrée l'aurait sûrement fait fuir.
Mendoza tendit l'oreille mais tous les sons étaient étouffés par le crépitement de la pluie. Lentement, il retourna jusqu'à la porte de derrière et la poussa en retenant son souffle.
Silence.
Il fit un pas en avant et son pied heurta un objet. Il y eut un tintement cristallin et quelque chose roula avec fracas sur le sol, lui arrachant un gémissement de terreur. Son esprit affolé battait la campagne et il se demanda un instant si c'était une sorte de piège qui lui aurait été destiné.
Mais il se rendit compte que c'était des bouteilles vides qu'il venait de renverser et il se sentit idiot. Il alluma les bougies aux appliques murales et passa en revue la cuisine.
La crédence, le dressoir, les deux bancs de part et d'autre de la grande table... Tout semblait exactement à sa place. Un vase richement décoré se trouvait toujours sur le buffet, à côté du petit mot qu'avait laissé l'inca à l'attention de son époux, sous un presse-papier, comme à son habitude.
Zia, Estéban, Agustín, les chats... Où étaient-ils?
:Mendoza: : Seigneur! Si jamais quelqu'un leur avait fait du mal... (Pensée).
Il se sentit brusquement envahi par la colère.
:Mendoza: : Estéban! Zia!
Pas de réponse.
Ses yeux se posèrent de nouveau sur le vase. Le dimanche précédent, sa fille adoptive avait composé un bouquet de fleurs des champs. Ce début d'avril avait été très clément et certaines plantes avaient fleuri prématurément.
Maintenant, elles étaient fanées. Toutes flétries, les tiges brunies, elles pendaient lamentablement par-dessus le col du vase. Mendoza se dit que ce ne pouvait tout de même pas être à cause de la chaleur et il se rendit compte que cette pièce était aussi fraîche que ses chais. Il faisait plus chaud à l'extérieur qu'à l'intérieur. Intrigué, il se rapprocha de l'âtre et tendit la main. Sous la cendre grise, les tisons étaient encore tièdes. Alors pourquoi faisait-il si froid dans cette cuisine?
C'est alors que la porte qui donnait sur la salle principale se mit à grincer. Le cœur du Catalan bondit dans sa poitrine. Quatre yeux émeraude se mirent à luire dans la pénombre. Il y eut un feulement furieux et les deux félins du couple entrèrent de front dans la pièce. Ils se figèrent sur le pas de la porte en apercevant le capitaine, qu'ils regardèrent comme si c'était un parfait étranger.
:Mendoza: : Hola, los gatos! Où sont donc passés vos maîtres?
Pimentón arqua le dos en se raidissant et Canela cracha d'un air courroucé, le poil tout hérissé.
:Mendoza: : Allons, allons! Qu'est-ce qui vous prend?
Il voulut faire un pas vers eux mais les deux matous filèrent entre ses jambes, s'enfuyant de la cuisine à toute vitesse.
Juan scruta la pénombre et pénétra dans l'autre pièce. Rien ne semblait avoir été dérangé. Zia avait-elle eu une sorte d'absence, qui lui aurait fait oublier de verrouiller la porte de derrière?

54.PNG

L'Espagnol leva la tête pour regarder vers le palier du premier étage en commençant à penser que c'était ce qui avait dû se produire, puis ses yeux se posèrent sur la porte d'entrée. Le loquet était verrouillé.
Il tourna les talons pour se ruer dans la cuisine, claqua la porte derrière lui, se saisit d'un grand couteau qui traînait sur la table. Les minutes qui s'ensuivirent lui parurent interminables. Il regarda la porte ouverte sur le jardin, se demandant s'il devait tenter une sortie. Les doigts crispés sur le manche du couteau, il murmura d'une voix brisée:
:Mendoza: : Seigneur, je Vous en prie, aidez-moi... Je crois qu'il y a un voleur dans cette maison.

☼☼☼

Du bout de sa petite fourche, Isabella se contenter de promener sa nourriture dans son assiette. Elle s'était forcée à avaler quelques légumes mais n'avait pas touché à la viande. Les déboires de son époux avaient eu raison de son appétit, mais ses enfants, eux, faisaient honneur au plat de Carmina.
Elle leva son verre, se sentant un peu grise, et remarqua d'une voix légèrement brouillée:
:Laguerra: : Ce vin est délicieux.
Carmina: Le señor Mendoza est un excellent maître de chai.
L'aventurière opina et but une autre gorgée. Avant de picorer quelques minuscules navets, elle insista:
:Laguerra: : Ce breuvage est vraiment parfait. Et je dois dire aussi que vous êtes une excellente cuisinière.
La servante secoua la tête avec modestie.
Carmina: Il m'arrive souvent de rater un plat. Je dois avouer que j'ai plutôt tendance à improviser par rapport à la recette. Alors, quelquefois, ça ne marche pas du tout.
:Laguerra: : Moi, je fais très bien les coquille Saint-Jacques avec une sauce aux haricots noirs et des légumes sautés. Si ça vous dit les enfants, je vous en ferai, un de ces jours.
Pablo/ Joaquim/ Paloma: Oh, oui maman!
:Laguerra: : Il faudra d'abord envoyer votre père senner ces mollusques. S'il n'a pas le temps d'aller les pêcher, j'irai moi-même les acheter à la criée.

☼☼☼

Mendoza était immobile dans la cuisine, son grand couteau à la main. Il tendait l'oreille, à l'affût du moindre son, tout en observant par la fenêtre les ombres de la nuit.
Le châssis vibra sous un assaut du vent et il se retourna en sentant passer sur sa nuque un courant d'air froid, comme si quelqu'un lui soufflait dans le cou. Les voilages se balançaient imperceptiblement.
Il jeta un coup d'œil à son arme de fortune, la posa et remit une bûche dans l'âtre. Ensuite, il tendit les mains au-dessus des braises mourantes pour se réchauffer. La chaleur le réconforta mais il se demanda pour quelle raison il faisait toujours aussi froid dans cette pièce.
Tout en écartant un rideau pour scruter l'obscurité, le capitaine se dit qu'il couvait peut-être quelque chose. Y avait-il quelqu'un dehors, attendant son heure? Des intrus, des cambrioleurs qui n'avaient pas eu le temps d'emporter quoi que ce soit à cause de lui?
Il finit par entendre des bruits de pas qui approchaient à vive allure. Un instant plus tard, il aperçut dans le jardin l'oscillation d'une lanterne mais ce fut seulement quand il distingua une silhouette familière qu'il commença à se détendre. Un immense soulagement l'envahit quand il reconnut Estéban remonter l'allée en relevant le col de sa chape. Le capitaine s'adjura:
:Mendoza: : Il faut que tu te contrôles. Que tu n'aies pas l'air trop angoissé. (Pensée).
Mais dès qu'il le vit, toutes ses défenses l'abandonnèrent. La chemise de l'élu était trempée et la pluie avait collé quelques mèches sur son front. Dans sa main, un poulet fraîchement plumé allait faire office de souper. À peine eut-il franchi le seuil de sa demeure, sans même se rendre compte de ce qu'il faisait, Mendoza se jeta à son cou et le serra contre lui. S'accrochant au fils du soleil comme un naufragé à une bouée de sauvetage, il murmura:
:Mendoza: : Dieu soit loué!
Serrant doucement à son tour son vieil ami, Estéban s'étonna:
:Esteban: : Mendoza? Tu es en avance. Je ne t'attendais pas de sitôt.
Le Catalan s'arracha à ses bras et s'empressa de fermer la porte derrière lui en avouant:
:Mendoza: : J'ai eu si peur!
Le front de l'Atlante se plissa en voyant son désarroi.
:Esteban: : Qu'est-ce qu'il y a? Que t'est -il arrivé?
Pour toute réponse, il le débarrassa de son manteau et de sa volaille tout en s'efforçant de reprendre le contrôle de lui-même.
:Esteban: : Viens! Allons discuter dans l'autre pièce. Il y fait meilleur.
L'élu l'invita à le suivre dans la grande salle et le pria de s'asseoir. Contrairement à la cuisine, il régnait ici une chaleur de four. Mendoza se serait cru au cœur d'une étuve malsaine, tant la moiteur souillait sa tunique et tartinait son front.
Estéban lui servit une bière qu'il accueillit comme une délivrance. Une fois installé à table, le capitaine, adossé à sa chaise, roula des trapèzes et décrispa sa nuque. Il plongea ensuite dans le vif du sujet. Il lui raconta ce qui s'était passé. Estéban l'écouta attentivement, l'interrompant seulement pour lui demander certaines précisions. Mendoza parla d'abord de l'intrusion.
:Mendoza: : Je suis certain d'avoir fait fuir quelqu'un.
Son interlocuteur le regarda d'un air perplexe. Il adopta avec son visiteur un ton très formel, tout en parcourant la pièce du regard, comme s'il ne s'adressait pas simplement à lui mais à tout ce qui l'entourait.
:Esteban: : Tu te fais des idées, Mendoza. À part les tiennes, je n'ai pas vu la moindre empreinte de pas ou quoi que ce soit de suspect dehors.
:Mendoza: : Est-ce que je suis en train de perdre la tête? (Pensée).
Les deux chats firent leur réapparition à ce moment-là pour venir se frotter aux chevilles de leur maître. Le Catalan observa leur manège avec étonnement, toujours intrigué par le comportement qu'ils avaient eu un peu plus tôt.
:Esteban: : C'est sûrement la cavalcade de ces deux-là que tu as perçu... Ils se pourchassent sans arrêt.
:Mendoza: : Où sont ta femme et ton fils?
:Esteban: : Agustín dort paisiblement au premier. Quant à Zia, elle...
Il fut interrompu par un grondement sifflant de Canela. Le dos arqué, le chat regarda en direction de l'entrée. Pimentón aussi semblait sur ses gardes. Puis les deux fauves quittèrent la pièce, comme s'ils étaient sur la piste d'une proie. Les deux hommes échangèrent un regard avant de se lever. Les chats filèrent droit vers la cuisine et Estéban les suivit.
Pimentón s'arrêta sur le seuil de la porte, le poil hérissé et se mit à cracher furieusement. Près de la table, Canela leva une patte et poussa quelque chose. Une créature fit un bond, puis un autre.
Le capitaine recula.
:Esteban: : Ce n'est qu'une grenouille, Mendoza. Rien qu'une petite rainette.
L'animal sauta un peu plus loin et Canela tenta de nouveau de lui donner un coup de patte, sans grande conviction, cette fois-ci.
L'Atlante s'accroupit, attrapa le batracien par une patte puis le prit doucement entre ses mains pour le montrer à son ami.
:Esteban: : Pauvre petite bestiole... J'imagine que c'est le temps clément qui l'a induite en erreur. Je...
Il se tut brusquement en remarquant que son invité était devenu livide. Ce dernier s'écarta de lui, les yeux exorbités.
:Mendoza: : Je t'en supplie. N'approche pas ça de moi. J'en ai une peur panique.
:Esteban: : Tu as peur des grenouilles? Je croyais que c'était les serpents, ta bête noire!
Se précipitant pour déverrouiller et ouvrir la porte de derrière, le Catalan dit:
:Mendoza: : Débarrasse-t-en!
Le fils du soleil alla déposer la rainette dans l'herbe et se dépêcha de retourner dans la cuisine pendant que Mendoza y retenait les chats.
D'un ton contrit, il dit:
:Mendoza: : Je suis désolé...
:Esteban: : Ce n'est rien, nous avons tous nos petites phobies.
L'Espagnol se reprit.
:Mendoza: : Bon sang, je dois avouer que mes nerfs ont été à rude épreuve, ces temps-ci.
Estéban lui fit un grand sourire accompagné d'une tape sur l'épaule. Il se lava les mains puis se mit aux fourneaux. Ensuite, ils retournèrent s'asseoir dans la grande salle et l'élu essaya de détendre l'atmosphère.
:Esteban: : Avant d'être interrompu, je disais donc que Zia est retournée au monastère pour une urgence. Un cas de "feu ardent", il me semble. J'ignore quand elle rentrera. Tu n'as pas vu la petite note qu'elle m'a laissé dans la cuisine?
:Mendoza: : Si, mais je ne me serais pas permis de lire ce qui ne me concerne pas... Et toi? Je peux savoir où tu étais pendant tout ce temps?
:Esteban: : Dans le poulailler. J'essayais d'attraper ce maudit poulet.
:Mendoza: : Et tu ne m'as pas entendu vous appeler?
:Esteban: : Non, désolé. Entre la pluie et le caquètement des poules, je n'ai pas fait attention.
:Mendoza: : Tu mériterais une calotte, espèce de saltimbanque! J'ai vraiment eu peur que quelque chose ne soit arrivé...
Pendant ce temps, la volaille rissolée sous son jus emplissait la maison d'un parfum épais.

☼☼☼

Le repas terminé, leurs couverts débarrassés, Estéban posa ses coudes sur la table et se pencha en avant, le regard rivé dans celui de son ami:
:Esteban: : Te remettre en état, j'en fais un défi personnel, et crois-moi, tu seras affûté comme jamais tu ne l'as été! Je vais m'occuper de ton corps... Mais pour ce qui est de ton esprit, je ne suis pas compétent, tu devras faire le ménage toi-même.
Il pointa son index sur le front du marin et poursuivit:
:Esteban: : À présent, je peux bien te le dire, c'est ton état d'esprit qui m'inquiète. Au nom de notre amitié, je ne peux te laisser te tuer à petit feu. Et c'est ce qui est en train de se produire mais tu ne t'en rends même pas compte. Tu as changé, Mendoza, tu es devenu aigri, tu prends tout mal, tu te conduis comme ces nobles gâtés que tu exècres et tu pousses les gens à te détester. J'en suis malade de te voir ainsi. Tu as la tête pleine de purin et ça ne peut plus durer. Tu es bien assez intelligent pour te rendre compte par toi-même qu'il est grand temps de régler ce problème, une bonne fois pour toutes! Qu'est-ce qui t'empêche de récupérer ce que tu as perdu, après tout, sinon toi-même?
Le capitaine devait admettre la clarté de son raisonnement.
:Mendoza: : Il est loin d'être bête, ce môme. Mais ça, je l'ai toujours su... (Pensée).
Il écrasa ses mains sur son visage dans un long souffle, avec l'impression d'avoir une bouilloire à la place du crâne. Après quelques secondes dans la nébuleuse de ses pensées, la salive afflua sur sa langue. Il répondit:
:Mendoza: : C'est bien joli de prêcher la raison, mais tu ne te rends pas compte, Estéban... Jusqu'ici mon corps ne m'avait jamais laissé tomber, bien au contraire. Et là, regarde-moi, je fuis à la vue d'une grenouille et surtout, j'ai dû me résigner face à ces vermines lors de mon agression. J'ai tout perdu! Tout ce qui faisait de moi un homme. J'aimerais bien te voir à ma place, on verrait comment tu prends cette déchéance!
L'élu vit un iceberg glisser sur le visage de son vieil ami. Il secoua la tête, apitoyé tant par la sécheresse qui couvait dans le ton du Catalan que par la teneur de ses propos.
Au lieu de répliquer, le père d'Agustín se leva et alla jusqu'au coffre sur lequel il avait posé le vin. Il s'en versa un gobelet.

55.PNG

L'odeur caractéristique du nectar divin se répandit dans la pièce. Estéban revint s'asseoir tranquillement, sans quitter Mendoza des yeux puis, il savoura quelques petites gorgées. Juan le regardait faire, les sourcils froncés. Enfin, l'Atlante reprit la parole avec une grande douceur:
:Esteban: : Tu as perdu ce qui faisait de toi un homme sachant se battre, c'est d'accord. Mais explique-moi d'où vient cette colère qui t'anime depuis des mois? Je ne t'ai jamais vu ainsi, tu sembles en vouloir à la terre entière, sans aucun discernement. N'es-tu pas fatigué de ce combat qui, jamais au grand jamais, ne t'apportera la victoire?
:Mendoza: : Hormis cette colère, je n'ai plus rien, Estéban. Elle seule me permet de me lever le matin et d'affronter mon quotidien.
L'Atlante sourit.
:Esteban: : Ma foi, nous continuerons avec cette colère. Après tout, elle peut être un excellent catalyseur pour peu que tu la contrôles. Bien, bien... Passons au concret: je connais le programme d'entraînement des soldats de Charles Quint. Nous avons tout le temps qu'il faut pour arriver au résultat escompté. Encore faut-il que tu me laisses faire et que tu suives mes instructions sans rechigner... Attention, je te préviens, ça ne va être ni facile ni agréable! Tu vas suer sang et eau et comme je te connais, tu vas me détester. Surtout au début... Rappelle-toi donc que c'est pour ton bien et que tu m'obéiras jusqu'au bout, quels que soit mes ordres. Mais avant d'aller plus loin, tu vas me donner ta parole de suivre mes directives.
L'Espagnol ironisa:
:Mendoza: : À vos ordres, moussaillon!
:Esteban: : Mendoza, je suis sérieux. Je suis ton ami, tu es dans la panade, je suis là pour t'aider. Pour que ça marche, il faut que tu t'engages, toi aussi. Et je te connais bien assez pour savoir que ta promesse suffira pour ça. Tu te souviens de ce que l'on ressent lorsque l'on est dans une forme parfaite? Ce sentiment inégalable de puissance, de liberté? Je te jure que lorsque j'en aurai fini avec toi, tu vivras à nouveau ce moment divin. Sur mon honneur!
:Mendoza: : C'est bien beau tout ça, mais ce ne sont que des mots.
:Esteban: : Par la malepeste! Fichu cabochard de capitaine, tu as fini de te plaindre? Tu te plais à vivre ainsi? Non. Ta nouvelle situation te convient-elle? Non. Alors tais-toi au lieu de grincher comme un nain acariâtre que nous connaissions.
Estéban faisait naturellement allusion à Ambrosius, l'alchimiste aussi roux qu'un San Simon da Costa*, avec qui ils avaient eu maille à partir durant la quête des cités d'or.
:Esteban: : Laisse-toi faire. Commence par me donner ta parole que tu suivras mes instructions à la lettre.
Le capitaine marmonna quelques mots indistincts.
:Esteban: : Quoi, Je n'ai pas entendu?
:Mendoza: : Je te donne ma parole, là! Tu es content?
:Esteban: : Oh oui, plus que content, je n'ai pas honte à l'avouer. À présent, je te tiens, tu ne pourras plus te défiler! Parfait, on commence tout de suite. Le poulet, j'espère que tu en as bien profité parce qu'à partir de demain, tu changes de régime. Plus de viande grasse. Oui, mon grand, la première chose à faire est de te laver de l'intérieur. Et je pense également qu'un peu de course à pied te fera le plus grand bien!
Mendoza maugréa:
:Mendoza: : Je déteste courir!
:Esteban: : Je ne t'ai pas demandé ton avis. Dans les chais, c'est toi qui dirige, c'est une chose entendue. Mais en dehors du travail, c'est à moi que ta femme a confié les rênes. Nous sommes d'accord?
Le Catalan ne répondit rien, ses yeux soudain étrécis sous l'arc de ses sourcils. Claquant dans ses mains, l'élu fit:
:Esteban: : Qui ne dit rien consent. Je te suggère de retourner chez toi afin d'aller dormir. Regarde-toi! Franchement, tu as une tête à effrayer un poulpe!
Juan palpait son visage creusé. Poils crissants, cernes profondes, plis prononcés.
:Mendoza: : Du pas joli-joli, en effet. (Pensée).
:Esteban: : Allez! À demain, Mendoza!
:Mendoza: : Ouais, bah mon petit doigt me dit que demain sera une journée pourrie... (Pensée).

À suivre...

*
Fromage fumé de la Galice, de couleur jaune, virant parfois à l’orange.
Modifié en dernier par TEEGER59 le 26 janv. 2020, 22:13, modifié 5 fois.
:Laguerra: : AH! Comme on se retrouve!
:Mendoza: : Ma première leçon ne t'a pas SUFFIT?
:Laguerra: : Cette fois, tu ne t'en sortiras pas si FACILEMENT!
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Akaroizis
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Re: Chroniques Catalanes II. La reconquista.

Message par Akaroizis »

:lol: J'adore ! Vivement l'entraînement d'Esteban sur Mendoza, hâte de voir ça. :x-):
Et très bien écrit, comme d'habitude. J'ai crains au début, mais ensuite je fus comme Mendodo. :tongue:
Le présent, le plus important des temps. Profitons-en !

Saison 1 : 18.5/20
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yupanqui
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Re: Chroniques Catalanes II. La reconquista.

Message par yupanqui »

Bravo Teeger.
Tu nous fais vraiment ressentir les sentiments et les atmosphères.
On a l’impression d’y être.
J’ai eu peur avec Mendoza, pour lui... et surtout pour Esteban et Zia.
Juste impensable : Agustin laissé seul dans la maison restée ouverte...
Mendoza va-t-il redevenir aussi fort que le héros des Chaldis ?
Vous le saurez en regardant le prochain épisode des mystérieuses chroniques de Teeger !
Modifié en dernier par yupanqui le 25 janv. 2020, 14:00, modifié 1 fois.
« On sera jamais séparés » :Zia: :-@ :Esteban:
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pedro
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Re: Chroniques Catalanes II. La reconquista.

Message par pedro »

Bonjour,tres bonne histoire,vive la suite s'ilteplait
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